Une gestation bien éprouvante, après les multiples tensions entre inconditionnels et pourfendeurs du TSL, après le démantèlement du cabinet dit d’unité nationale donnant lieu à l’inversion des tendances dans le nouveau gouvernement. Une gestation de cabinet, forcément douloureuse après un tel traumatisme et qui s’achève par forceps exercé sous haute réanimation artificielle, régionale à connotation syrienne mettant ainsi au jour un nouveau-né dans les pires affres de l’enfantement. Un nouveau-né qui révulse au plus haut point le camp du 14 Mars. Il comporte 18 ministres issus de la majorité et 12 autres gravitant dans le giron Mikati, Sleiman et Joumblatt. Loin d’être une délivrance mettant fin au bras de fer entres les deux camps, le nouveau gouvernement met en exergue les divergences insurmontables entre deux clans têtus s’auto-abritant sous la bannière de la liberté pour les uns, de la sécurité pour les autres.

 Saad Hariri dans une absolue inflexibilité aurait, dans sa virulente levée de boucliers, donné des consignes fermes d’intransigeance avant de prendre la poudre d’escampette pour venir se réfugier à Paris loin du chaos. Loin du chaos où, dit-on d’après les services secrets américains que sa vie serait mise en danger par le voisin Bachar el Assad soucieux de détourner les regards figés sur la Syrie par son éventuel assassinat qui déclencherait aussitôt une guerre civile entre sunnites et chiites Libanais. D’ailleurs depuis la formation controversée du nouveau cabinet la semaine dernière, le premier ministre sortant n’a pas émis le moindre commentaire.

 

 Puis conformément à ses désideratas, toute main tendue par le camp adverse sera rejetée sous prétexte de son prétendu adoubement par Damas et Téhéran. Le président aura beau certifier le label pure souche reniant le caractère hybride qui lui est imputé mais ses propos ne feront que susciter le tollé chez une opposition ultra-indignée. Et au Hezbollah de se surpasser faisant profil bas, d’afficher un leitmotiv reposant sur l’unité, le dialogue, l’entente, de s’ouvrir à tous, kataëb, FL, de faire don de deux portefeuilles aux sunnites. Rien n’y fait, l’opposition ne décolère pas. La pilule ne passe pas.

 

 Tensions attisées au sommet ne tardent pas à s’exprimer sur le terrain vendredi, faisant se confronter sunnites et alouites à Tripoli, ville du premier ministre à l’heure où devait avoir lieu une manifestation de soutien au régime baassiste et des festivités sous l’égide de Nagib Mikati. Tripoli, terreau idéal pour pièges confessionnels, sécuritaires donc coutumière des exacerbations, perdra cette fois-ci sept malheureuses personnes sans compter les nombreux blessés.

 Depuis le temps que la scène politique de ce pays est violemment secouée par des turbulences jetant sa population dans l’exil, depuis le temps que les chantres de la démocratie s’offusquent face à toute alternance, depuis le temps que chemises noires et orange ne parviennent pas à apaiser les peurs, depuis le temps que les renversements d’alliance sont des plus hallucinantes, les incompétents perdurent laissant ce si beau pays au bord de l’abîme.
 A force de s’enfermer dans la spirale de la violence, ne s’arc-boute t-on pas inconsciemment dans un sommeil dogmatique pétri de certitudes dans lequel nous aveuglerait pernicieusement l’intolérance pour nous rendre fossoyeurs du Liban ? Attitude périlleuse, suicidaire qui consiste à n’accepter que des situations répondant à nos propres exigences et dénigrer tout ce qui bafoue nos propres repères !  Aujourd’hui ne serait-il pas impérieux de gérer cette crise provisoire, tout juste le temps de l’alternance, tout juste le temps de ces cinq malheureux ministres du Hezb du mieux possible plutôt que de nous remettre plus de feu aux poudres ?  Le premier ministre devrait s’exprimer sous peu et très brièvement  pour tenter d’atténuer l’opprobre que même l’opinion internationale a jeté sur ce boiteux cabinet…
Qu’elle est fabuleuse la loi de 1905 séparant l’église de l’Etat se dit-on, surtout quand on pense à la part de responsabilité du confessionnalisme dans cette gangrène. Pour le moment on ne peut se payer ce grand luxe, on y est bien trop loin tant sont nombreuses les étapes à franchir et complexes les shémas à déconstruire, à abolir. Quant à la foi, elle n’a rien à craindre.  Une petite part irréductible en nous sur laquelle personne n’a de prise !