Ecce homo crie la presse. Dans la foule, de nombreux catholiques, "43%" d'entre eux selon un sondage paru pour le JDD. Ils hurlent comme les autres à l'égard du pape, ce qui fait dire à certains observateurs que le "pape se coupe de sa base". Ces observateurs ne sont pas des plus mauvais habituellement, mais ils s'égarent comme ç'en est désormais l'habitude, à voir le pape comme un chef de parti élu, d'un quelconque pays démocrate. Si le sondage est saugrenu. Il n'en a pas moins été commandé et diffusé.

En attendant, on se délecte : après la levée de l'excommunication des évêques traditionalistes, après l'excommunication autour de l'avortement pratiqué sur une fillette de neuf ans, viennent les propos du pape sur le préservatif, qui aggraverait selon lui la situation dans la prévention contre le sida. Aussi, bien sûr, la foule demandera Barabas… et la démission du pape.

Oui… Car tout cela rappelle les zheures les plus sombres de l'obscurantisme le plus ténébreux du moyen-âge! Car nous, en morale, nous nous y connaissons. Ce n'est pas à nous, qui vivons au XXIème siècle qu'on va en apprendre, même après les deux plus terrible guerres que la terre ait porté, il y a quelques dizaines d'années seulement! Nous ne sommes plus, justement, au moyen-age et le pape peut dire ce qu'il veut! Que dit-il au fait? Ah oui… mais qu'a-t-il bien pu dire?

En réalité, il n'a rien dit de bien spécial, qui n'ait pas déjà été dit, il a simplement rappelé les positions de l'Eglise, sans en ajouter. Tout a été monté en épingle par la presse et quelques associations, qui tout en étalant leur indignation se permettent de refaire parler d'elles, même brièvement, par une prise de position claire, même si elle reste convenue.

Tout d'abord, l'évêque négationiste, Robert Wiliamson, n'a pas été réintégré en tant qu'évêque, l'excommunication le concernant a juste été levée, ce qui signifie qu'il peut désormais, comme un simple fidèle, et guère plus, communier parmi les autres catholiques. On sait que depuis la position de l'Eglise a été claire sur le négationisme, qu'elle ne cautionne pas et le pape l'a redit : il ne savait rien des propos de "l'evèque" et les a condamnés fermement. La demande de levée des excommunications émanait des évêques traditionalistes eux-même. Cela n'enlève rien au fait que Vatican II devra être discuté, à nouveau, avec les évêques traditionalistes, Rien n'est donc encore joué pour une pleine réintégration.

 L'indignation autour de l'excommunication après l'avortement pratiqué sur une fillette de neuf ans est à nuancer largement, en suivant les faits, en suivant l'historique. Mais le sujet dépassait cette pauvre enfant, abusée par son beau-père. L'avortement des jumeaux est, dans la pensée de l'Eglise, un drame qui s'ajoute à un autre drame. Il ne s'agit pas d'un prêtre en habit, narines fumantes, père la vertu fulminant son excommunication sur une pauvre enfant. Elle ne l'a d'ailleurs pas été, à la différence de son entourage et de ses médecins.

Pour un avortement, l'excommunication est automatique… c'est ce qu'a rappelé l'évêque. Si les soins donnés à la fillette avait entrainé la perte des embryons, il n'y eut pas eu d'excommunication, c'est la volonté délibérée de le pratiquer qui est en cause. Il s'agit d'une règle stricte avec laquelle on ne transige pas. Pour l'Eglise, l'avortement est, ni plus ni moins qu'une sorte de meurtre, qu'Elle ne saurait tolérer. La chose n'est pas nouvelle. Elle n'empèche pas la compassion.

Mais il s'agit en soi d'un fait divers géographiquement lointain, autour duquel tout un chacun a émis une opinion. On ne connait pas l'enfant. Lui a-t-on demandé son avis à son âge? Il est à craindre que non. On ne lui avait rien demandé non plus auparavant. Le tout est sordide. Il se dit que sa santé n'était pas réellement en danger. L'accouchement se serait fait par césarienne, si la grossesse avait été menée à terme. Au Brésil, pays très catholique, un véritable bras de fer se joue entre pro et anti avortement et tout cela se joue bien au-dessus de cette petite infortunée, qui ne demandait sans doute pas tant de publicité autour de son malheur, un malheur dont tout un chacun se moquerait si l'on ne se servait pas de sa mésaventure.

Il sera utile de lire également ce que le pape a vraiment dit au sujet du préservatif. Ici aussi, il est dans la logique de l'Eglise, maniant les interdits, la compassion et la charité. Là non plus, rien d'extraordinaire, rien de nouveau.

En attendant, le pape s'est bien rendu en Afrique, où il a été chaleureusement accueilli. En attendant le pape y a dénoncé, au-delà de la guerre, la cupidité et la corruption, mais aussi les activités des multinationales, il a exorté les plus puissants des africains à aider les plus pauvres, il a appelé l'Afrique à devenir le continent de l'espérance. Si son appel a été entendu sur place, s'il a soulevé un véritable enthousiasme, si beaucoup d'efforts devront y être fait, c'est avec beaucoup de justesse que le constat a été dressé. Personne d'autre ne pouvait le faire aussi justement.

Et ce sera toujours un avant-gout du 2 ème Synode d'Afrique qui se tiendra en octobre. En effet, au-delà de l'usage du préservatif, au-delà de telle et telle récrimination de l'occident envers le pape, les prêtres d'Afrique sont plus proche des réalités africaines que ne le sont nos penseurs occidentaux et sont plus à même de dénoncer les travers de leur société, n'excluant pas même de faire leur auto-critique…

Ce sont ces réalités qu'ont masqué durant le séjour du pape les différentes prises de position des journaux français. Dans une époque qui aime tout simplifier, le pape est parfois trop complexe, il faut souvent bien l'écouter… à défaut, ses propos sont déformés et simplifiés. Car c'est bien une forme de mépris pour les "nègres" qu'ont vu la plupart des africains dans les discours autour du préservatif de l'occident. Et on ne peut que se joindre au pape pour souhaiter que l'Afrique devienne réellement le continent de l'espérance.