Après un début raté, le Quinze de France se retrouve au bord du trou noir plus vite que prévu.
Cette accélération dans l’hyper espace ovale doit alimenter la volonté d’aller défaire l’adversaire plutôt que de se lamenter. Fi donc des donneurs de leçons et des pessimistes.
Voyons plutôt quels sont les atouts qui doivent permettre aux Bleus de vaincre.
D’abord, il y a l’aîné, le Bernard, qui sait comment mener une équipe à la victoire. Son opinion : « Je n’ai jamais pensé qu’en quart de finale il y a un favori. C’est toujours du 50/50… » est une parole de sage et de meneur d’hommes. L’entraîneur, pièce à conviction numéro un.
Ensuite, parlons muscles. « On ne va pas y aller la tête dans les épaules » ajoute Bernard Laporte. Le défi physique attend les bleus, ils sauront y répondre. Point barre. La force (qui est en eux, plus qu’avec eux), pièce à conviction numéro deux.
Moins cartésien et plus conquérant
La rage de vaincre est l’un des éléments majeurs du sport de haut niveau. Elle bouscule les meilleurs, elle décuple les forces, elle renverse la vapeur, elle mène à l’état de grâce. Ce bouillonnement, s’il est bien exploité saura faire douter le Black. Le défaitisme est un sentiment qui naît de la logique des faits. Etre moins cartésien et plus conquérant, voilà le secret de la réussite. La volonté de vaincre qui ne fait nullement défaut, pièce à conviction numéro 3.
La fierté ne niche pas loin de là. Il ne s’agit pas seulement de panser la blessure d’amour-propre du match d’ouverture. Il faut hisser les couleurs intérieures pour bouffer du Néo-Zélandais. Et peut-on être plus fier qu’un Français ? Plus fier qu’un coq ? La fierté, pas la fierté à deux balles, la vraie, celle qui consiste à transformer ses défauts en qualités, pièce à conviction numéro quatre.
Le public, on le sait est un atout important dans un match. Ne doutons pas un seul instant qu’une grande majorité de ce public soutiendra les bleus, même au Pays de Galles, même à Cardiff. Les spectateurs auront à cœur de soutenir les Français. Pièce à conviction numéro cinq : le public.
Notre soutien, sans réfléchir et sans faille
L’opinion publique. Oui, le soutien populaire, la ferveur apparue depuis le début de ce mondial, font que nos gars ne sont pas seuls. Cette masse de supporters devient quand c’est nécessaire l’homme de plus dans la mêlée, l’ailier supplémentaire pour le débordement, le buteur magique pour les pénalités. Nous n’avons plus ni patience, ni longueur de temps pour sortir de la nasse sudiste. Il ne s’agit pas d’un quelconque pressing, les calculs ne servent plus à rien et personne n’ira en prison en cas de défaite. Notre soutien, sans réfléchir et sans faille, pièce à conviction numéro six.
Septième pièce à conviction, le French flair, cette inspiration glorieuse tant redoutée par les adversaires. Il est toujours bon d’avoir un truc en réserve dans sa manche, une botte secrète (surtout en rugby). Bien entendu, l’essence même de cette arme fait qu’elle est parfois difficile à retrouver dans l’arsenal. On ne comptera donc pas seulement sur elle, tout en sachant que le camp d’en face, quel qu’il soit, se demande toujours si le coup de génie tombera ou non sur lui.
Endormir l’adversaire est plus facile quand il s’endort lui-même
La confiance en soi et le statut de favori peuvent endormir celui qui en est nanti. Soyons lucides, les All Blacks sont loin de broyer du noir et ils ont de quoi dormir tranquille pour le moment : leurs dernières (et écrasantes) victoires contre l’équipe de France sont un bon somnifère. Endormir l’adversaire est plus facile quand il s’endort lui-même. La trop grande estime des Blacks en eux-mêmes, voilà notre pièce à conviction numéro huit.
Et les autres équipes ? On n’y pense pas assez. L’Australie, l’Afrique du Sud, l’Angleterre, les Fidji, l’Ecosse et même l’Argentine sont pour l’instant des alliés de la France. En effet, une victoire du quinze français leur ôterait un sacré poids sur l’estomac. Ce soutien moral tacite et tactique qui ne durera pas plus d’une semaine, possède des vertus bienfaisantes. Il est en l’occurrence la pièce à conviction numéro neuf.
Des points d’appuis pour les crampons des joueurs français
Les éléments suivants sont plus aléatoires ou subjectifs mais ne peuvent être négligés : la chance (on peut toujours compter sur elle) et le fait de se dire que le pire est passé (la défaite en ouverture). Nous rangerons ces petites pièces à conviction dans la boîte numéro dix, étiquetée « superstitions », dans laquelle se trouvent déjà grigris et autres amulettes…
L’incertitude du résultat à ce niveau donne également des raisons d’espérer. Les chutes des favoris dans les grandes compétitions ne sont pas rares. Ce fut le cas du Brésil face à la France lors du dernier mondial de football. On peut aussi rappeler l’éjection des Blacks par les bleus lors du Mondial de rugby de 1999. Voilà autant de points d’appuis pour les crampons des joueurs français et autant de savons sous les pieds adverses…. Il ne s'agit pas de comparer la rencontre à venir au combat entre David et Goliath, mais on se souvient de certains résultats. Les enseignements de l’histoire, pièce numéro onze.
Intelligence, lucidité, solidarité et trophée
Pourquoi ne pas retenir aussi comme bonnes raisons d’y croire, l’intelligence, la lucidité et la solidarité ? L’intelligence d’abord de ne pas répondre aux provocations. Ensuite la lucidité de ne pas craindre les Néo-Zélandais plus qu’il ne faut. Enfin, la solidarité qui a soudé les joueurs jusqu’à présent continuera d’opérer. Les Français qui fouleront la pelouse de Cardiff seront bien nantis de ces trois qualités essentielles que l’on versera au dossier avec les numéros douze, treize et quatorze.
Soyons clairs, ce n’est pas de battre l’équipe néo-zélandaise qui compte, c’est d’emporter le trophée William Ellis et d’inscrire le mot France définitivement sur les tablettes. C’est de faire partie de ceux qui pourront dire l’avoir vécu. C’est de ressentir le bonheur de la victoire finale que les sportifs nous apportent. Stratégie, gestion des matches et des joueurs, beaux gestes, craintes, polémiques et autres détails s’estompent et s’effacent parfois. Seule la victoire reste. C’est cet état d’esprit qui habite les joueurs. Sinon pourquoi y être ? Le trophée du Mondial, quinzième et dernière pièce à conviction. La plus importante.
Retrouvez cet article dans le dossier consacré au Mondial de Rugby du site evenemonde.info