Elles sont sagement alignées, en compagnie d’un « homme » décapité, au sous-sol de l’un des plus anciens centres commerciaux de Timisoara, au Banat roumain. Ces mannequins des années 1950 et 1960 semblent immuables. Pourtant, si elles restent modèles, ces figurines font  désormais figure d’anachronismes.

La photo « du jour » peut être d’hier comme de demain, mais refléter, sinon l’actualité, du moins le présent. Bref, avoir une portée illustrative qui ne soit pas que décorative. Aujourd’hui, il s’agit des mannequins du sous-sol des magasins du centre commercial Materna Modern, à deux pas de l’Opéra, à Timisoara, judet de Timis, province, désormais roumaine, du Banat.

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Le centre commercial Materna Modern n’a pas bénéficié, comme vient de le faire le Bega,l’autre centre marchand historique de la ville de la « Révolution » roumaine de 1989, ou comme l’aéroport Trian Vuia, d’une profonde rénovation. Question commerces, Timisoara est désormais connue pour être la ville de l’un des plus importants Iulius Mall du pays (le centre commercial de Iulius, soit de Jules, prénom de son promoteur). Donc d’Europe car le Iulius Mall n’a guère à rougir de la comparaison avec ses homologues des plus grandes capitales européennes. Comme dans l’Ukraine voisine, les plus grandes marques de luxe (montres Longines, inévitables Rolex), comme du prêt-à-porter chic, sont partout, omniprésentes, en Roumanie. Chaque mois, cependant, les mannequins du centre Materna Modern, qui ne s’adresse pas qu’aux mères de famille (il comporte une grande mercerie, mais aussi un magasin de souvenirs et d’ustensiles, un autre de jouets, et un sous-sol réunissant habillement et chaussures), semblent encore plus figés dans un passé bientôt révolu.

Les instituts de beauté, de bronzage, et les magasins de cosmétiques pullulent désormais dans nombre de villes des pays anciennement communistes. Forte d’une très importante et très réputée facultée de médecine et de pharmacie (qui accueille désormais, en premier cycle, des étudiantes françaises et de futurs carabins qui retourneront excercer en France, comme ceux de Cluj, où l’enseignement est désormais dispensé en français), Timisoara compte aussi de nombreuses cliniques de chirurgie esthétique. Mais il n’est pas sûr que celle ayant permis de rafraîchir certains d’entre les plus anciens de ces mannequins (ceux aux « peaux » défraîchies et aux membres cabossés se trouvent encore dans des localités de moindre importance) puisse voir avec optimisme les débuts de la troisième décennie du second millénaire. Le mannequin masculin, sans tête et donc sans souvenirs, est, lui, beaucoup plus contemporain, actuel, et sans doute durable. Faut-il s’en réjouir ?