Par quel côté regarde-t- on ce qu’on est, ce qu’on a été et ce qu’on a envie d’être ?
Chacun détient la propre lorgnette de sa conscience, ce qui donne une large échelle de ses niveaux. Ce que sont les uns ne sont pas les autres, et ce malgré l’empêchement que l’on se fait à soi même de vouloir juger, des pensées sont tout de même émises, issues forcément d’une morale, d’un ensemble de règles.
La mienne propre, la sienne propre, la collective, la religieuse, la politique. Cette morale qui met des garde-fous plus ou moins malléables selon que l’on réfléchisse puissamment à la création de notre propre morale, nos propres gardes fous, individuels et inaliénables. C’est ce qui fait la force de ceux qui ont instauré en eux leur propre morale, envers et contre tout et tous, pour le meilleur ou pour le pire, encore qu’il existe toute une nuance de gris entre le pire et le meilleur. C’est dans ces gris que se confondent les anges et les démons, pour danser mais sur quel pied, pour chanter mais à quel prix. Pour oublier la souffrance faite à l’autre dans des actes de pseudo rédemption comme de prendre un bus pour semer la bonne parole ou de se (re)mettre en lumière après trop de drames et de larmes désormais inscrits dans les vies présentes et à venir. Les mythes fondateurs sont remplis de violence et de mort, de souffrances et d’inimaginables, et nous sommes imprégnés de cette mémoire collective qui perdure dans les actes quotidiens et dans la façon dont se mène le monde.
Comment percevoir l’autre, à travers ses propres failles disent les uns, à travers ses actes disent les autres, à travers des retours de vie significatifs. De quelle partie de la conscience est issue la pensée que l’on a peut être nuit à l’autre, en dehors de toute idée de liberté qui finit là où commence celle de l’autre, portes ouvertes à de vieilles excuses. Partie consciente de sa culpabilité. La liberté est morale parce qu’elle s’appuie sur nos propres gardes fous intimes. Nous sommes les seules à pouvoir juger de nous-mêmes mais dans le regard de l’autre, se trouvent également des clefs de compréhension à nous-mêmes, des limites de cœur et d’âme, car la conscience ne peut se situer que là. Ce regard se retrouve chaque matin devant la glace, dans ces questionnements sur soi même. Se raser chaque matin en pouvant se regarder dans les yeux, regard rétroactif sur les regards que l’on a croisé, les gestes que l’on a eu, les mots que l’on a dit, les actes que l’on a fait ou pas, les mots que l’on a pas dit ou ceux qu’on n’a pas reçus. Chacun ses réponses. Chacun ses gardes fous. Chacun en son âme et conscience.
Cette introspection ouvre des portes à la compréhension de l’autre dans tout ce qu’elle a de crue, dans le sens brutal, violent, libre. Si l’autre fait comme bon lui semble et si nous essayons de ne pas porter de jugements, alors cette liberté ne devient elle pas la source de tous les choix mortels et inimaginables auxquels nous ne pouvons pas adhérer et qui pourtant contient le germe de la liberté individuelle et inaliénable qui ouvre pour le coup les portes à l’inacceptable. Le mal que l’on a fait, que l’on fait et que l’on fera reste pardonnable si la demande de pardon, à soi-même et aux autres, existe, les deux cas ne se remplaçant pas l’un l’autre. La demande de pardon est cette étincelle de conscience qui survit même en ceux qui n’ont semé que la violence. Pour passer à autre chose. Et pourtant la violence persiste à travers ses échos. C’est par un travail personnel sur soi-même que l’humanité peut avancer. L’embryon de culpabilité et donc de conscience, se travaille dans le temps et chaque jour. Les mythes évoluent avec la conscience.