C’est positif pour le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), le procureur de Nanterre peut continuer sa carrière à la cour d’appel de Paris, en tant qu’avocat général (procureur). C’est négatif pour l’intéressé, qui avait tenté de freiner des quatre fers, qui garde traitement et points d’indice, mais perd sa monture, soit son chauffeur et son moteur (sa voiture de fonction).
Un procureur est mobilisable de jour comme de nuit, et c’est sans doute pourquoi, quand par exemple un suicide ou un accident sur la voie ferrée se produit en gare, il se pointe parfois deux bonnes heures plus tard, les voyageurs étant priés d’attendre patiemment son arrivée.
Certains substituts s’en chargent, se faisant rembourser leurs frais de déplacement après avoir utilisé un véhicule personnel, mais pour un procureur supervisant un TGI d’importance, dans le moindre ressort, chauffeur et voiture de fonction s’imposent. En cour d’appel, l’avocat général requiert, mais n’a généralement pas besoin, sauf en cas de nouvelle reconstitution sur une scène de crime, de se déplacer.
L’Union syndicale des magistrats aurait préféré que Christine Taubira décrète une suspension provisoire de Philippe Courroye, proche de Nicolas Sarkozy, voire du chargé d’affaires de Liliane Bettencourt, de Maistre, et surtout lance « une inspection en profondeur du tribunal de Nanterre », qui supervise les Hauts-de-Seine (donc Neuilly, La Défense, Levallois, et nombre de fiefs sarkozystes).
Courroye était impliqué dans des affaires de fadettes et d’espionnage de journalistes dans des affaires sensibles. Auparavant, à Lyon et Grenoble, il avait présidé à la chute des maires Michel Noir et Alain Carignon, pourtant proches du pouvoir RPR. Puis il marginalisait Charles Pasqua en tant que juge d’instruction du pôle financier. Mais il se rapproche de Jacques Chirac et du grand patronat avant de se rapprocher de Nicolas Sarkozy. Il fréquente François Pinault et Martin Bouygues, Jean-Charles Naouri (Pdg du groupe Casino qui a embauché son épouse).
Il semble que Robert Gelli, procureur à Nîmes, qui préside la conférence nationale du parquet et visait peut-être la direction des affaires criminelles et des grâces, pourrait devenir procureur à Nanterre.
On ne sait si Philippe Courroye ambitionne vraiment ou non de devenir avocat d’affaires. Il disposerait d’un copieux portefeuille de clients. Il a déposé une demande de disponibilité pour s’inscrire au barreau de Paris en septembre.
Le Syndicat de la magistrature lui avait adressé une lettre ouverte mentionnant que « certes, vous avez trouvé parfaitement normal d’être nommé procureur de Nanterre sans avoir jamais exercé dans un parquet de première instance et, surtout, contre l’avis du Conseil supérieur de la magistrature. ».
Charles Pasqua accuse par ailleurs l’ancien procureur du TGI de Nanterre d’avoir fait procéder à une destruction de preuves dans le dossier de l’Angolate, alors que Courroye était juge d’instruction au pôle financier.
Il ne s’est trouvé que le tout nouveau « syndicat » des Magistrats pour la justice (MPJ), dont la représentativité n’est pas tout à fait déjà reconnue, pour dénoncer la mutation de Courroye. Ce syndicat s’était formé pendant la campagne électorale pour appuyer les déclarations de Nicolas Sarkozy en matière judiciaire, tout en clament évidemment son indépendance totale. On en jugera si cette union se prononce dans l’affaire opposant les sénateurs UMP de Moselle, Masson et Grandidier, qui ont déposé des plaintes croisées.