En 2000, le Liban a signé la Convention qui interdit la torture, les traitements et punitions cruels, inhumains et dégradants. Malgré cette signature, persistent les déplorables conditions de détention sévissant dans les milieux carcéraux où les droits les plus élémentaires de l’Homme sont royalement bafoués, dossiers rélégués dans des fonds de tiroirs ! "La pègre" de la société traitée sans le moindre égard dans des prisons surpeuplées où croupissent, condamnés à mort, trafiquants de drogue, malades mentaux, délinquants et autres dans une bien triste infortune. 

Roumieh le plus grand établissement pénitentiaire du pays situé dans la banlieue nord de Beyrouth abrite à lui seul 65% de la population carcérale. Conçu pour recruter 1500 détenus, il en accueille actuellement  4000 avec 200 gardiens qui doivent vivre dans une bien détestable promiscuité. Mauvaises conditions de détention, aveux extorqués sous la pression, lenteur sinistre des jugements sans oublier la différence de traitement entre les prisonniers liée à la corruption, bakhchich oblige, des éléments qui représentent à eux seuls, les ingrédients nécessaires et suffisants pour faire trembler les murs décolorés de l’enfermement ! 

 Et malgré des mutineries successives destinées à éveiller la conscience  des politiques pour réagir en faveur d’une amélioration de leur prise en charge, aucun geste ne survient laissant supposer que leur misère ne semble pas incommoder grand monde et faisant accroître désespérément la rage de ces malheureux. 

Comme inspiré du vent qui souffle dans les parages, un vent de folie ravageur a grondé ces derniers jours en particulier dans la nuit de mardi à mercredi dans la prison de Roumieh où des détenus ont réussi à prendre le contrôle de l’établissement après avoir percé des voies de communication entre les divers bâtiments, pris en otages des membres des FSI (force sécurité Intérieure) venus réparer les dégâts occasionnés par la précédente mutinerie. Aussi pour mieux se faire entendre et laisser culminer le chaos, après s’être servis dans la cuisine, ils se sont concoctés des coktails Molotov et ont mis le feu en la demeure ! 

L’extinction de l’incendie s’est avérée impossible par la Défense civile qui s’est vue relayée par hélicoptères de l’armée pour enrayer cette machiavélique tragédie. Et ce n’est qu’au terme d’une vaste opération lancée par les FSI que sera maîtrisée cette gigantesque mutinerie menée par environ le quart des détenus laissant les autres sous l’emprise de la terreur. Il y’aura deux morts et plusieurs blessés.

A l’extérieur de ce lieu d’enfermement aussi, régnait un mouvement de sourde colère mené par des femmes démunies. Mères, épouses, soeurs, amies ou proches, elles sont venues de partout parfois même accompagnées d’enfants en bas âge en signe de protestations contre le décret consécutif à la mutinerie leur interdisant les visites à leur bien aimé à la dignité confisquée. Sans nulle retenue, elles se sont livrées à des jets de pierre sur les forces de l’ordre, ont bloqué la rue, ont hurlé leur désespoir. Désespoir face à des revendications avortées. Hier, c’est devant le palais de Justice de Beyrouth, qu’elles ont poursuivi leur mouvement de contestation.

Des prisonniers qui demandent l’amnistie laquelle ne peut se faire que dans le cadre de vote d’une loi or le parlement est paralysé en l’abscence de la formation du gouvernement. On dit qu’aux causes sociales, humanitaires de l’enfer vécu par ces marginaux s’ajoutent des considérations politiques en rapport avec la formation du gouvernement et que l’on aurait incité les actes de vandalisme en prison…  Le ministre de l’Intérieur Ziyad Baroud a exhorté les politiciens "d’arrêter les surenchères politiques contre le ministère de l’Intérieur" et "d’utiliser les mutineries comme vecteurs de messages politiques". Quelle est donc cette force souterraine qui voudrait la chute de ce ministre ?

 

En attendant, des incitations financières offertes aux magistrats  afin d’accélerer les jugements, la construction de salles d’audience, la lutte contre la corruption, sont des mesures envisagées afin de calmer les vives tensions. régnant au sein des prisons…