S’associant à des failles, au Néogène(1) se forme, dans les Pyrénées orientales, une succession de fosses tectoniques, Seu d’Urgell, Cerdagne et Conflent. Faisant exception, par rapport aux autres fosses, la dépression de la Cerdagne est une demi-fosse asymétrique. Elle est située à l’extrême ouest de la faille de la Têt. Sa formation et son évolution sont conditionnées par le mouvement dextre de la dite faille compensé par le mouvement normal, d’ouest en est, du bloc pyrénéen. D’importantes couches de dépôts assurent son remplissage sédimentaire. Celui-ci s’organise en deux grandes unités, le Néogène inférieur et le Néogène supérieur, résultant de deux situations différentes se succédant.
Au Néogène inférieur les schistes et les ardoises, des roches à texture feuillée, se déposent en strates, en association avec des veines alluviales, aux caractéristiques sédimentaires, dépendant de la feuille source. La stratigraphie, sur Estavar, présente des couches-source, à base schisteuse, composées de conglomérats(2) et de lutites(3) massives, de couleur rouge ou grise, avec, dans les zones marginales des cônes de déjection, des feuilles de lignite, bois fossile, plus ou moins épaisses. Ces associations se localisent principalement dans la zone septentrionale de la fosse de Cerdagne, le territoire d’Estavar se situant à l’extrême nord de celle-ci.
Au Néogène inférieur, tout particulièrement dans les couches de lignite et les argiles voisines, de très nombreux mammifères de grande taille, fossilisés, s’y découvrent. Les données scientifiques et paléontologiques résultant des travaux, – 1884 et 1886 -, de Rérolles qui remarque la présence d’un félin de grande taille, le Félis SP. Par contre, en 1886 et en 1889, Almero et Bofil y découvrent des restes de Deinothérium Bavarycum et de Mastodontes Angustidiens.
La plus grande contribution qui est portée au gisement, est l’œuvre de Dupéret et Rérolles, en 1910. Par leurs découvertes conséquentes, ils allongent la liste des mammifères ayant vécu , au Miocène, sur le territoire de la commune d’Estavar. Ils déterminent que la majorité des espèces provenaient de l’argile inférieure ainsi que des couches de lignite elles-mêmes. Tel était le cas des Castors Deageri, Mastodontes et Ictithétium SP. Au demeurant, dans l’argile sableuse, « au-dessus de la mine d’Estavar », ils citent et décrivent divers restes d’une nouvelle sous-espèce d’Amphycyon, l’Amphycyon Major Pyrénaïcus. Il faut attendre Vilalte et Crusafont, et l’année 1947, pour que se produisent de nouvelles additions à la faune d’Estavar. Ces scientifiques mentionnent l’existence de Dicerorhinus Scheleiermarcheri et de Macrothétium Grande. Finalement, Golpe, en 1981, reprenant toutes ces bases, modifie les attributions systématiques à certaines espèces, révisant les données de la faune de macromammifères estavaroise et en dresse un catalogue.
Depuis, la liste de mammifères retrouvés à même le gisement principal, la mine de lignite, s’établit comme suit : Chalicomis Jeageri, Amphycyon Major Pyrénaïcus, Progenetta SP, Chalicothérium Grande,Dicerorhinus Scheleiermarcheri, Deinothérium Alaévius, Tétralophon Longirostris et Dryopithécus(4) Fontani, un des maillons de la lignée humaine.
Les découvertes, ci-dessus citées, et l’absence apparente de données portant référence de micromammifères autorisent certaines précisions qui concernent la datation du territoire. L’absence d’Hipparion et la présence de Dicerorhinus Scheleiermarcheri permettent d’exprimer une théorie de classification territoriale d’Estavar dans le Vallésien(5) inférieur, une époque où existait, aussi, leCricetulédon. Pourtant, la présence d’Amphycyon Major Pyrénaïcus et de Chalicothérium Grande, non moins spécifique, préconise l’inscription d’Estavar et de son territoire, sans qu’elle n’en dépasse les limites, dans le Vallésien supérieur.
Dans la proposition de ces deux données fondamentales, le territoire d’Estavar doit être inscrit, tout simplement, toute notion de supérieur ou d’inférieur occultée, dans le Vallésien. A cela, une explication concordante : De nos jours, trois rivières, – le Sègre, l’Angoust et l’Estahuja -, ainsi qu’un torrent, – l’Avenosa -, arrosent le territoire : celui-ci, aux frontières du Néogène supérieur, était en bordure du bassin lacustre de Cerdagne qui, suite aux dépôts alluvionnaires successifs et conséquents, s’est comblé et résorbé lentement marquant, par cela, une partie des terres dans le Vallésien supérieur.
