Même en faisant partie des publivores les plus acharnés, on ne peut parfois s’empêcher de se demander si on nous prend pour des imbéciles. Certes, la publicité vend du rêve, créée du besoin, nous propose des choses auxquelles nous n’aurions sans doute pas pensé à acheter tout seul, mais les moyens employés laissent souvent perplexe.
Décortiquons un slogan qui fonctionne pourtant depuis des années : "Après le vôtre, probablement l’un des meilleurs laits" pour des aliments pour bébés. Explication de texte : "Après le vôtre", déjà, la produit se situe lui-même en deuxième position, "probablement", aucun nourrisson n’ayant témoigné, personne n’est sûr de rien, "l’UN des meilleurs", comme tous se disent naturellement le meilleur, quel apport publicitaire peut bien avoir cette accroche ?? "APRÈS le vôtre, PROBABLEMENT l’UN des meilleurs laits". Peut-être, éventuellement, sur un malentendu, ce lait fait partie des meilleurs, mais on n’est décidément sûr de rien. Et de toute façon, rien ne vaut le vôtre. Alors ? De la pure littérature, une formulation pleine de contradictions que la marque suit depuis une dizaine d’années…
Dans un tout autre ordre d’idées, les crèmes anti-rides. Les mannequins qui les présentent ont 14 ans, heureusement qu’elles n’ont pas de rides, avec ou sans produit ! Comment faire confiance à un label qui utilise des adolescentes qui viennent à peine de se remettre de leur peau grasse ou de leur acné pour des crèmes miraculeuses censées gommer les outrages de l’âge des femmes de 35-40 ans ? Il existe un nouveau marché pour les seniors, les "peaux matures", où là, les publicitaires emploient des femmes qui ont réellement l’âge d’être crédibles, mais entre les deux, point de salut.
En suivant cette idée, et là on explose tous les codes de la logique humaine : les crèmes amincissantes. Les modèles sont non seulement minces comme des fils de haricots verts mais les publicités sont odieusement retouchées. Les plus grands photographes, les plus grands réalisateurs de pubs l’admettent : une femme sans cellulite ni imperfection cutanée, ça n’existe pas. Seule la marque au "quart de crème hydratante" a créé l’événement en montrant de "vraies" femmes, avec leurs vraies rondeurs et non retouchées. Même punition même motif pour les produits capillaires : aucun ne vous donnera le même résultat que dans la pub, même si vous utilisez toute la gamme pendant 5 ans. Un reflet par-ci, une touche de brillant par-là, une couleur ravivée, des fourches gommées, des boucles soi-disant naturelles (nouveau marché grâce au brassage culturel français : les cheveux frisés. Promesse : de crépus frisottés à boucles botticelliennes. Gros, gros pari…) soigneusement fabriquées au fer à friser, des cheveux lisses grâce à des shampoings miracles patiemment détendus aux plaques en céramique… Les miracles, hélas, n’existent pas plus que les femmes aux cuisses parfaitement lisses…
Vous pouvez rétorquer "Mais on le sait, on n’est pas si bêtes !". Eh bien il faut croire que si. Le projet de loi visant à indiquer systématiquement qu’une photo a été retouchée a bien failli passer. Dans de nombreux pays, les publicités pour les mascaras "effets faux cils" diffusent un message précisant… qu’il s’agit en effet de faux cils pour les besoins de la pub ! La France y a miraculeusement échappé. Serions-nous finalement moins idiots que la moyenne ? Les "publicités" contre les accidents de la route sont parfois violentes mais souvent elles fonctionnent, pourquoi ne pas envisager d’arrêter de mentir aux gens en leur montrant la réalité non s’ils achetaient le produit mais plutôt s’ils ne s’en servaient pas ? Imaginons le charmant vieux monsieur obligés de mixer ses pommes du fait de son unique chicot être modèle non pour des fruits mais pour du dentifrice : "Qui c’est qui ne s’est pas brossé les dents comme on s’est tués à le lui répéter ??". Au lieu de montrer des working girls ou des enfants pour des publicités pour les fast food, pourquoi ne pas imaginer des mannequins grande taille ou des enfants déjà obèses avec "Ca se passera comme ça, chez Mc Mickey !" ? Montrer des mamies aux rides profondes proclamant "Si j’avais su, j’aurais hydraté ma peau à 30 ans" ?
