L’obsolescence programmée

Un film-documentaire sur un mécanisme qui est à la base notre société de consommation depuis les années 1920, ici dans le monde occidental, m’a beaucoup interpellée. Il s’agit de « l’obsolescence programmée ».

On entend, par « obsolescence », une volonté de la part du consommateur de posséder un bien un peu plus neuf, un peu plus tôt que nécessaire.

Ainsi, dans le but de stimuler la croissance économique, les fabricants ont compris qu’ils devaient raccourcir la durée de vie des produits, faisant croître la demande du consommateur.

À Livermore, en Californie, un objet sort du lot de ceux créés par les ingénieurs de manière à être volontairement fragiles. Conçue par Adolphe Chaillet, il s’agit en fait de la plus ancienne ampoule du monde, qui brille sans interruption depuis 1901. Comment alors expliquer que les nôtres doivent être remplacées si rapidement ? En remontant un peu dans l’histoire, nous apprenons que les ampoules de Thomas Edison allaient jusqu’à durer 1500 heures. Et puis, à l’aide d’enquêtes, nous constatons que les employés d’un groupe d’intérêt dont le but était de contrôler la production d’ampoules incandescentes dans tous les pays pénalisaient leurs employés lorsqu’ils produisaient des ampoules durant plus de 1500 heures.  En 1940, le but est atteint : les ampoules ne peuvent briller au-delà de 1000 heures.

Les bas de Nylon y sont passés, eux aussi. Dans les années 1950, porter des jupes et des robes était bien à la mode, et les femmes étaient ravies d’avoir des bas résistants pour compléter leurs tenues. Le problème ? Les fabricants en vendaient moins. On a donc travaillé pour progressivement concevoir des fibres plus fragiles.

Encore aujourd’hui, la technologie est destinée à tomber en panne. Pensez à votre imprimante, qui, après un certain nombre de feuilles, cesse tout simplement de fonctionner. Ou encore, pensez à votre Ipod de chez Apple qui rend soudainement l’âme… et repensez-y lorsque vous demanderez qu’on vous change la pile, et qu’on vous répondra qu’il vaut simplement mieux s’acheter un nouveau Ipod.

L’obsolescence programmée engendre plusieurs conséquences néfastes. Entre autres, des flots de déchets électroniques sont constamment expédiés dans les pays du tiers-monde, comme au Ghana, en Afrique, et nous ne savons plus où les stocker. Certains de ces déchets sont tout à fait réparables, mais 80 % d’entre eux ne le sont pas. Le problème, c’est que notre planète ne pourra supporter cela indéfiniment, car ses ressources ne sont pas inépuisables. « Celui qui croit qu’une croissance infinie est compatible avec une planète finie est soit un fou, soit un économiste. Le drame, c’est qu’au fond, nous sommes tous des économistes, maintenant ! », Pense Serge Latouche, professeur Émérite d’économie à l’Université de Paris.

Bien entendu, il faut se responsabiliser dans ce processus, car n’oublions pas que personne ne nous oblige à se rendre dans un magasin pour y acheter un produit. Il s’agit d’un choix.

Imaginez toutefois si, du jour au lendemain, l’obsolescence programmée n’était plus à la base de notre économie. Cela voudrait dire que l’on verrait disparaître les centres d’achats, faisant perdre, du coup, les postes des commerçants. Un minimum de produits voudrait également dire pas de designers ou d’architectes, pas de personnel en charge du nettoyage, de gardes de sécurité, et j’en passe.

Le film-documentaire apporte quelques solutions pour freiner la tendance. Par exemple, les entreprises pourraient fabriquer des objets à partir de produits biodégradables, le but étant de créer des nutriments au lieu de créer des déchets. D’autres pensent que nous devrions entièrement repenser notre système économique, en réduisant notre surconsommation, et donc notre gaspillage et notre empreinte écologique.

En accord avec Serge Latouche, toutes ces réductions pourraient avoir comme effet de  nous libérer du temps pour  développer d’autres formes de richesse, qui ont l’avantage de ne pas s’épuiser quand on les consomme, comme l’amitié et le savoir.

Le bonheur dépend-il réellement de la consommation ? Je ne crois pas, sinon, nous serions déjà entièrement comblés.

