Le film de Christophe Barratier nous dresse le portrait de cet illustre trader tombé en disgrâce en 2008 après avoir connu une ascension fulgurante. Les multiples démêlés avec la justice qui ont défrayé les chroniques nous sont devenus familiers et le dernier en date coïncide, grâce à l’ingéniosité des prud’hommes, avec l’obligation de la Société générale de verser presque un demi-million d’euros pour licenciement abusif à celui qui lui a fait perdre la bagatelle de quelque cinq milliards d’euros.

Inspiré de « l’engrenage », livre de Jérôme Kerviel, le film tente de sonder les tréfonds du conscient et de l’inconscient de cet outsider au CV plutôt banal. Immersion bien réussie dans cette salle de marché où règne la cacophonie avec des traders électriques tous vissés devant leur écran, partis à la chasse au profits à une cadence infernale! Acheter à la hausse, vendre à la baisse ou l’inverse. Etre toujours au taquet, savoir identifier les opportunités inédites du moment du genre Brexit ou encore attentats, agir en conséquence à la vitesse de la lumière.

L’acharnement du Boss ne passe pas inaperçu et lui fera bénéficier de l’encadrement par un Fabien Keller, (François-Xavier Demaison) pour lui transmettre les ultimes astuces réservées aux initiés. Dans le jargon trading ça donne : « cela fait partie des choses qu’on n’a pas le droit de faire mais qu’on fait quand même » ; « mettre une partie des gains sous le tapis » ou encore « spieler »…Tout ce qu’il faut pour aiguiser encore plus l’appétit d’un trader tout feu, tout flamme, accro de sensations fortes.

L’outsider trouvera son graal, ce qui lui vaudra des surnoms flatteurs, « cash machine » ou encore « bonne gagneuse ». Pas vraiment de profits personnels dans ces feuilletons, les gains servent à renflouer les caisses de la banque. Comme il n y a pas de montée sans descente, ce qui devait arriver arriva le jour où la Société générale refusera de fermer les yeux sur les deniers coups du trader dictés par par ses mêmes et incontrôlable pulsions alors que le rouge était bien au-delà du clignotement.

Contrairement au loup de Wall Street de Martin Scorsese, le loup du CAC 40 n’a rien du flambeur arrogant. Il garde un côté plutôt attachant bien que noyé dans un univers impitoyable où même les loisirs ont tout pour avachir. Ce film qui résonne comme un plaidoyer puisqu’il traduit la version de Kerviel ne nous apprend rien de particulier sur cette retentissante Affaire. On en sait un tout petit peu plus sur la psychologie de certains « golden boys » qui se laissent happer par ce jeu tentant à double tranchant.

Les prestations réussies d’Arthur Dupont et de François-Xavier Demaison, de bien d’autres, tous à l’enthousiasme communicatif, sauvent un peu ce film fatigant au scénario redondant.