Politiquement incorrect ? Sans doute. Mais nous ne sommes plus des enfants. Ou plutôt si. Si on nous effraie avec un croque-mitaine, peut-être que…
Bonsoir et merci d’avoir rédigé cet article que j’apprécie car il me rappelle d’excellents souvenirs avec un certain sketch de notre regretté Coluche.
Souvenez-vous, la lessive aux enzymes avec ses p’tits bras musclés, la crasse qui fait le tour, faire des nœuds pour mieux laver, etc…
En effet, à chaque fois que, comme vous, j’entends ou vois certaines publicités, je ne peux m’empêcher bien entendu de les commenter et de m’imaginer ce qu’il aurait pu en faire aussi.
De là, s’apercevoir que les « créatifs » publicitaires n’ont pas tellement évolué, ni encore moins progressé !!
Je ne reviendrai pas sur les pubs pour crèmes amincissantes, ni celles pour des cosmétiques divers et variés sensés nous préserver du temps qui passe… Nous sommes toutes de grandes filles, capable de discerner le faux du vrai. Après, on a droit aussi au rêve…
Toutefois, la pub pour le lait « probablement l’un des meilleurs après le vôtre » est extrêmement bien pensée. Au delà du fait que légalement les fabricants de laits maternisés sont sensés promouvoir l’allaitement maternel, ce spot surfe sur un concept extrêmement puissant : la culpabilité maternelle…
Dès que vous avez mis votre enfant au monde, il se révèle. Entre les ayatollahs de la mamelle qui prônent un allaitement exclusif jusqu’à l’âge de 1 an et les féministes jusqu’auboutistes qui scandent que non, vous n’êtes pas une vache laitière, que faire ?
Celles qui auront décider de faire « meugler la bête » 🙂 se poseront toujours les mêmes éternelles questions : ai-je assez de lait, est-il assez nourrissant ?… Celles qui auront pris le parti de ne pas allaiter, mais de donner le biberon dès les premiers jours, se verront taxer de mères égoïstes, voire indignes…
Je poursuis ici, mon commentaire était trop long… 😉
Cette pub va dans les deux sens. Aux premières, les allaitantes, elle leur renvoie une image positive d’elles-mêmes : « rien ne peut remplacer le lait d’une maman, le meilleur du monde ». C’est valorisant et conforte dans le choix de donner le sein. Cela déculpabilise ensuite pour la période du sevrage : « je lui ai donné le meilleur de moi, maintenant, je vais donner l’un des meilleurs laits à mon bébé ».
Aux deuxièmes, celles qui ont pris le parti de ne pas allaiter, c’est aussi très déculpabilisant : « soit, vous ne les allaitez pas, mais vous allez leur donner ce qu’il y a de mieux sur le marché ».
La prise de vue est magnifique également, on voit une mère et son enfant dans une position qui rappelle très fortement celle de l’allaitement, sauf que le bébé boit un biberon (le seul défaut, c’est qu’il va falloir m’expliquer comment la maman peut d’un côté caresser le pied de son bébé et de l’autre sa tête, tout en donnant le bibi à un nourrisson de 3 mois qui ne sais pas encore le tenir tout seul… C’est ça la magie de la pub).
Je poursuis ici, mon commentaire était trop long…
Bref, tout ça pour dire, que sur ce coup-là, on ne prend pas les mères pour des imbéciles, mais juste pour des mamans, bourrées d’hormones et de culpabilité… 🙂
C’est en cela que cette pub est à mon sens une vraie réussite !!
Pour info, je suis une maman de 2 enfants, allaités 3 mois chacun et que je me souviens à l’époque de l’impact qu’avait eu ce spot sur moi… 🙂 😉