la fin du régime de Pétain.


 

La fin de la collaboration approche, on sent de plus en plus la présence de la résistance, elle s’intensifie, les jours du régime de Pétain furent comptés. Les alliés en cette année 1944 débarquèrent en Normandie, et ce fut pour nous tous un jour d’allégresse, la fin d’un cauchemar, de souffrance et de morts qui aura duré quatre années. Ce fut aussi l’année des règlements de comptes, les collaborateurs furent poursuivis jugés et fusillés pour certains. Le maréchal Pétain fut jugé 23 juillet 1945 devant la Haute Cour de justice créée le 18 novembre 1944, condamné à mort à la dégradation nationale et à la confiscation de ses biens, il fut gracié par le général de Gaulle chef du gouvernement provisoire. Ce fut aussi la fin de la persécution des juifs et celle de notre dette d’armistice qui nous grugea de notre richesse, c’est un pays à reconstruire. Le virage de la fin de la révolution nationale fut l’Opération Torch en 1942, et le sabordage de la Flotte Française à Toulon, le 27 novembre 1942, la dissolution de l’Armée d’armistice firent perdre à Pétain ses derniers atouts face aux Allemands avec l’invasion de la zone Sud. La victoire des Alliés en Afrique du Nord par la prise de la Tunisie dernier maillon avant la libération de l’Italie, puis le débarquement en Provence quasiment simultanément avec l’opération Overlord, sonnèrent le glas du régime de Pétain.

En maintenant sa politique de collaboration, Pétain perdit beaucoup de la popularité dont il jouissait depuis 1940. L’effet bouclier par son sacrifice comme il aimait à le dire, faisant le don de sa personne à la France qu’il incarna au début s’estompa, quand à l’hypothèse du double jeu qui consista à prétendre que cela permit de sauver les meubles s’estompa également, tout au moins il fut difficile d’y apporter un crédit, ne connaissant pas ses relations personnelles avec les Allemands. Une chose apparut certaine c’est que, dans bien des domaines la politique répressive qu’il mena contre les juifs et contre la Résistance allèrent bien au delà de ce que demandèrent les Allemands, et même elle la devança pour les juifs. La question fut donc de savoir si malgré tout il protégea les Français ?

On ne pourra jamais y répondre ne sachant pas ce qui serait advenu s’il n’avait pas été là. On ne peut le faire que par rapport aux autres pays qui ont eu une gestion Allemande par suite de leur capitulation. De ce fait, ils ne déchargèrent pas les Allemands de cette contrainte leurs donnant ainsi une charge qu’il leur aurait fallu assurer.

Avec la France fut du velours nous ne tirèrent en fait que peu d’avantages de cette collaboration puisque la zone libre, principal avantage de l’armistice, fut envahie le 11 novembre 1942. Malgré la résistance du général de Lattre de Tassigny commandant de la 16ème division de Montpellier refusant d’obéir aux instructions du général Bridoux ministre de la guerre qui impliqua aux unités de rester dans leur garnison, il prît le maquis pour être finalement arrêté et envoyé à la prison militaire de Toulouse. Pétain sentit que des choses lui échappaient.

Il reçu du Fürher une lettre annonçant que, du fait de l’évolution militaire, l’Allemagne se trouvait dans l’obligation de passer outre les accords de l’armistice. Il protesta contre cette décision incompatible avec les accords d’armistice mais en vain, ne pouvant s’y opposer par la force, notre armée d’armistice n’existait plus.

Une protestation fut rédigée entre 6 h 30 et 9 h 50, au terme d’une réunion orageuse dans le bureau de Pétain où se trouvèrent, entres autres,

Weygand qui fut arrêté entre Vichy et Guéret par les SS sur ordre d’Himmler l’un des officiers les plus puissants de IIIème Reich. Bousquet ayant refusé sèchement, Pétain fut emmené prisonnier en Allemagne et placé en résidence surveillée au château d’Itter dans le Tirol Autrichien lieu de détention de plusieurs personnalités et officiers généraux Français. Renvoyé en France Weygand fut d’abord interné comme prévenu de collaboration au Val-de-Grâce, puis finalement libéré en mai 1946 et dégagé de toute responsabilité en 1948, en bénéficiant d’un non-lieu sur tous les chefs d’accusation par la Haute Cour de Justice. En 1951, il refusera d’être inscrit dans la proposition de loi concernant la promotion de généraux au maréchalat. Jusqu’à son décès, il milita pour la réhabilitation du maréchal Pétain et de sa mémoire. Quand il mourut en 1965, il était le doyen d’élection de l’Académie française.

