La candidature du républicain et mormon Mitt Romney a pris un coup dans l’aile. Il assure qu’il ne pratique pas l’évasion fiscale, mais la presse américaine relève qu’il a placé au moins 8 millions d’USD dans des fonds aux îles Caïman, un paradis fiscal. Le Daily News (NYC) suppute qu’en sus de cette somme, il pourrait avoir mis au chaud « entre 5 et 25 millions supplémentaires ».

À chacun son président des riches, fréquentant des cantines et brasseries populaires dans des Palavas-les-Flots lointains. Venant de bénéficier d’un récent désistement en sa faveur d’un autre concurrent républicain dans la course à la nomination, Mitt Romney risque de se retrouver bientôt hors-jeu.
Non parce qu’il serait trop libéral-modéré, et non conservateur, comme l’en accusent ses détracteurs (comme Gringrich).
Mais parce que deux pilules sont dures à passer pour le public américain (non, il ne s’agit pas du fait qu’il parlerait le français, ce qui est assurément hautement suspect). D’une part, ces fonds dans un paradis fiscal.
Romney assure qu’il règle des taxes comme aux États-Unis sur ces millions conservés au large de la côte est des É.-U. Ses plus chauds partisans veulent bien le croire mais même au sein de son parti, il commence à passer pour un « robber baron », un obligé des Woerth et consorts équivalents, en quelque sorte, un « pas vu, pas pris ».
Car d’autre part, il a dû publiquement admettre que sa fortune était imposée à seulement 15 %. Même aux États-Unis, c’est peu. Newt Gringrich, pas forcément plus aisé, a répliqué que, pour lui, comme pour tout le monde à ce niveau de richesses, c’était du 31 %. Ajoutant aussitôt que son objectif était de baisser le taux d’imposition au même niveau que celui dont bénéficiait son adversaire.

Pour Obama, c’est du 25 %, non en raison de son emploi, mais de ses droits d’auteurs. Romney vit d’une fortune accumulée grâce à un fonds, Bain Capital, qu’il a dirigé jusqu’en 1999. Depuis, il en engrange les bénéfices et fait uniquement de la politique.

Pas avant avril

Romney s’est engagé à faire le point sur son imposition en avril. Soit après qu’il ait réussi à prendre la tête dans les primaires. La ficelle est un peu grosse. Par ailleurs, il a préconisé des mesures fiscales désavantageuses pour les classes moyennes et généreuses (près de 300 000 dollars en moins) pour les plus gros possédants. 

Il a aussi joué son Estrosi en estimant que ses honoraires de conférencier sont modestes. La bagatelle de 374 000 dollars quand même en 2011, selon le New York Post. Petit joueur comparé à un Tony Blair (bientôt à un DSK peut-être), mais quand même. Ce n’est pas une rétribution de bankster, mais cela s’en approche pour la plupart des Américains.

Bref, si Ronald Reagan avait une fortune due à sa popularité d’acteur, les prestations d’acteur du millionnaire gestionnaire de fonds devenu rentier font tâche. Énormément d’Américains placent leurs économies, même relativement modestes, dans des fonds de placement. Au moment où les partenaires (associés) de Goldman Sachs s’accordent des bonus confortables (voir notre autre article de ce jour), cela ne plaide pas pour le candidat Romney.

Un autre concurrent, Perry, veut que Romney rende publics tous ses revenus depuis l’an 2000. Le père de Romney, George, candidat en 1968, avait divulgué 12 années de déclarations d’impôts.

La « unorthodox IRA » (pour Internal Retirement Account, ou épargne-retraite) de Romney a jouxté, sur le site du Wall Street Journal, une critique des primes chez Goldman Sachs. Romney verrait en fait son imposition reportée à 2017 et là, il pourrait payer jusqu’à 35 % de ce qu’il retirerait de son capital. On estime que Romney « pèse » jusqu’à 250 millions d’USD.

Conclusion d’un interlocuteur de Rick Perry en Caroline du Sud sur Romney, qui fait aussi la conclusion du NY Post : « mais qu’a-t-il donc à dissimuler ? ».
Jusqu’à présent, Romney était le favori dans les sondages. Obama a commencé à faire diffuser un premier spot télévisé de campagne, fondé sur l’éthique, le bénévolat, &c. Surtout du blabla convenu. Pour le moment, pas besoin de se montrer méchant à l’endroit de Romney car Gringrich s’en charge très bien. Rick Perry et Rick Santorum ne sont pas en reste. Pour eux, Romney est une girouette. Cela, bien sûr, évoluera.