Par Salah Eddine Sidhoum*
En un mois, la ville de Berriane a connu trois « émeutes » sanglantes, entraînant mort d’hommes et destruction de biens. Des Algériens vivant sur une même terre durant des lustres se mettent à se regarder en chiens de faïence, à s’insulter puis à se combattre. Il est certain que des clivages ont toujours existé entre nos frères mozabites et chaambas. « Elles remontent très loin dans le temps » pour reprendre un compatriote sur ce site. Cela existe partout et ce n’est nullement une spécificité algérienne. Mais jamais, au grand jamais, cette culture de la haine dans cette paisible région n’a atteint ces dangereux sommets au point de voir en son voisin un ennemi qu’il faudrait chasser, voire tuer.
Trois compatriotes du M’zab m’ont rendu visite la semaine dernière pour m’informer de la situation. L’un d’eux, septuagénaire se disait très intrigué par l’évolution de la situation et cette haine entretenue par certains « milieux ». Il s’interrogeait tout comme ses compagnons sur le silence et l’impuissance des « autorités » malgré la tension très perceptible durant plus d’un mois. Il me dira avec beaucoup d’amertume et de tristesse que la France coloniale, avec toute sa puissance et son intelligence n’avait pas pu diviser les populations de la région, sur le plan ethnique ou religieux. Toutes ses tentatives avaient été vouées à l’échec. Et voilà que 46 ans après la « libération » du pays, on parle de conflits entre mozabites et chaambas, entre malékites et ibadites, entre arabes et berbères de la région et de Darfour Algérien ! Cela fait peur d’entendre et de lire tout cela.
A la lumière des informations et des témoignages reçus, nous sommes en droit de nous interroger sur ces individus cagoulés qui dans la nuit de vendredi se sont attaqués aux biens de paisibles citoyens pour les incendier. Plus de 250 commerces et maisons ont été réduits en cendres durant les trois jours « d‘émeutes » selon mes interlocuteurs.
Nous sommes en droit de nous interroger sur les informations (à confirmer) faisant état de l’incendie du drapeau national et de slogans de type « mankhafouche, am’ana Busch » (nous n’avons pas peur, Bush est avec nous). Cela n’est pas sans nous rappeler les provocations des « services » lors des événements de Kabylie en avril 80, relayées par ses organes audiovisuels et écrits de propagande, nous « informant » que les kabyles avaient brûlé l’emblème national, déchiré le Saint Coran et scandé : « Vive la France » ( !!). Une provocation mesquine pour tenter de discréditer à l’époque les revendications culturelles et démocratiques légitimes de la population de cette région.
Nous sommes en droit de nous interroger sur le temps mis par les services dits de sécurité pour intervenir. De nombreux témoins parlent de plusieurs heures, quand on sait avec quelle « célérité » ces mêmes services interviennent pour disperser tout rassemblement pacifique et tabasser les mères de « disparus » réclamant la vérité sur le sort de leurs enfants, les enseignants qui réclament un minimum de dignité et de conditions de travail ou les syndicalistes autonomes, pourchassés dans les rues il y a à peine quelques semaines.
Tout comme nous sommes inquiets et en droit de nous interroger sur le traitement de ces événements par une certaine presse tant nationale qu’internationale, de ses informations infondées et de ses sous-entendus peu innocents. N’avons-nous pas lu et entendu qu’une mosquée (« el masdjid el atik ») avait été incendiée ? N’avons-nous pas lu et entendu qu’il s’agissait d’un conflit entre arabes et berbères du M’Zab ? De chaambas contre mozabites ? De malékites contre ibadites ? Et voilà que des frères de la région craignent de voir se créer un nouveau Darfour dans leur région. Des relents de nettoyage ethnique pour reprendre encore une fois un intervenant sur ce site.
Je suis persuadé et de nombreux compatriotes partagent mon avis, que cette situation délétère n’est pas dûe à un conflit entre mozabites et chaambas, ni entre malékites et Ibadites, ni entre arabes et berbères. Elle est l’?uvre du milieu maffieux local, ramification de l’oligarchie militaro-financière nationale qui détient le véritable pouvoir, comme il en existe dans plusieurs villes du pays (Constantine, Oran, Tizi-Ouzou, Djelfa, Souk Ahras, Tébessa, Blida…….). Une véritable pègre qui a vu le jour lors de la libéralisation sauvage du pays, qui a prospéré durant les années de sang et de larmes et qui a tissé sa toile sur tout le territoire national. Une pègre qui a pris en otage des villes entières avec la complicité de certains fonctionnaires véreux à tous les échelons des institutions. C’est le véritable POUVOIR LOCAL délégué par LE POUVOIR OCCULTE NATIONAL. De nombreux correspondants locaux de presse connaissent parfaitement les agissements de ces « milieux ». Certains scandales que veulent bien nous « révéler » certains quotidiens (dans le cadre de fuites organisées et de règlements de compte claniques) nous montrent les profondes ramifications dans les institutions (affaire du foncier, affaires de l’ex-wali d’Oran et de Blida, affaires des banques privées, affaire Zandjabil….).