Auphan fut condamné par contumace par la Haute Cour de Justice le 14 août 1946 aux travaux forcés et à la dégradation nationale à la confiscation de ses biens pour être ensuite réhabilité par le Conseil d’État en 1956,

Menetrel fut le secrétaire particulier docteur et éminence grise et ami de Pétain,

Rochat fut le secrétaire général du Quai d’Orsay condamné à mort par contumace par la Haute Cour de Justice. En mars 1955 de retour en France il se constitua prisonnier, il fut condamné à cinq ans de dégradation nationale dont il fut immédiatement relevé.

Platon vice-amiral fut exécuté en juillet 1944. Alors que celui-ci déclara qu’il valait mieux ne pas se presser de protester, Weygand exaspéré lui lança au visage, «Amiral, c’est effroyable, vous êtes la honte de la France».

Gerd von Rundstedt général feld-maréchal écouta d’un air ennuyé, empocha sans mot dire la protestation que lui tendit Pétain. Il ne s’opposa pas à sa diffusion par radio.

La protestation fut retransmise plusieurs fois dans la matinée. A midi, elle fut assortie d’une nouvelle déclaration de Pétain,

«Français, je croyais avoir vécu les jours les plus sombres de mon existence. La situation d’aujourd’hui me rappelle les mauvais souvenirs de 1940. Je salue avec douleur les militaires, et tous ceux qui tombent pour l’honneur de l’Empire et la sauvegarde de la patrie. Français de la Métropole et de l’Empire, faites confiance à votre Maréchal qui ne pense qu’à la France».

Au début de l’après-midi, les Allemands occupèrent les postes d’émission et interdirent la diffusion des protestations.

Pétain ne fut plus qu’une fiction de souveraineté, tiré de la référence l’histoire en question , l’invasion de la zone libre.

Le problème que l’on doit se poser, Pétain a-t-il toujours été maître de la situation bien qu’en bonne santé à 88 ans, étant entouré de ministres collaborateurs, et de généraux complaisants et pour certains plus collaborateurs que lui ?

Alors que le 6 juin 1944, les troupes Alliées, Royaume-Uni, États-Unis et Canada, lancèrent une gigantesque offensive amphibie sur la région côtière de Normandie. Cette opération d’envergure connue sous le nom d’Opération Overlord et la date sous le nom de D-day (Jour J), fut le débarquement en Normandie qui fera l’objet des prochains articles.

Les derniers jours de l’occupation se précisèrent Paris fut libéré le 24 août 1944 quand les premiers éléments de la 2ème DB entrèrent dans Paris par la porte d’Orléans sous le commandement du général Leclerc, maréchal de France. Pétain ne qui fut plus qu’un simple prisonnier des Allemands songea à se livrer au maquis d’Auvergne du colonel Gaspard, et tenta de déléguer l’amiral Auphan auprès de de Gaulle pour lui transmettre régulièrement le pouvoir sous réserve que le nouveau gouvernement reconnaisse la légitimité de Vichy et de ses actes. «Aucune réponse ne lui fut donnée».

Le 17 août 1944, les Allemands, en la personne de Cecil von Renthe-Fink, ministre délégué, demanda à Pétain de se laisser transférer en zone nord. Celui-ci refusa et demanda une formulation écrite de cette demande, Robert Aron, Grands dossiers de l’histoire contemporaine , op. cit., p. 41-42. Von Renthe-Fink renouvela sa requête par deux fois le 18, puis revint le 19, à 11 h 30, accompagné du général von Neubroon pistolet au point qui arrêta Pétain assis sur son lit à demi vêtu qui leva un œil et lui dit, «Ah c’est vous….», tiré de la référence La bataille de France. Il lui indiqua qu’il avait des «ordres formels de Berlin».

Le texte écrit fut soumis à Pétain, «Le gouvernement du Reich donne instruction d’opérer le transfert du chef de l’État, même contre sa volonté Robert Aron, Grands dossiers de l’histoire contemporaine. Devant le refus renouvelé du maréchal, les Allemands menacèrent de faire intervenir la Wehrmacht pour bombarder la ville de Vichy. Après avoir pris à témoin le ministre de Suisse, Walter Stucki, du chantage dont il fut l’objet, Pétain s’y soumit, et «lorsque à 19 h 30 Renthe-Fink entra dans le bureau de Pétain avec le général von Neubronn, il veillait à la préparation de ses valises et rangea ses papiers». Le lendemain, 20 août 1944, il fut emmené contre son gré par les Allemands à Belfort.