Source :

Documentaire « Prêt à jeter : L’obsolescence programmée »

http://www.youtube.com/watch?v=iB8DbSE0Y90

13 réflexions sur « L’obsolescence programmée »

  1. [b]J’ai été moi-même témoin chez un constructeur automobile national (isé, mais je ne dirais pas lequel) du choix d’un élément qui durait un tout petit peu plus de 1000 heures par rapport à son concurrent qui dépassait largement les 2500 heures (1000h pour le « made in Germany », 2500 pour le français, avec en plus de tout ça un prix presque 25% meilleur en faveur du lyonnais) il y avait quand même 800 000 pièces en jeux, il s’agissait d’un essuie-glace …[/b]

  2. [b]{youtube}iB8DbSE0Y90{/youtube}

    La vidéo de FrédériqueL, en clair et tout de suite sous l’article.[/b]

  3. [b]Une honte :

    Même les cafetières électriques sont programmées, non pas pour vous fournir un café à l’heure demandée, mais bien pour sa durée de vie.
    Une amie et moi en avons fait l’expérience.
    Toutes deux avons acheté la même cafetière électrique le même jour dans une grande enseigne.
    Eh bien elles sont tombées en panne le même jour.
    Histoire vécue !!!!

    SOPHY[/b]

  4. [b]@Sophy,
    Vous vous êtes trompé, vous êtes sûre que ce n’était pas des pigeons (pour le tir) ?[/b] 🙂

  5. L’obsolescence programmée présente un intérêt majeur pour l’économie !
    Sans elle, nos ampoules dureraient 100 ans, notre électro-ménager 50 ans, nos voitures 50 ans, nos ordinateurs 20 ans, le mobilier serait quasiment éternel.

    Sans obsolescence programmée, il y aurait des millions d’emploi en moins en France, et pas loin d’un milliard dans le monde.
    Grâce à ce modèle, notre économie fonctionne.

    Notre bon président l’a bien compris : travailler plus pour faire monter le PIB et gagner plus.

    Très franchement, il n’y a aucun argument qui tienne la route et qui permette de défendre ce système qui est maintenant poussé au paroxysme de l’absurdité. Autant faire du matériel durable et payer les gens à rien foutre…

    En 1977, un collectif dénommé Ardet avait écrit un bouquin qui s’appelait [i] »travailler deux heures par jour »[/i]. A condition de ne pas réfléchir trop loin, on peut le considérer comme une utopie. Mais si on prend en compte toutes les productions inutiles, on est bien obligé de constater que cette utopie est plus que réalisable.
    Plus de [b]la moitié des salariés dans le monde font un travail inutile[/b]. Si on supprimait l’obsolescence programmée, la publicité, et si on réduisait drastiquement les [b]structures organisationnelles devenues magistralement sur-dimensionnées[/b] dans les entreprises et administrations (structures de management, ressources humaines…), on réduirait le temps de travail moyen de plus de 70%, avec la même richesse effective à la sortie.

    Bien sûr, cela exige [b]une ré-organisation complète de l’économie et de la société[/b]. Une économie efficace est désormais [b]incompatible avec le capitalisme, et même avec l’existence d’entreprises privées[/b] : une entreprise privée a intérêt à vendre un maximum pour maximiser ses profits, ce qui est contraire à l’intérêt de la société qui elle, a intérêt à ne produire que le nécessaire en un minimum de temps pour minimiser le temps de travail global.

  6. Certains nous donnent l’exemple des photocopieuses, robustes car produites par des entreprises qui les mettent en location, et qui ont donc intérêt à ce qu’elles soient robustes, de manière à les remplacer le moins souvent possible.
    En généralisant ce système aux voitures, à l’électroménager, et même aux cafetières, on obtiendrait un capitalisme durable.
    [u]
    Utopiste.[/u]
    Premièrement parce que les puissants ne veulent pas en entendre parler : des milliards d’euros d’investissement ne pourraient pas être amortis, et surtout, il n’y aurait plus rien pour ré-investir les profits.
    Il en résulterait [b]une contraction titanesque de l’activité mondiale.[/b]
    Là où il faut des centaines d’usines pour produire les automobiles dans le monde, il en suffirait d’une dizaine pour produire les pièces détachées et les voitures de remplacement. Calculez : si on a un parc mondial de 1 milliard de voitures qui durent en moyenne 50 ans, il faut tourner à 20 millions de voitures par an, au lieu de 80 millions aujourd’hui…
    Une telle généralisation occasionnerait une destruction massive d’emplois, notamment industriels et ce, partout dans le monde.

    Or, le capitalisme est, par essence, basé sur une croissance continue de l’activité, et ce pour tout un tas de raisons.
    Quand il n’y a plus de croissance, le système ne fonctionne plus.