Ce sont ces beggarines politico-financiers locaux qui entretiennent cette culture de la haine, profitant ici et là de certaines spécificités locales et ethniques, voire rituelles (même si je n’aime pas trop ces termes de la discorde) mais aussi de la situation peu reluisante d’une jeunesse réduite au chômage et à la déshérence. Ce sont eux qui essaient de faire admettre aux frères chaambas que les mozabites sont une communauté renfermée et qui vit dans l’opulence grâce à son commerce florissant. Et de faire admettre aux frères mozabites qu’ils sont une minorité opprimée par ses voisins Chaambas qui ne seraient que des affairistes protégés par le pouvoir. Et ce sont ces beggarines qui ont utilisé ces provocateurs cagoulés pour embraser la région.
Je crois que malgré certains dérapages inévitables, au vu des facteurs cités plus haut, la population, après cette phase d’heurs et de terreur, a prouvé encore une fois sa maturité et sa sagesse. Elle a montré encore une fois qu’elle était apte à se prendre en charge et à régler ses conflits par le dialogue. Selon les dernières informations qui nous sont parvenues et devant la faillite des « autorités » et leur impuissance à régler les problèmes de leurs administrés, des sages de la région tentent de désamorcer cette crise et se réunissent sans discontinuer pour renouer les fils du dialogue entre voisins et frères que certains charognards voudraient transformer en ennemis.
Nos fraternelles et respectueuses salutations à tous nos compatriotes de la région. Avec toute notre compassion à toutes les victimes de cette odieuse provocation. Que Dieu Protège ce peuple opprimé.
Salah-Eddine SIDHOUM – TAHIA BLADI – 23 Mai 2008
*Médecin et militant des droits humains en Algérie
Voir aussi : Vérités sur les affrontements de Berriane
Par Salah Eddine Sidhoum*
En un mois, la ville de Berriane a connu trois « émeutes » sanglantes, entraînant mort d’hommes et destruction de biens. Des Algériens vivant sur une même terre durant des lustres se mettent à se regarder en chiens de faïence, à s’insulter puis à se combattre. Il est certain que des clivages ont toujours existé entre nos frères mozabites et chaambas. « Elles remontent très loin dans le temps » pour reprendre un compatriote sur ce site. Cela existe partout et ce n’est nullement une spécificité algérienne. Mais jamais, au grand jamais, cette culture de la haine dans cette paisible région n’a atteint ces dangereux sommets au point de voir en son voisin un ennemi qu’il faudrait chasser, voire tuer.
Trois compatriotes du M’zab m’ont rendu visite la semaine dernière pour m’informer de la situation. L’un d’eux, septuagénaire se disait très intrigué par l’évolution de la situation et cette haine entretenue par certains « milieux ». Il s’interrogeait tout comme ses compagnons sur le silence et l’impuissance des « autorités » malgré la tension très perceptible durant plus d’un mois. Il me dira avec beaucoup d’amertume et de tristesse que la France coloniale, avec toute sa puissance et son intelligence n’avait pas pu diviser les populations de la région, sur le plan ethnique ou religieux. Toutes ses tentatives avaient été vouées à l’échec. Et voilà que 46 ans après la « libération » du pays, on parle de conflits entre mozabites et chaambas, entre malékites et ibadites, entre arabes et berbères de la région et de Darfour Algérien ! Cela fait peur d’entendre et de lire tout cela.
A la lumière des informations et des témoignages reçus, nous sommes en droit de nous interroger sur ces individus cagoulés qui dans la nuit de vendredi se sont attaqués aux biens de paisibles citoyens pour les incendier. Plus de 250 commerces et maisons ont été réduits en cendres durant les trois jours « d‘émeutes » selon mes interlocuteurs.
Nous sommes en droit de nous interroger sur les informations (à confirmer) faisant état de l’incendie du drapeau national et de slogans de type « mankhafouche, am’ana Busch » (nous n’avons pas peur, Bush est avec nous). Cela n’est pas sans nous rappeler les provocations des « services » lors des événements de Kabylie en avril 80, relayées par ses organes audiovisuels et écrits de propagande, nous « informant » que les kabyles avaient brûlé l’emblème national, déchiré le Saint Coran et scandé : « Vive la France » ( !!). Une provocation mesquine pour tenter de discréditer à l’époque les revendications culturelles et démocratiques légitimes de la population de cette région.