Brouillon de la lettre adressée au Chancelier Hitler pour protester contre son arrestation.

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«Le 8 septembre, après un séjour de plus de deux semaines dans l’est de la France, Pétain et Laval furent installés au château de Sigmaringen, en compagnie des principaux chefs de la collaboration parisienne. Comment se sont-ils retrouvés en Allemagne ? Pourquoi les Allemands ont-ils emmené ces hommes dans leur retraite vers l’est ? Telles sont les premières questions que pose ce transfert. Si Pétain et Laval considérèrent qu’ils furent «enlevés» et emmenés de force, les autres protagonistes firent le voyage de leur plein gré.

Le 17 août 1944 s’opéra de Paris le transfert forcé de Pierre Laval vers l’est. Il arriva dans la capitale le 9 août, alors que les Alliés étaient aux portes du Mans. Son plan, ambitieux et complexe, visa à prendre de Gaulle de vitesse. Cela impliqua l’obtention d’aides très diverses, avoir l’accord d’un assez grand nombre de parlementaires, leur remettre le mandat confié par eux au maréchal le 10 juillet 1940, obtenir le concours d’Édouard Herriot, président de la Chambre en 1940, qui, malade, se trouvait à Maréville, près de Nancy, gagner les Allemands à ce plan, et arracher enfin le consentement des Américains. Vaste programme… En quelques jours, tout capota, les quelques parlementaires rencontrés n’y crurent plus, Herriot, ramené à Paris, fit attendre Laval. Au final, les autorités Allemandes s’opposèrent au projet. Pire, Otto Abetz, le représentant Allemand à Paris, reçut l’ordre, le 16 août, de conduire Pierre Laval et les membres du gouvernement à Belfort. Le départ eu lieu le 17 août au soir, non sans que Laval eut rédigé une lettre pour Abetz qui se terminait sur ces mots, «Je dois donc m’incliner. Mais vous comprendrez que dans ces conditions, je cesse d’exercer mes fonctions de chef de gouvernement».

A leur arrivée à Belfort, et ceci est une chose essentielle pour comprendre l’épisode de Sigmaringen, Pétain et Laval ne se considérèrent plus, le premier comme le chef de l’État, le second comme le chef du gouvernement. A cet égard, ce fut bien la fin du régime de 1940 avant même que le sacre populaire de de Gaulle, une semaine plus tard, n’acheva d’effacer celui-ci».

Autour de Pétain et de Laval, les ministres et hauts fonctionnaires, furent classés en deux catégories : les «actifs» et les «passifs». Ces derniers accompagnèrent Laval dans son refus de continuer à assurer ses prérogatives, Jean Bichelonne, Maurice Gabolde, Paul Marion, Abel Bonnard, Jacques Guérard, Charles Rochat. Ils furent logés au même étage que leur patron. Dans une aile du château, les «actifs», acceptèrent de suivre Fernand de Brinon, le président de la «délégation gouvernementale» imposé par les Allemands. Il y eu là, Marcel Déat, Joseph Darnand, le général Bridoux, Jean Luchaire. Tous furent accompagnés de leurs épouses, hormis Brinon suivit sa secrétaire-maîtresse Simone Mittre. A l’étage inférieur, Otto Abetz logea quelques services diplomatiques et administratifs. On mentionnera la présence bien curieuse, dans cette principauté d’opérette, de deux «ambassades», celles d’Italie et du Japon, établies en ville.

Autour du château, dans Sigmaringen, s’installa, tant bien que mal, toute une colonie Française. Parmi les figures marquantes, l’acteur Le Vigan, le journaliste Lucien Rebatet, Marcel Bucard, fondateur du parti franciste et, bien sûr, Louis-Ferdinand Céline , l’observateur irremplaçable «d’un château l’autre» qui dressa un parallèle de sa vie à Sigmaringen soignant avec dévouement toutes les misères rassemblées là. «Communauté réduite aux acquêts», selon l’expression de Rebatet, la petite société de Sigmaringen se composait de cellules fragmentées, communiquant mal entre elles, voire s’ignoraient totalement.

Ce texte de Jean-Paul Cointet est tiré de Historia, Sigmaringuen, terminus de la collaboration.