Enfin, au Quaternaire(6), la fosse de Cerdagne enregistre une série de cinq périodes glaciaires, – glaciations de Donau 2,1 à 1,8 million d’années, de Günz 1,2 millions d’années à 700.000 ans, de Mindel 650.000 à 350.000 ans, de Riss 300 000 à 120 000 ans et de Würn 75.000 à 10.000 ans -, distinctes les unes des autres, qui se reconnaissent au travers des nombreuses couches stratifiées à caractère glaciaire, puis de type fluvio-glaciaire et, enfin, fluvial, sous forme de terrasse. Présentement, les derniers dépôts alluvionnaires sont la résultante des multiples déluges et inondations qui, deux ou trois fois par siècle s’abattent sur ce territoire.
Notes.
(1) Le Néogène est le dernier système de l’ère Cénozoïque, – 65,5 millions d’années à nos jours -. Il commence il y a 23,03 millions d’années. Il se subdivise en Miocène, – 23,03 à 5,332 millions d’années -, Pliocène, – 5,332 à 2,588 millions d’années -, Pléistocène, – 2,588 Millions d’années à 11.000 ans -, et de l’Holocène, – 11.000 ans à nos jours -. D’un point de vue géologique les continents avaient déjà approximativement leurs emplacements actuels, le changement le plus notable étant la jonction de l’Amérique du Nord et de l’Amérique du Sud. Le climat s’est sensiblement refroidi durant cette période. Cette tendance culmine pendant les glaciations du Pléistocène. La remontée du niveau des océans, – ou transgression post-glaciaire -, amorcée à la fin du glaciaire à environ -100 mètres avec le début de la fonte des inlandsis de l’hémisphère nord, s’est poursuivie, depuis environ -35 mètres, jusqu’au niveau actuel, atteint il y a environ 6.000 ans.
(2) En pétrographie, un conglomérat est une roche détritique issue de la dégradation mécanique d’autres roches et composée de morceaux discernables liés entre eux par un ciment naturel. Pour être considérés comme discernables, les morceaux doivent mesurer plus de 2 millimètres, – en dessous de cette taille, on aurait affaire à un grès -. Les conglomérats sont le plus souvent de nature sédimentaire, mais ils peuvent également être volcaniques.
(3) Les lutites ou pélites sont une classe de roches sédimentaires détritiques dont les éléments ont un diamètre inférieur à 1/16 millimètres. Le terme utilisé pour désigner les sédiments composés de ce type de particule est silt, ou argile pour les plus petites. Pour les sédiments consolidés, – cimentés -, on utilise plutôt les termes de siltite et argilite. Elles se présentent sous la forme d’une roche argileuse et se caractérisent par une forte capacité de rétention à l’eau mais une faible perméabilité en général
(4) Le dryopithèque, – « singe des chênes » en grec et, pour certains paléontologues, ancêtre et maillon de la lignée humaine -, est un genre éteint de primates qui ont vécu au cours du Miocène supérieur, de 15 à 8 millions d’années avant notre ère.
(5) Le Vallésien est un sous-étage du Miocène supérieur classifié entre le Serravallien et le Tortonien.
(6) Le Quaternaire, – limite inférieure entre environ 2,4, premières glaciations dans l’hémisphère nord, et 1,5 million d’années, apparition des premiers radiolaires bathiaux froids en Méditerranée, à nos jours -, désigne une période géologique récente, qui se poursuit actuellement. Elle est caractérisée par le retour de cycles glaciaires. En paléontologie, le Quaternaire est marqué par l’évolution du genre Homo, dont font partie les humains et dans sa dernière période par l’extinction d’un grand nombre d’espèces d’oiseaux et mammifères notamment.
[b]Ça devient compliqué les formations géologiques et cette faune découverte.
Tout d’abord à quoi ressemblaient ces bébêtes?
Enfin pourquoi donne t-on toujours des noms barbares à tout çà?[/b]
[b]Je crois que je vais faire l’impasse sur les noms compliqués, pour ne savourer que la beauté du site où vous nous emportez une fois de plus CATALAN !
SOPHY[/b]
[quote]Ludo a dit : Enfin pourquoi donne t-on toujours des noms barbares à tout çà?[/quote]
parce que la caste des scientifiques se gargarise de noms ronflants… mais ça fait plutôt beauf…
[quote]SOPHY a dit : Je crois que je vais faire l’impasse sur les noms compliqués, pour ne savourer que la beauté du site où vous nous emportez une fois de plus CATALAN ![/quote]
Je me suis un peu laissé aller, il est vrai… et encore je me suis retenu pour éviter d’user de trop de mots… pour rester compréhensible… mais ce que je tenais le plus c’était démontrer que la lignée humanoïde, avec les Dryopithèques qui étaient in situ, dès au moins 15 millions d’années, dans toute la chaine des Pyrénées, n’est pas toute issue du rift africain…