Une offre qui ne peut s’aligner sur sa demande qu’à trop longue échéance, surtout lorsqu’on ne mange pas à sa faim. L’écart entre offres et demandes de matières premières en se creusant de nouveau a montré, une nouvelle fois, toute la précarité des populations et des économies les plus pauvres. Mais si le coup de chaud de 2008 avait rapidement trouvé solution, bien malgré lui, celui de 2011 sera, malheureusement, bien plus grave.

 

Sur la seule période de ces six derniers mois les chiffres sont éloquents. Les prix des matières premières repartent à la hausse, comme il y a 3 ans, mais avec ; cette fois-ci, le spectre d’une bien plus grande gravité, eu égard au regain de l’activité économique. En effet sur ces six derniers mois les prix du blé ont grimpé de 30%, ceux du café de 47, ceux du soja de presque 40 et ceux du sucre d’un peu plus de 33%.

Simple retour à la case 2008, année qui, elle aussi, avait enregistré des hausses similaires ? En aucun cas pour la simple raison que les prix des matières premières avaient fini par redescendre par la suite du fait des difficultés économiques mondiales occasionnant un ralentissement de l’activité économique. Car là est le paradoxe aujourd’hui : le marché des matières premières est soumis à une telle tension concurrentielle et donc haussière qu’il ne peut trouver à se réguler à la baisse qu’en réponse à un ralentissement économique. Entre se développer et nourrir sa population certains pays auront à choisir.

 

Un phénomène général en voie d’accélération

Et encore le choix pourrait encore trouver à se restreindre, car toutes les matières premières sont frappées par la hausse. Les matières premières agricoles (Sucre, maïs, oignons, céréales divers), les matières premières  de type fossile (on pense bien sur au pétrole dont l’élévation des prix peut impacter sur les prix d’autres sources d’énergie) ; mais aussi sur les métaux (cuivre, étain…). Le cercle semble si vicieux qu’il est évident que toute hausse d’un coté en implique d’autres concernant des produits qui ne sont pas nécessairement en position de pénurie par rapport à ce qu’aurait du être leurs demandes.

Car si de nouveau les prix s’emballent c’est bien en réponse à un déséquilibre entre offre et demande de plus en plus évident, et qui allant en s’amplifiant semble presque de nature structurelle. A offres en matières premières difficilement extensibles et à demandes de celles-ci appelées à croitre correspondra nécessairement ce phénomène d’augmentation des prix.

Mais la situation se complexifie par un autre facteur : le fait que certaines matières premières, essentiellement celles de nature agricole, peuvent être soumises à des phénomènes climatiques qui réduisent les récoltes. C’est ainsi que peut s’expliquer les augmentations du prix du blé dépendant des inondations australiennes ou des grands incendies russes. Pire le riz, aliment de base pour trois milliards d’êtres humains, qui jusqu’alors semblait épargné, connait, à son tour des difficultés. Sur le seul mois de janvier ses prix ont augmenté de près de 10%.

Bien évidemment à ce versant correspondront toutes les implications géopolitiques qu’occasionnerait la multiplication d’émeutes de la faim. Les populations des pays pauvres devant consacrer une part toujours plus importante de leur budget à l’alimentation sont les premières victimes de ces hausses. Et encore est-ce vrai pour celles trouvant de quoi manger. Les dernières révoltes arabes étant, par exemple, pour certains observateurs imputables, en patrie, à ce type de mécanisme.

Un autre facteur est à prendre en compte : les phénomènes spéculatifs dont la rapacité peut, en partie, servir à expliquer la rapidité avec laquelle les hausses se concrétisent. C’est d’ailleurs, aussi, en cela qu’il est possible de parler de hausses renvoyant à des explications d’ordre structurel. Car si les matières premières peuvent servir de base spéculative c’est aussi parce que beaucoup de gérants de fonds communs de placement investissent dans ces produits afin de s’assurer des marges de rentabilité introuvables ailleurs. Car le marché des matières premières, dérégulé depuis 2000 est un terrain propice à l’anticipation et à la prévision de gains substantiels.

Tacher de contrer ces habitudes spéculatives sur un marché essentiel au développement humain et économique à l’échelle mondiale, c’est fort de cet objectif que le G20 tentera de proposer des solutions à ce problème. Lors de sa conférence de presse du 24 janvier 2011 Nicolas Sarkozy, en charge de  la présidence et de l’organisation du sommet, a déjà avancé quelques pistes de réflexion.

http://www.lefigaro.fr/matieres-premieres/2010/12/03/04012-20101203ARTFIG00689-flambee-sur-les-marches-des-matieres-premieres.php

http://www.lalibre.be/economie/libre-entreprise/article/640651/matieres-premieres-les-prix-flambent.html

http://www.lesechos.fr/supplement20101130/sup_economie_de_la_mer/020932083266-les-prix-des-matieres-premieres-flambent.htm

http://www.france-info.com/chroniques-le-plus-france-info-2011-02-18-matieres-premieres-agricoles-une-flambee-jamais-vue-515812-81-184.html

Grégory VUIBOUT