Le 23 avril 1945, après avoir obtenu des Allemands qu’ils le conduisirent en Suisse, et des Suisses qu’ils l’acceptèrent sur leur territoire, Pétain demanda à regagner la France. Par l’intermédiaire de l’ambassadeur Karl Burckhardt, le Gouvernement suisse transmit cette requête au général de Gaulle. Le Gouvernement provisoire de la République décida de ne pas s’y opposer. Le 24 avril, les autorités suisses lui firent rejoindre la frontière puis il fut remis aux autorités Françaises le 26 avril. Le général Kœnig fut chargé de le prendre en charge à Vallorbe. Le maréchal fut ensuite interné au fort de Montrouge.

Ainsi commença pour lui jusqu’à sa mort un long calvaire qui se termina à l’Île d’Yeu.

Pierre Laval fuit en Espagne en mai 1945 et fut arrêté à Barcelone le 30 juillet, et remit au gouvernement provisoire présidé par le général de Gaulle.

Laval comparut devant la Haute cour de justice en octobre 1945. Particulièrement inconscient de la gravité des actes qui lui furent reprochés, Laval parlait fréquemment à ses proches du jour où il reprendrait sa carrière politique. Il semblait sincèrement persuadé de pouvoir encore convaincre ses juges du bien-fondé et de la nécessité de sa politique. La haine générale accumulée contre lui pendant l’Occupation éclata au grand jour à son entrée dans le box des accusés, très vite, Laval fut hué et insulté par les jurés, dont plusieurs furent d’anciens collègues au Parlement, qu’il se prit inconsidérément à tutoyer familièrement, il fut de fait empêché de parler et de se défendre ? Il fut exclu de son procès ? La défense refusa de plaider en protestation. La presse résistante elle-même condamna le naufrage pénible du procès. Le général de Gaulle s’interrogea sur l’opportunité ou non de recommencer le procès ? Laval n’en fut pas moins beaucoup trop compromis pour que le verdict de culpabilité fut de toute façon soumit au moindre doute ? Il fut condamné à mort le 9 octobre pour «Haute trahison en ayant aidé l’ennemi et violé la sécurité de l’État».

Il tenta de se suicider le jour de son exécution en avalant une capsule de cyanure.

L’exécution de Pierre Laval.

Compte rendu sténographique, 1946, réalisé sous la direction de Maurice Garçon, les derniers moments de Laval sont décrits en ces termes, «Le 15 octobre, vers 9 h 00 du matin, M. le Procureur Général Mornet, accompagné de M.le Président de la Commission d’Instruction Bouchardon, se présentèrent à la prison de Fresnes dans la cellule du condamné, lui annoncèrent que le moment était venu d’expier. Pierre Laval était couché et parut ne pas entendre. Rapidement on comprit qu’il était sous le coup d’une intoxication et le docteur Paul, médecin légiste, qui était présent, lui fit une piqûre de morphine. On trouva sur les couvertures du lit une ampoule qui avait contenu du poison que le condamné venait d’absorber, ne voulant pas, avait-il écrit, tomber sous des balles Françaises.

Il devint évident au bout de peu de temps que le poison fut éventé. Les médecins firent deux piqûres de camphre, puis procédèrent à un lavage d’estomac. Le condamné rendit la plus grande partie de la substance toxique qu’il avait absorbée et se ranima assez rapidement. Son état s’étant amélioré, il fut décidé, puisqu’il pouvait se tenir debout et marcher, que l’arrêt serait exécuté. Pierre Laval, qui s’était habillé et qui maintenant paraissait rétabli, marcha d’un pas ferme jusqu’à la porte de la prison et monta dans le fourgon qui le conduisit derrière la prison de Fresnes devant une butte qui pendant la guerre avait servi aux Allemands de lieu d’exécution. Quelques minutes suffirent pour le conduire au poteau. Il refusa l’escabeau qu’on lui proposait pour s’asseoir, se laissa lier au poteau et mourut fusillé».

Il fut inhumé dans une fosse commune du cimetière parisien de Thiais puis au cimetière du Montparnasse.

Alors que huit demandes en révision du procès Pétain furent rejetées, aucun défenseur de Laval ne prit la peine, ou le risque, de demander la révision de son procès. Seule sa famille et en particulier son gendre René de Chambrun, mari de sa fille unique Josée et ardent défenseur de sa mémoire, milita pour sa réhabilitation, mais en pure perte.

Jean Jardin, 1904-1976, son directeur de cabinet, qui fut aussi son éminence grise et continua à jouer ce rôle après la guerre auprès d’autres personnalités.

La suite sera 64 sera la libération de la France.

Les références peuvent être consultées sur mon blog au Monde.fr