Photo(maton) du jour : Marine Nyiri

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La photo du jour, ce n’est pas forcément de la « belle » photo (mais cela ne l’exclut pas), ni même de la « bonne » photo, mais c’est une photo qui porte en soi un peu de sa propre histoire. C’est pourquoi, plutôt que de choisir pour ce jour des photos réussies « de » et avec Julien Clergue, rencontré aussi au salon Paris Photo, j’ai choisi de vous évoquer plus longuement cette « photo de photo » qui sort Marine Nyiri du quotidien et d’un relatif anonymat.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Salon Paris Photo, jeudi 19 novembre 2009, conférence de presse HP (Hewlett-Packard), avec notamment Jean-Philippe Martinez, directeur de la division imprimantes grands formats (larges laizes, d’où son surnom… que je vous laisse deviner), et des personnages d’HP France et Europe (venus du siège de Barcelone) encore plus hiérarchiquement importants que lui. Il y a là Philippe Sérénon, de ArtTrust, Xavier Soule, de l’agence Vu’, Lucien Clergue, académicien français, et on cause techniques numériques, traçabilité des œuvres, certification fiduciaire, et je vous en passe. Enfin, je ne vous passe pas tout puisque j’évoquerais la certification ArtTrust plus longuement ailleurs et plus tard. Mettons que, comme le communiqué de Mathilde Delville, de l’agence Bespoke, ou comme Santi Morera ou Thierry Dupasquier ou François Martin (HP), et d’autres, ne le disent ou ne l’ont pas écrit, ce n’est pas qu’un méthode concurrente de la Digigraphie d’Epson. En sus, c’est une garantie d’apposition d’un label traçable et total infalsifiable breveté par des Français, exclusivité mondiale, &c. Cocorico !

 

Je tape quelques plaques de Julien Clergue pas réflexe, puis je me dis que ce n’est pas cela qui me fera la « photo du jour » de Come4News. Or, aller parcourir un grand salon comme Paris Photo au Carrousel du Louvre, et ne pas en rapporter une in situ, ce serait tout aussi impardonnable qu’inenvisageable. Sur les trois de Julien Clergue, je vois que deux sont convenables mais pour un tout autre usage. Baguenaudant (non, je n’avais pas mes bagues Cokin et autres filtres à antéposer devant l’objectif, c’est à prendre au sens premier), par pure sérendipité (serendipity),  je retrouve Julien Clergue sur l’espace la galerie exposant ses célèbres nus aquatiques. Clic-clac, Kodak, c’est dans la boîte. Enfin, dans le Lumix pour lequel Leica en personne m’a délivré un certificat de garantie en PDF (avec mon numéro de série Lumix-Panasonic), c’est mémorisé. Ce zinc léger et versatile m’a fait réserver le Pentax K aux occasions où il s’impose (dont celles consistant à épater le pékin et laisser croire au client qu’il en aura pour son argent, même si c’est de l’argentoc et non tic’). Mais il produit, en focale fixe, les photos dont j’ai le réflexe en pareilles circonstances : des photos de presse, style « grande région » de la PQR (presse quotidienne régionale). La « Photo du jour » de C4N doit se hisser au-dessus de cela.

 

C’est donc une autre fois que je me gausserai – gentiment – de l’académicien Julien Clergue. J’ai bien une vue un peu rigolote de lui qui aurait convenu, en sus de l’académique (provinciale), assez bateau, que j’ai faite. Question de participer moi aussi au débat sur l’identité nationale française. Qui ne brocarde pas l’Académie et les Immortels n’est pas tout à fait français, je trouve. C’en est suspect. J’autorise d’ailleurs Éric Besson à consigner cette considération hautement significative et symbolique sur le site annexe de son ministère, sans façon. Un quarteron de politicards ringards, issus de formations en déshérence ou perdition, se sont plaints que leurs brèves de comptoir au sujet de l’identité nationale se soient retrouvées, sans leur autorisation, sur le suscité site. Il ne sera pas dit qu’en ma qualité de Præsident-propagandiste-maréchal du PrRoUt (Parti de rien, revenu de tout), je me déroberait. Besson, tu pourras dire, le maréchal, le voici ! Mais on s’égare…

 

Encore, que, pas tout à fait. La photo du jour, je croyais l’avoir trouvée dans l’espace réservé aux lauréat·e·s du Concours SFR Jeunes talents. Partout ailleurs, les photographes sont singulièrement absent·e·s, laissant à leurs agentes ou leurs galeristes le soin d’évoquer leurs photos. Là, bien sûr, les photographes sont présent·e·s, mais bien peu de badauds ou de visiteuses les abordent. Donc, tout comme dans les salons du Livre ou d’art, j’imaginais trouver une femme ou un homme de l’Art attendant, dépité·e, les demandes de dédicaces ou de renseignements ne venant pas, au point qu’on ne les attend plus, qu’on se plonge dans ses pensées. Cela fait généralement de bonnes photos de gens assoupis, formant une moue, faisant la molle, &c. Ou des choses plus amusantes.

 

Ainsi de Marine Nyiri, toute surprise qu’on la photographie, qui lèverait un regard inquisiteur vers l’objectif. Elle le fit. La photo conviendrait pour une « Photo du jour ». Mais c’est cette photo d’essai prise à la va-vite qui tient le haut de la rubrique. Pourquoi ?

