Ma première adresse de courriel (ou mel, ou mail) était celle d’un serveur universitaire (celui du Centre de calcul régional du campus de Jussieu, adossé directement à la dorsale Renater). C’était circa 1992. Je rapatriais les messages à l’aide d’un modem de La Commande électronique (débit de 9 600 bps). Ils étaient tous pertinents, le pourriel (spam) n’ayant pas encore sévi. Disposant ensuite (circa 1994) d’un compte AOL à titre gracieux, ayant plus ou moins délaissé mes autres comptes (celui du CCR, mais aussi celui du Babillard de l’Atelier télématique de Paribas, banque encore indépendante de la BNP), les adresses en « @aol.com » et « @aim.com » sont devenues alors mes plus usuelles.
Puis, lors du lancement de Cybercable, alors qu’AOL mettait fin à mon abonnement gratuit, j’ai eu l’opportunité de devenir « alpha testeur » pour mon secteur. La gratuité limitée dans le temps m’a décidé, le service était balbutiant, mais j’en avais connu d’autres, et je suis resté fidèle à Cybercable, puis à Noos, devenu Numericable. Mais Noos n’a pas tenu ses promesses et comme j’avais fini par rejoindre les abonnés de Cybercable en colère (l’association d’utilisateurs Luccas), et j’avais fini par lourdement travailler distance, j’ai « divorcé » fin 2007. Au profit de Cegetel, devenu SFR.
Très récemment, ayant perdu un mot de passe d’accès à un forum, j’ai demandé à ce qu’il me soit de nouveau communiqué.
Rien n’arrivait à mon adresse (cegetel.net) actuelle. Ah, mais oui, je m’étais inscrit du temps de Noos à ce forum. Allons donc voir…
10 000 messages accumulés
Il m’a fallu près d’une heure pour vider ma boîte « Noos » chez Numericable. Impossible de tout sélectionner avant d’avoir éliminé, progressivement, plus de 2 000 messages, en utilisant simultanément deux navigateurs. Hormis des communiqués de presse, devenus rares au fil du temps, tous les messages, mais vraiment tous, qu’ils soient labellissés « spam » ou non (il y en avait des pages entières de la sorte), étaient soit des pourriels non-repérés par le moteur du site, soit des messages aucunement sollicités (à caractère commercial plus diffus). Près de 400 Mo accumulés.
J’ai aussi retrouvé mon carnet d’adresses (le même que celui que j’avais déporté sur Plaxo pour faciliter la migration vers Cegetel), que je n’ai pas supprimé : on ne sait jamais… Une nouvelle migration n’est jamais à exclure.
Je dispose aussi d’adresses de secours (Gmail, par ex.), que je toilette assez régulièrement. Je rapatrie l’essentiel sous Mozilla Thunderbird, vidant ainsi les disques durs des hébergeurs. Mais ce n’est pas le cas de tous mes correspondants qui encombrent, jusqu’à saturation, les « fermes de données » stockant des messages qu’ils ne consulteront jamais plus.
Et si, par hasard, sur AOL, j’avais accumulé autant de messages que sur Cybercable et Noos ?
Ouf, non, mon ex-boîte était vide, mais, bizarrement, pas le carnet d’adresses.
En revanche, les deux boîtes (Noos, Aol) fonctionnent encore puisque j’ai pu m’envoyer à moi-même un message, reçu via SFR-Cegetel. Faute de savoir comment les faire supprimer, ces anciennes adresses risquent de constituer des « pompes à pourriel » potentielles.
Stu-pé-fait
Je me suis retrouvé stupéfait de chez Abasourdi, et même pris d’un léger tremblement, en m’imaginant que j’aurais pu rediriger tous les messages envoyés à ces adresses obsolètes sur mon actuelle boîte.
Songez : des dizaines de milliers de messages non sollicités !
La plupart des attachées de presse (si ce n’est toutes) vous le confirmeront, de très nombreux journalistes n’ouvrent presque plus leur(s) boîte(s) professionnelle(s).
Un communiqué, même attendu par le destinataire, a toute chance de finir dans les limbes si vous ne téléphonez pas pour signaler son envoi.
Trop d’infos tue l’info, mais trop de messages et de pourriels ne tue pas la messagerie électronique : contrairement à votre boîte postale « escargotine » (celle qui reçoit le « snail mail » traditionnel), saturée de publicités, celle de votre messagerie peut accumuler parfois jusqu’à un giga de tout, de n’importe quoi, d’essentiel négligé comme d’inessentiel.
La plupart des fournisseurs d’accès vous permettent de toiletter automatiquement votre messagerie. Cette option n’existait pas quand j’ai quitté Noos, il est fort possible qu’AOL l’ait appliquée par défaut.
Commencez donc par fixer un temps de latence (d’immédiat à plus d’un mois) pour vider automatiquement votre corbeille et votre classeur de courriers indésirables. Sérieusement, vous soulagerez la planète. Gizmodo, qui signale que le guide gastronomique Zagat vient de se faire avaler par Google, dénonce le risque pour l’environnement que représente la boulimie de contenus du géant de l’Internet.
