Michèle Alliot-Marie fait son retour, avec un comité Théodule sur la solitude. Celle de la coureuse de fond qui veut remonter dans le peloton, celle qu’il faut faire cesser d’exister, pour ne pas contredire la chanson de Gilbert Bécaud, et surtout pour ne pas se retrouver ermite en Dordogne ou dans les Landes…

MAM, contrairement à Luc Ferry, n’aura pas à sécher des cours : docteur en droit et docteur d’État en sciences politiques, elle n’a nulle envie d’aller se faire chahuter par des étudiantes et des étudiants… C’est donc, pour rompre son isolement politique, dans une splendide retraite tactique, qu’elle va plancher sur… la solitude. Le Monde nous l’apprend : l’UMP va lui confier la lourde charge de cogiter sur « la solitude et le repli sur soi ». Entourée, comme Christine Boutin, d’une équipe de conseillers rémunérés (Boutin réfléchit encore bénévolement, ayant renoncé à 9 500 euros mensuels, sur « les conséquences sociales de la mondialisation », mais son équipe reste rétribuée), voire dotée de moyens (chauffeur, secrétariat) pour aller partager le kil de rouge avec le SDF réfugié dans sa cabane au fond des bois ?

Pourtant, pourtant, depuis Gibert Bécaud, la solitude, « ça n’existe pas… ».

Chez moi il n’y a plus que moi

Et pourtant ça ne me fait pas peur

La radio, la télé sont là

Pour me donner le temps et l’heure

J’ai ma chaise au Café du Nord

J’ai mes compagnons de flipper

Et quand il fait trop froid dehors

Je vais chez les petites sœurs des cœurs…

Tiens, justement, les billards électriques, il faudrait penser, MAM, à les subventionner. Ils rapportent davantage que les stades de football, facilitent autant et mieux la communication, mais présentent bien sûr un inconvénient : difficiles à inaugurer, avec « manteaux ou rubans en sautoir », secrétaires d’États et conseil municipal à la traîne ministérielle, voire ecclésiastiques en « chasuble d’or ».

Quant aux petites sœurs de cœurs, MAM, il faudra en parler avec votre ancienne collègue, Roselyne Bachelot, qui veut pénaliser leurs ouailles en leur faisant consentir à l’État un autre denier du culte. Les solidarités et la cohésion sociale (intitulé du portefeuille de la ministre Bachelot) s’alimenteront d’amendes, ou alors, comme l’avait suggéré Chantal Brunel, de taxes perçues dans des « maisons ouvertes ». Ouvertes aux esseulés rabattus par MAM ?

Solidaire, MAM l’est jusqu’au bout, avec Nicolas Sarkozy, avec l’UMP. Son éviction du gouvernement pour cause de retraite spirituelle tunisienne ne lui a pas laissé la moindre rancœur. Elle veut servir. Et déjà, paraît-il, relancer « l’ascenseur social ».

Pas vraiment celui qui ne dessert plus les huit étages des tours des immeubles à loyer modéré de Nanterre ou de la Courneuve, mais celui qui, avec l’aide de grooms, fait grimper les filles et fils de notables au Parlement, voire dans des ministères, et accessoirement peut-être à la présidence de l’EPAD de La Défense-Suresnes-Levallois (qui a d’autres élévateurs à traiter que les ascenseurs des HLM).

Europe 1 nous annonce que le thème de la solitude et du repli sur soi « sera le grand sujet du gouvernement à la rentrée prochaine ». Après la suppression de la réception du 14 juillet à l’Élysée, place aux banquets républicains dans les jardins réservés du Sénat au Luxembourg ? La fête des voisins sous les lambris des ministères tous les jours ? Avec Giscard à l’accordéon et MAM en Madelon ?

MAM a le port militaire. On la verra bientôt, en tenue de pompier, grimper sur la plate-forme qui évacue, depuis sa chambre de bonne du septième étage vers un hôpital, la dame du troisième âge, devenue trop volumineuse pour passer par les escaliers. Elle remontera le charbon et les bûches de la cave (en Angleterre, en raison de la hausse des prix du gaz privatisé, merci aux successeurs de Mam Thatcher, les retraités impécunieux se privent de nourriture pour se chauffer ; on y viendra en France). MAM animera la halte-garderie dans son logement (de fonction ? car il serait surprenant de traiter du repli sur soi depuis son petit chez-soi) et papotera avec les mamans isolées. On la verra, entourée d’allocataires du RSA, apporter douceurs, friandises, et réconfort moral, dans les masures les plus reculées. Par exemple chez Liliane Bettencourt, de nouveau en froid avec sa famille, et si tragiquement seule.

Pour alimenter la réflexion de MAM, Come4News lance un grand concours international d’idées. Quelles mesures suggérer à Michèle Alliot-Marie ? Faut-il mobiliser à sa suite les scouts, éclaireuses et guides de France ? Convient-il de faire appel aux vétérans mutilés et handicapés d’Afghanistan ? Et puis, pourquoi ne pas transformer en centre aéré le domaine immobilier de la famille de MAM en Tunisie ?

Surtout, ne laissons pas MAM cogiter seule. Le sujet peut porter à broyer du noir. Déjà, depuis des mois, elle s’est renfermée. Elle avait un blogue-notes, mamblog.free.f, elle l’a fermé. Son microparti, Le Chêne, est quasiment désert. C’est tout juste si elle s’est investie dans la question des désignations pour les prochaines sénatoriales dans le Béarn. Et puis, franchement, on voit bien qu’elle a encore maigri. Et comme elle le disait de François Hollande (« il était mieux rond, la maigreur, cela le durcit… »), une telle mission, cela peut la rancir, la racornir, si elle, si nous n’y prenons garde. Pour une telle tâche, il faudrait un peu la remplumer. Car si c’est bien de se gaver de soleil en Tunisie, il faut aussi savoir ne pas se montrer trop chiche sur le couscous.

Imaginez MAM allant porter réconfort aux femmes isolées en surpoids. On ne doute pas qu’elle saura trouver le ton juste, revêtir les neufs habits de son nouveau rôle, mais ne risque-t-elle pas de flotter un peu dedans si nous n’y mettons pas du nôtre ? Giscard s’invitait chez les Françaises et les Français, mais trop timide, MAM n’ose pas. Ami·e·s célibataires, esseulé·e·s, n’hésitez plus : conviez MAM à déjeuner ou dîner ! Pour l’alimenter en réflexions, quelle meilleure occasion qu’un bon repas. Contre le repli sur soi, faites de MAM la repue du moi(s), et développez-la du râble !