Un homme sage a dit un jour : Le génie de l’écrivain se traduit par des érections intellectuelles qu’il transcrit sur le papier." 

Quand je laisse ma plume prendre le contrôle de ma main avec comme guide ma simple inspiration du moment, les mots se suivent comme par un enchantement irrationnel et je me laisse bercer par les idées qui résonnent dans ma tête.

Observateur privilégié

Je suis une ouverture sur l’extérieur par une nuit d’hiver. La hauteur  me permet d’avoir une vision  précise sur les évènements naturels et sur  les hommes. Je ne suis pas en fer, en acier mais en verre, je subis aussi les variantes du temps.  Du givre et de la buée coulent sur mon front vitrifié. Des feuilles mortes tourbillonnent et s’écrasent sur le sol. Pas un seul passant à l’horizon… Une rue sans va et vient, une rue morte ? Personne ne sort, personne ne rentre. Les arbres dégarnis sont lacérés par le froid. Seules les feuilles dansent dans la torpeur de la nuit tombante. L’hiver est vivifiant, malgré qu’il me racle la peau de façon brutale. Une sensation étrange s’empare de moi, je ressens le chaud et le froid. Je suis glacé par ce vent qui vient de l’ouest et en même temps, je suis en sueur.  Je peux sentir des perles d’eau qui s’égouttent sur mon front.

Alors quand la pluie se mêle à ce froid hivernal, je suis accaparé par l’humidité. Je ne vois plus le souffle du vent sur les feuilles, elles sont désormais plaquées au sol, immolées par l’eau. Je sais bien qu’aucun homme sensé ne s’aventurera dans la rue par un temps pareil. Personne. J’ai cependant une relation privilégiée avec les arbres asséchés par le froid et les feuilles mortes de l’automne. Ainsi, je surplombe mon monde tel un observateur solitaire. Je suis contraint d’accepter cette solitude, cette morosité, cette absence humaine du fait de la saison. En ce dimanche, le dernier jour de la semaine contribue à renforcer ce vide.

La nuit effraie les hommes. Ils préfèrent se terrer chez eux. De même que la nuit chasse les hommes, elle m’opprime personnellement. La lumière du jour me fait défaut, ma visibilité n’en est que réduite et pourtant je sens que, comme les hommes la nuit m’effraye. Je ne suis pas censé ressentir d’émotions ou de craintes en tant qu’objet matériel. Pourtant, je ne peux m’empêcher de contempler la beauté de ma rue. La présence des quelques arbres alignés suffit à ramener un peu de nature dans ce paysage pavillonnaire tranquille. L’absence des hommes et des véhicules rend sa place légitime aux éléments naturels en ce soir de novembre. Le vent chante fort, la pluie danse un tango effréné et les feuilles orangées suivent le pas. L’ambiance électrique qui se dégage de ce bal des éléments est rattrapé par la caractéristique des nuits sombres hivernales, la solitude. Je suis submergé par le Spleen de Baudelaire mais admiratif de ce que je vois, rien.