« Google dévore autant d’électricité qu’une grande ville », titre Gizmodo. Soit 260 millions de watts, ou « le quart de la production d’une centrale nucléaire ». Nos contenus et ceux des autres ne sont pas recyclables, et chacun de nous consomme mensuellement avec Google l’équivalent de ce que « brûle » une ampoule de 60 watts allumée trois heures.
Le New York Times donne la parole à Urs Hoelzle (Google), qui considère que cela vaut mieux que d’aller en voiture jusqu’à la bibliothèque (ou ludothèque) la plus proche. L’argument n’est pas tout à fait ridicule. L’autre argument avancé étant que Google veille à utiliser les techniques les moins polluantes (l’air conditionné, le refroidissement des disques durs, sur son site finlandais, a recours à un circuit d’eau de mer… pas trop tropicale).
Allègre aurait eu raison ?
L’un des arguments avancés par Claude Allègre, c’est que le progrès scientifique et technique viendra à bout des conséquences des dérèglements climatiques et autres phénomènes de pollution. Une récente découverte tend à lui donner (partiellement) raison, soit la conception d’une pile électrique liquide rechargeable, beaucoup plus économique (anodes et cathodes sont en suspension dans le liquide). Prototype prévu en 2013, adoption généralisée espérée pour la prochaine décennie. Les applications dépasseraient le cadre de l’industrie automobile (car le liquide permet aussi de mieux stocker l’électricité produite par l’énergie solaire). Admettons. Admettons que Google, et tant d’autres, trouveront à employer des solutions innovantes.
Mais qui gagnera la course ? C’est élémentaire, Cher Watson : il est plus aisé de vider ses pourriels et ses anciens messages que de déterminer si le pot de yaourt doit aller dans la boîte à couvercle jaune ou vert. Commençons par économiser l’énergie.
Pour le pourriel, c’est l’inverse de la chasse d’eau. Plus vous la tirez, moins vous consommez. Videz donc vos boîtes locales ou déportées (Gmail, Hotmail…). Au-delà, tentez de vous désabonner à des tas de services commerciaux. L’effet pervers pourrait être qu’ils en reviennent aux pubs déposées dans les boîtes postales, mais vous pouvez aussi le contrer.
Dernier point : je ne sais combien je consomme en rédigeant cet article, et combien vous consommez en le lisant. Il faudrait peut-être, finalement, que je m’efforce d’écrire moins long. Dérisoire ? Pas vraiment. Tout s’accumule… Ah, oui, aussi, beaucoup d’entre-nous écrivent aussi « pour Google » (multipliant les mots-clefs dans le corps des textes). Il conviendrait peut-être d’allègrement s’en dispenser (ou d’en user avec modération).
P.-S. – au fait, c’est combien, en consommation énergétique et émissions de CO2, la publication et divulgation d’un sondage superflu (sur la popularité de Carla Bruni, par exemple) ? Cette approche n’est guère abordée par Hugues Cazenave, d’Opinion Way, dans son essai chez Michalon, La Guerre des sondages. Cela étant, un sondage sur les modes d’utilisation des boîtes de courrier électroniques ne serait peut-être pas tout à fait inutile…
Merci Jeff j’ai appris beaucoup de choses en vous lisant n’ayant même pas près de moi un ado pour me guider quand je patauge sur la toile.
Si je peux me permettre, j’apporterais bien la précision suivante qui permettra, pour certains une meilleure compréhension de l’article :
Il est probable que nombre d’entre vous soient protégés -plus ou moins efficacement- de tous ces pourriels, d’où votre scepticisme sur l’article.
Ce qu’il faut bien comprendre, c’est que c’est votre client de messagerie qui vous protège en arrêtant de télécharger chez google les messages inintéressant. Mais tous ces pourriels, google les gère quand même, même si vous ne les voyez pas.
Merci Jeff. Plus qu’instructif.
Ben oui, un disque dur consomme moins quand il est vide, c’est connu…
Ce qu’il faut pas lire.
Pour Popy :
On parle Raid(e) avant que l’un (moi), ridiculise l’autre (vous).
Nous pourrions aussi rappeler comment les dates étaient consignées en Assembleur.
Mais vous n’étiez peut-être pas né.
Et puis, vous savez, récapitulez vos connaissances en CPM. On ne sait jamais, nous pourrions devoir repartir de loin.
Je ne vois pas vraiment ce que mes compétences en prog (qui restent honorables malgré mon inexpérience en assembleur, désolé d’être jeune) viennent faire dans la consommation énergétique des fermes de serveurs de Google. Surtout quand on sait qu’une des raisons de la création de gmail était… d’utiliser l’espace de stockage que google avait en surplus…
Ah, n’oublions pas que si le spam prospère, c’est parce que des vieux cons cherchent absolument à bander pour pas cher, ou que des petits cons en veulent une plus grosse.