 

Tout d’abord, j’ai trouvé la superposition des mots à verrous (on dit ainsi pour des mots clefs ?) plutôt intéressante. Je lis « cité-frontière », je vois un portrait anthropométrique d’une jeune fille à expulser d’urgence. N’est-elle pas l’une de ces semi-apatrides de la Mitteleuropa ? Une Balkanique ? Et puis, Nyiri, Nyiri, ne serait-ce pas hongrois ? Si fait, c’est une famille du Banat hongrois, proche du Banat serbe, mais fixée dans le Banat roumain, qui fut naguère (1918 encore, pour partie) austro-hongrois. On en a fait une bonne petite gauloise des faubourgs franciliens de Lutèce (enfin, plutôt du Neuf-Trois, plus précisément, et elle se sent «

une petite fille d’immigré en quête d’identité… C’est vraiment le propos de mon projet photo... »). Au point qu’elle ne situe plus tout à fait la Transylvanie comme la délimitaient ses ancêtres. Une réussite française, quoi ! « Le concept de frontière conduit à une réflexion sur l’identité, » lis-je, « copié » au moins une fois (vous me le copierez cent fois, Xavier Bertrand et Darcos, ex-ministres de l’Instruction ou de la Fraternité – enfin, « Solidarité » – afin de bien le mémoriser). Je ne sais si, quand on enlèvera cette plaque, la peinture conservera trace de cette phrase, et des autres. Toujours est-il qu’au lieu de causer « identité française » au lycée Papillon, c’est au Papillon, café-bar et salle d’expositions proche de la galerie de Popa (le caricaturiste caricaturant plus vite que son ombre et entré de ce fait au Guinness des Records) et de la faculté d’art de la région du Banat que nous en deviserons, Marine Nyiri et moi, et  d’autres…

 

Marine Nyiri a remporté le premier prix de l’affiche lors d’un concours péruvien. Je lis aussi d’autres choses plutôt suspectes et interlopes sur sa fiche. Elle a laissé des traces sur le site où on peut la consulter. Elle n’est plus passée depuis cinq jours sur ce site et peut-être pourra-t-on dire si elle s’est connectée depuis tel ou tel cybercafé. Il s’agit de la localiser pour vérifier si elle possède bien tous ses papiers en règle. Non, j’exagère. Peut-être pas. Chef, Nyiri, ce ne serait pas un peu Rrom sur les bords, comme Ciganer ?

 

C’est peut-être parce que je vais être copieusement en retard à la remise du Prix du Pamphlet, à l’hôtel Montalembert, où j’ai été convié par les éditions Anabet, que je sombre dans le caustique premier degré. C’est la quatrième édition. Je me mets en jambes pour la cinquième. Noël Godin, l’entartreur, est dans le jury, comme il sera sans doute de nouveau au salon L’Autre Livre (en fait, furtivement seulement), je vais pouvoir le rattraper si nous nous rations…

Ce qui me fait penser que j’ai lu quelque part que les en cas (les rations) des expulsé·e·s laisseraient à désirer. Mais ce n’est qu’une fausse rumeur. Pour nous, il y aura du Ruinart. Même pour les consoeurs et confrères d’AgoraVox, c’est tout dire. On s’embourgeoise, je trouve. Pas Marine Nyiri qui a choisi d’aller voir les frontières architecturales des banlieues de la seconde ou troisième ceinture parisienne. Et surtout celle dans les têtes. Des têtes qu’elle coupe (en photo) ou découpe. C’est aussi, mais plus subtilement, son pamphlet à elle, peut-être… Là, sur la photo, elle a comme un cadre arrière, des arrières, des antériorités, mais elle semble avoir fait le passage et en être sortie, du cadre.  Et voilà pourquoi la photo non créditée d’elle, élément de celle-ci, a suscité une « Photo du Jour ». Pas de celles qu’on encadre, de préférence…


Post-Scriptum – Marcel Gay, grand reporter de l’Est Républicain, n’a pas obtenu le Prix du Pamphlet des mains de Noël Godin pour son Le Coup de Tarnac (sur l’affaire Julien Coupat, chez Florent Massot éditions) car, dixit le jury, il ne relève pas du genre pamphlétaire. En revanche, Yann Kerninon, pour sa Tentative d’assassinat du bourgeois qui est en moi, chez Maren Sell éditeurs, a été distingué et il a reçu 5 000 euros. Cela tombe bien, il a un film à sortir avec Catherine Kerninon, Sébastien Lecordier et Matthieu Périssé. Je vous en reparlerai, ainsi que du futur livre de Daniel Neveu chez Anabet, et d’autres choses, ici même (enfin, sur C4N, et aussi ailleurs), une autre fois…

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  Post-Scriptum – Ce n’est pas parce que je suis relativement content de mon très facile « Photo maton, photo Besson » que je dois oublier de signaler les sites fréquentés par Marine Nyiri, soit le sien (http://www.marinenyiri.com) et celui du collectif Transit Système… Et puis, au sujet du Prix du Pamphlet, j’ai aussi reçu cela :
La 4e édition du Prix du Pamphlet a récompensé, à l’hôtel Montalembert (Paris, nov. 2009) Yann Kerninon pour son livre Tentative d’assassinat du bourgeois qui est en moi (Maren Sell éditeurs). Dans le genre enquête, on a remarqué Le Coup de Tarnac de Michel Gay…
Voici un lien vers un clip sur la définition du Pamphlet réalisé par Anabet éditions :
[url]http://www.youtube.com/results?search_query=prix+du+pamphlet&search_type=&aq=f [/url]

Auteur/autrice : Jef Tombeur

Longtemps "jack of all trades", toujours grand voyageur. Réside principalement à Paris (Xe), fréquemment ailleurs (à présent, en Europe seulement). A pratiqué le journalisme plus de sept lustres (toutes périodicités, tous postes en presse écrite), la traduction (ang.>fr. ; presse, littérature, docs techs), le transport routier (intl. et France), l'enseignement (typo, PAO, journalisme)... Congru en typo, féru d'orthotypographie. Blague favorite : – et on t'a dit que c'était drôle ? Eh bien, on t'aura menti !