Nous sommes en droit de nous interroger sur le temps mis par les services dits de sécurité pour intervenir. De nombreux témoins parlent de plusieurs heures, quand on sait avec quelle « célérité » ces mêmes services interviennent pour disperser tout rassemblement pacifique et tabasser les mères de « disparus » réclamant la vérité sur le sort de leurs enfants, les enseignants qui réclament un minimum de dignité et de conditions de travail ou les syndicalistes autonomes, pourchassés dans les rues il y a à peine quelques semaines.
Tout comme nous sommes inquiets et en droit de nous interroger sur le traitement de ces événements par une certaine presse tant nationale qu’internationale, de ses informations infondées et de ses sous-entendus peu innocents. N’avons-nous pas lu et entendu qu’une mosquée (« el masdjid el atik ») avait été incendiée ? N’avons-nous pas lu et entendu qu’il s’agissait d’un conflit entre arabes et berbères du M’Zab ? De chaambas contre mozabites ? De malékites contre ibadites ? Et voilà que des frères de la région craignent de voir se créer un nouveau Darfour dans leur région. Des relents de nettoyage ethnique pour reprendre encore une fois un intervenant sur ce site.
Je suis persuadé et de nombreux compatriotes partagent mon avis, que cette situation délétère n’est pas dûe à un conflit entre mozabites et chaambas, ni entre malékites et Ibadites, ni entre arabes et berbères. Elle est l’?uvre du milieu maffieux local, ramification de l’oligarchie militaro-financière nationale qui détient le véritable pouvoir, comme il en existe dans plusieurs villes du pays (Constantine, Oran, Tizi-Ouzou, Djelfa, Souk Ahras, Tébessa, Blida…….). Une véritable pègre qui a vu le jour lors de la libéralisation sauvage du pays, qui a prospéré durant les années de sang et de larmes et qui a tissé sa toile sur tout le territoire national. Une pègre qui a pris en otage des villes entières avec la complicité de certains fonctionnaires véreux à tous les échelons des institutions. C’est le véritable POUVOIR LOCAL délégué par LE POUVOIR OCCULTE NATIONAL. De nombreux correspondants locaux de presse connaissent parfaitement les agissements de ces « milieux ». Certains scandales que veulent bien nous « révéler » certains quotidiens (dans le cadre de fuites organisées et de règlements de compte claniques) nous montrent les profondes ramifications dans les institutions (affaire du foncier, affaires de l’ex-wali d’Oran et de Blida, affaires des banques privées, affaire Zandjabil….).
Ce sont ces beggarines politico-financiers locaux qui entretiennent cette culture de la haine, profitant ici et là de certaines spécificités locales et ethniques, voire rituelles (même si je n’aime pas trop ces termes de la discorde) mais aussi de la situation peu reluisante d’une jeunesse réduite au chômage et à la déshérence. Ce sont eux qui essaient de faire admettre aux frères chaambas que les mozabites sont une communauté renfermée et qui vit dans l’opulence grâce à son commerce florissant. Et de faire admettre aux frères mozabites qu’ils sont une minorité opprimée par ses voisins Chaambas qui ne seraient que des affairistes protégés par le pouvoir. Et ce sont ces beggarines qui ont utilisé ces provocateurs cagoulés pour embraser la région.
Je crois que malgré certains dérapages inévitables, au vu des facteurs cités plus haut, la population, après cette phase d’heurs et de terreur, a prouvé encore une fois sa maturité et sa sagesse. Elle a montré encore une fois qu’elle était apte à se prendre en charge et à régler ses conflits par le dialogue. Selon les dernières informations qui nous sont parvenues et devant la faillite des « autorités » et leur impuissance à régler les problèmes de leurs administrés, des sages de la région tentent de désamorcer cette crise et se réunissent sans discontinuer pour renouer les fils du dialogue entre voisins et frères que certains charognards voudraient transformer en ennemis.
Nos fraternelles et respectueuses salutations à tous nos compatriotes de la région. Avec toute notre compassion à toutes les victimes de cette odieuse provocation. Que Dieu Protège ce peuple opprimé.
Salah-Eddine SIDHOUM – TAHIA BLADI – 23 Mai 2008
*Médecin et militant des droits humains en Algérie
Voir aussi : Vérités sur les affrontements de Berriane
Lire la suite : http://tunisiawatch.rsfblog.org/archive/2008/06/05/questions-sur-les-evenements-de-berriane.html.
le péril sans frein est à nos portes
Est-ce que vous pensez que les berbéristes sont de retour sur notre patrie bénie des dieux pour faire le lit de satan chez nous.