Alors que le tourbillon devient de plus en plus subtil, on a de plus en plus de mal à s’y laisser entraîner

Extrait tiré du film “Waking Life” de 2001.

 

 

C’est exactement ce que je ressens aujourd’hui du monde, que nous – humains- avons construit, de notre apparition jusqu’à aujourd’hui.

J’avais toujours pensé que l’actualité (et les médias en général) stigmatisait sans cesse les mauvaises nouvelles au détriment des bonnes, qui doivent tout de même exister un jour quelque part.

Mais les nouvelles stratégies de communication, les nouvelles technologies et techniques audiovisuelles, les multiplications des possibles avec l’utilisation gargantuesque des satellites, des réseaux, des ondes,créent une sorte “de paradoxe subtil” (pour reprendre la phrase de l’extrait de Waking Life) entre la réalité et le virtuel.

Disons qu’un fait est un fait. Prenons l’exemple, d’une catastrophe naturelle. Médiatiquement parlant, nous serons au courant de ce fait, de façon objective.  Disons que cela, soit inscrit dans la réalité.

Le paradoxe apparaît alors, lorsque que l’ homme, manipule à sa guise ces images, les commentaires qui l’accompagnent, ou bien encore la fréquence à laquelle ils seront diffusés (par exemple, comme dit plus haut) au détriment d’une éventuelle “bonne” nouvelle majeure.

C’est une sorte de basculement de la réalité au virtuel. En soi, cela n’a rien d’alarmant, l’info circule, et c’est tant mieux.

Mais comme rien n’est simple, la manière dont on utilise ces modes de diffusion peut en effet changer la donne. Et l’on est alors  en droit de se demander “comment garder un libre arbitre à cette vitesse?”, à cette profusion.

Un scoop par ici, un scandale par là… Une guerre au Sud, une catastrophe au nord….Un attentat meurtrier, une prise d’otages… tout cela étant diffusé en boucle, usant sons, images, couleurs, utilisant nos émotions, notre perception subjective, jouant avec la corde sensible de la réalité et du virtuel, nous guidant vers un chemin, faisant le tour du monde, en toutes langues et à toutes heures. Une véritable globalisation mondiale de l’information. Vous ne me croyez pas? Essayer de faire un tour de toutes les grandes chaînes du monde, soit-disant référantes de l’infos, détentrices d’une quasi immunité “de paroles et de pensées”, de plus en plus impossible à remettre en question. BBC, CNN, Al Jazzerra, BFM Tv, Euronews, etc., etc….

Et l’écran nous parle. L’écran de notre télé, l’écran de notre téléphone, l’écran de notre vie.

Entre nous, nous discutons, nous parlons, nous échangeons, nous débattons, de ce qui se passe ici ou là. Tout cela avec une sorte de vide qui nous entoure, car ce que pourquoi nous nous essoufflons aujourd’hui, sera cause perdue demain, car ce pourquoi nous nous révoltons aujourd’hui, sera obsolète demain.

On s’est insurgé contre la montée du FN fin des des années 80, nous avons pensé à la guerre en Irak pendant près de 2 ans, nous avons polémiqué sur les attentats du 11 septembre 2001, nous avons spéculé sur les agissements douteux de certains gouvernements. Et maintenant?

La montée du FN est toujours d’actualité, les attentats n’ont toujours pas vraiment trouvé de raisons d’être, le doute plane toujours sur les agissements douteux de certains gouvernements…

Le cercle vicieux continu, enchaînant à une vitesse fulgurante de nouveaux drames, de nouvelles interprétations.

L’Homme du 21ème siècle est le premier de toute les générations précédentes à être connecté quasiment 24h/24 à l’actualité mondiale. A flirter dangereusement entre réalité et virtuel.

Nous devenons des acteurs-spectateurs, paralysé devant tant de données.

Quand est-il de notre esprit? de son bien-être? Car il faut reconnaître que le sentiment de noirceur et de fatalisme que nous transmet l’actualité quotidienne, procure une certaine sorte de stress, plus ou moins perceptible.

Née alors cette espèce de sentiment d’empathie qui peut parfois nous toucher lorsque l’on voit la souffrance des autres (prenons l’exemple récent de Fukushima), et qui, inversement peut se transformer en ressenti bizarre, sentiment complètement étranger, ayant du mal à saisir la distance réelle et concrète qui nous sépare de l’évènement en question (en reprenant l’exemple, nous avons tous été mis au courant qu’un certain nuage radioactif passerait sur nos têtes UN certain mercredi, et repartirait un jeudi. Incroyable non? L’exemple est d’autant plus frappant, que le nuage radioactif est totalement invisible à l’oeil nu).

Finalement l’usage de ces pratiques médiatiques est en train de modeler notre façon de réceptionner les données, de les traiter, de les assimiler et de les transmettre. Le cerveau est ordinateur (même si c’est plutôt l’ordinateur qui est calqué sur le fonctionnement du cerveau humain) qui, à force de temps et de répétions, peut être paramétrer à son insu.

 

Ce regard que j’ai voulu porter sur ce phénomène de société est un simple constat personnel, qui me donne envie de conclure en vous demandant de réfléchir à votre propre perception de l’actualité, à votre implication, au recul que vous prenez ou pas sur les véracités qu’on vous propose.

Garder une part de “doute” est essentiel à notre équilibre et à notre liberté.
“Il n’y a que les fols certains et résolus”, écrivait Montaigne (Essais, I, 26). C’est qu’en effet l’absence de doute, l’absence de questionnement reflète un mauvais usage de la raison. Ainsi, le dogmatique s’accroche à une vérité, mais renonce du coup à chercher plus loin. Mais ce doute ne doit pas être une simple étape provisoire (Descartes). Il ne doit pas non plus coïncider avec l’idée que rien ne peut être connu, qu’il n’y a pas de vérité, et qu’il ne vaut donc pas la peine de chercher. Au contraire de cette attitude paresseuse, le doute doit être un travail permanent de l’esprit pour ne pas se reposer sur des idées tenues pour acquises une fois pour toutes. ” Source