Pour 150 000 euros de consommation, le jus d’orange est offert

On ne sait trop combien un jus d’orange est facturé à l’Aura Mayfair (48, Saint-James Street, Londres), mais si vous réglez une note de 150 000 euros (121 060,50 £), la carafe de jus de fruits (orange, ananas, cerise…) est offerte. Eh, il n’y a pas de petits profits.

Régulièrement, la presse britannique publie les notes de comptoir des traders, banksters, et membres de la jet set. Enfin, surtout la presse « populaire », la gutter press (presse de caniveau), pas trop la quality press (qui, en France, commence à assassiner Mediapart en raison de l’affaire Cahuzac).

Dernier en date à défrayer la chronique : Christian Grey (rien à voir avec Fifty Shades, en fait), ou plutôt Dexter Koh, qui se plait à se comparer avec le protagoniste du livre. Dexter Koh, 30 ans, n’est pas un banquier du Square Mile (la City), mais un « agent » (un chargé d’image, de négociations de droits) de célébrité.

Célébrant un gain au poker, il ne s’est pas vu facturer un pichet de jus de fruits à l’Aura Mayfair, une boîte de nuit de Saint-James Street. C’est « complimentary », gracieusement offert. Le trentenaire a simplement régalé ses invités avec un mathusalem de Cristal Roderer (26 000 livres), un jéroboam de la même marque, et divers magnums d’Ace of Spades, une cuvée prestigieuse de la maison champenoise Armand de Brignac.

Il aurait misé assez fort au poker pour remporter des jetons valant un somme (indéterminée) avec six zéros derrière l’unité. 1 000 000 au minimum. Cela valait bien de twitter la note de bar, équivalente à environ 150 000 euros.

Perso, au Roderer, je préfère certains Krug ou Deutz. Mais je ne suis pas ingrat : Roderer m’a régalé de Cristal dans une vie antérieure, et ce n’est pas mal du tout. Pas aussi vineux qu’un Salon, mais, il faut élargir ses horizons gustatifs.

Bah, c’est quoi, finalement, 150 000 euros ? À Saint-Tropez, avec quelques cols de champagne contenant des paillettes d’or, on y parvient vite. Avec ou sans la présence d’Ashley Roberts, une demi-mondaine télévisuelle.

Le dernier truc à la mode pour les « fauchés » bien nés britanniques ? Se verser du champagne sur la tête. Pas n’importe lequel. De la Veuve si possible, ou un équivalent. C’est réservé aux étudiants d’Oxbridge (Oxford, Cambridge) des meilleurs colleges.

C’est vrai qu’on se sent tout petits avec nos charcutailles de Monique Ranou (« la tradition du goût ») et nos Ferrero Rocher de la réception de l’ambassadrice. Encore un gorgeon de Goulou™ (« le régal du palais ») ou de Kiravi® pour imaginer que le flacon importe peu ?

Bon, la « prime de fin d’année » pour les assistés sociaux sera de 152 euros. À peu près le dixième, euh, non, le centième, du pourboire du personnel de l’Aura Mayfair (15 790,50 £). Que le personnel s’amuse !

Le gars va faire des humiliés : un trader n’avait claqué que 40 000 £ avec des Dom Perignon chez Raffles, début novembre dernier. Mais un autre avait quand même atteint 200 000 £ chez George Panayiotou à Liverpool (club du Hilton Hotel) en mars dernier. Il s’agit d’Alex Hope, 23 ans : l’avaleur n’attend pas le nombre des années.

Mais surtout, ne croyez pas que cela soit si exceptionnel. C’est en fait plutôt courant, pas qu’à Londres, Saint-Tropez, ou Hong Kong, Singapour… Allez, un petit Mon Chéri pour faire passer ?

 

Auteur/autrice : Jef Tombeur

Longtemps "jack of all trades", toujours grand voyageur. Réside principalement à Paris (Xe), fréquemment ailleurs (à présent, en Europe seulement). A pratiqué le journalisme plus de sept lustres (toutes périodicités, tous postes en presse écrite), la traduction (ang.>fr. ; presse, littérature, docs techs), le transport routier (intl. et France), l'enseignement (typo, PAO, journalisme)... Congru en typo, féru d'orthotypographie. Blague favorite : – et on t'a dit que c'était drôle ? Eh bien, on t'aura menti !

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