New York, dans l’oeil de Leiter

Admirateur de l'oeuvre de Cartier Bresson, il est à New York ce que Doisneau est à Paris. Saul Leiter fait partie des grands. Pour la première fois en France, Saul Leiter expose à Paris 100 photographies couleur et noir & blanc.

Photographe, témoin du New York des années 50, Saul Leiter déclarait récemment, à l’occasion de la première exposition personnelle qui lui est consacrée : "Je suis très paresseux, et j'habite dans une ville, alors je photographie ce que je vois dans la ville". En figeant des scènes urbaines de son époque, avec un cadrage et un point de vue bien à lui, il propose un portrait très personnel du New York qu’il connaît…. Sa Cité à lui 😉 Ses clichés se contemplent à deux niveaux. On a d’abord envie de faire nez à nez avec la photographie, pour en apprécier la figuration elle-même (les personnages, les activités auxquelles ils se livrent, leur silhouette, leur comportement, leur expression). […/…]

 

{mosimage}

Puis l’on prend du recul – au sens propre comme au sens figuré – pour la découvrir sous l’angle de la pure beauté…Saul Leiter a beaucoup utilisé la transparence et les reflets des vitres de la ville, ce qui donne lieu à des images troubles…et troublantes. Chacun de ses clichés est témoin d’une réalité. Celle de la vieille femme, seule, attendant le métro « Subway lady ». Celle de l’ouvrier travaillant sous la neige « Snow ». Celle de l’homme jeune et dynamique qui porte élégamment un chapeau melon « Hats »…

 

Ce panel d’images d’époque témoigne du New York tel qu’il apparaissait dans les yeux de Saul Leiter. N’oublions pas qu’en photographie, c’est le cadrage qui fait l’image. Saul Leiter, tout comme Cartier Bresson son mentor, est maître en la matière. Il parvient à mettre de l'âme dans chacune de ses réalisations.

 

Parlons désormais du photographe en tant qu’homme. Saul Leiter est un artiste discret, né en 1927 et encore vivant aujourd’hui. Enfant, il rêve d’être peintre, malgré les réticences de son père rabbin, qui prévoyait pour lui la même destinée. Après des études de théologie, il part donc pour New York, avec en tête le souhait intime d’accomplir enfin son rêve.La-bas, il se lie avec les peintres expressionnistes abstraits, dont Richard Pousette-Dart, qui deviendra son « père artistique ». Mais très vite, il délaisse la peinture pour la photographie, dont il tombe amoureux lors de l’exposition d’Henry Cartier Bresson au MoMA (Musée d’Art Moderne de New York) en 1947. Il décide alors de devenir photographe, et vagabonde dans les rues de New York avec son Leica. En 1948, il abandonne le noir et blanc au profit du film 35mm couleur. Bien qu’il refuse d’appartenir à tout courant artistique, Saul Leiter a été qualifié par la profession de « précurseur de la Street Photography en couleurs ».

A l’époque, ses photos furent célébrées au MoMA de 1953 à 1957 avant de tomber dans l’oubli pendant un demi-siècle. Il poursuivra donc en parallèle une carrière dans la mode (pour Vogue, Harper's Bazaar) et la Publicité. Il sera photographe de mode réputé pendant 20 ans.Après toutes ces années d’anonymat, la fondation HCB donne la possibilité au public français de découvrir –ou redécouvrir- l’œuvre de Saul Leiter, artiste brillant qui aime à dire « je ne peux admirer trop mon travail car je dois garder un peu d’admiration pour le travail des autres ».

Voilà un bonne leçon de modestie à retenir, et à appliquer…

 

Du 17 janvier au 13 avril 2008 – Fondation Henry Cartier Bresson 2 impasse Lebouis 75014 PARIS.

M° Louis Blanc

 

 

A propos de la Fondation HCB : Reconnue d’utilité publique par un décret du 11 mars 2002 , la fondation a ouvert ses portes en mai 2003, aux artistes peintres, sculpteurs, dessinateurs ou cinéastes, photographes anciens, modernes et contemporains, dont le travail s’inscrit dans l’esprit Cartier Bresson. Au rythme de 3 expositions par an, l’espace a pour vocation d’ entretenir le patrimoine artistique de son fondateur, et de présenter des œuvres de qualité.Tous les deux ans, la Fondation HBC décerne le prix Cartier-Bresson, une bourse de 30 000 euros destinée à soutenir le projet d’un photographe désigné par une institution. Dans les 18 mois suivants sa nomination par un jury international, le projet du lauréat est exposé.La fondation HCB organise par ailleurs des conversations bimestrielles autour de la photographie-menées par Stam Stoudzé- spécialiste de l’image.