  7. [u]Autre utopie : la croissance des services[/u]
    Déjà, [b]quels services ?[/b]
    Services à la personne ? Dans l’état actuel, il s’agit surtout de bénévolat. C’est très bien, mais je crains fort que le poids économique ne soit minime.
    L’informatique ? Par exemple les applications mobiles ?
    Les gens n’ont aucune envie de payer pour ça.
    Des pompistes dans les stations service ?
    Les gens n’ont aucune envie de payer pour ça.
    Les loisirs ? Le tourisme ? Les hôtels ? Les restaurants ?
    Ils existent déjà, et je ne vois pas ce type d’activité progresser et devenir moteur de l’économie mondiale. Ces secteurs sont des suiveurs, ils fonctionnent quand l’économie fonctionne, ils ne font pas fonctionner l’économie.
    La recherche ?
    Ca rapporte de la connaissance, mais la connaissance ne rapporte pas d’argent. Voilà pourquoi le privé ne finance jamais la recherche.

    Ensuite, si toute l’activité industrielle se tasse de 80%, les services aux entreprises industrielles vont en prendre un coup…
    Ce qui signifie que, en plus de ne pas avoir de débouchés pour progresser, les services vont, eux aussi, se contracter : les services liés à la supervision industriel, le gardiennage d’usine, l’entretien des parcs industriels… Tout ça va ralentir également.

    Le bourrage de crâne sur la « société post-industrielle » et la « société de services » a bien fonctionné…
    Mais ça restera du bourrage de crâne, pas une solution économique.

    La suppression de l’obsolescence programmée nous engage donc dans la voie d’une contraction de l’activité. Ce qui, dans le cadre du système capitaliste est catastrophique, surtout dans de pareilles proportions :
    -80% pour l’industrie. -40 ou 50% pour les services. Ce qui donne -60 ou 70% pour le PIB… C’est bien sûr un ordre de grandeur, mais on voit bien que ce n’est pas tenable. Quand on voit la panique que déclenche un simple ralentissement d’un demi pour cent de la croissance…
    Un récession de 60%, même étalée sur plusieurs années, ça emmènerait le chômage à plus de 50%. Irréaliste.

  8. La fin de l’obsolescence programmée nous emmènerait dans une logique différente : le rôle d’un médecin n’est plus de soigner, mais de maintenir la population dont il a la charge en bonne santé.
    Le rôle de l’industrie n’est plus de vendre un maximum, mais de produire le nécessaire pour répondre à un besoin.

    Nous passerions d’une logique de type « plus il y a d’activité, mieux c’est » à « moins il y a d’activité, mieux c’est ».
    Car un médecin qui a la charge de maintenir la population en bonne santé a intérêt à ce que personne tombe malade. Exactement le contraire d’un médecin payé pour soigner qui a intérêt à ce que les gens tombent malades et viennent chez lui.

    Nous passons donc à la logique inverse de celle du capitalisme : de l’économie de sur-consommation, de consommation comme moteur à la logique de réponse à un besoin, de consommation comme contrainte.

  9. [b]A Maurice, (celui qui aime le chocolat:=)
    A part l’emploi du mot capitalisme qui ne convient pas: il s’agit de fabriquer des objets durables et ce indépendamment de l’intérêt des banques et structures financières. J’adhère d’autant plus aux trois quart de vos dires que j’ai évoqué ce genre de situation [url]http://www.come4news.com/autopsie-dun-stylo-a-bille-393290[/url] [/b]

  10. [b]L’homme a commencé à se construire des objets pour améliorer son quotidien, ses conditions de vies, et à cette époque les objets fabriqués avaient une durée de vie beaucoup plus longues suite notamment aux matériaux utilisés.
    Ensuite l’Homme a voulu faire commerce de ses « trouvailles technologiques » et à commencer à les vendre, mais avec des matériaux qui durent trop longtemps, le commerce n’était point très lucratif, du coup il a fallu trouver une solution, sourires.
    Bilan, l’Homme a changé ses matériaux, a tout fait pour diminuer la durée de vie de ses objets à vendre, et à surtout commencer à en faire commerce à grande échelle. Bénéfice nette, les ventes ont explosé, le ré-achat est devenu perpétuel, et l’Homme est devenu dépendant de cette recherche de confort jusqu’à acheter par obsession des objets dont il sait la durée de vie de plus en plus éphémère afin de satisfaire les besoins commerciaux de ses congénères vendeurs.

    Au final, que faire? Si les entrepreneurs cherchaient dans un premier temps à allonger de manière durable la durée de vie de ses produits vendus, l’Homme consommerait moins et aurait des objets qui dureraient plus longtemps, mais au final notre vendeur mettrait la clé sous le paillasson assez rapidement.

    Soyons logique et honnête, l’Humanité est devenu l’esclave d’elle même et du serpent commerce qu’elle alimente de plus en plus dans un désir utopique, éphémère, et fantomatique d’améliorer ses propres conditions de survies.

    Amitiés

    Tom

    PS : Merci pour cet article, le constat est accablant, mais que trop vrai. J’adore.[/b]

  11. Le principe de fabrication contemporain: plus un rasoir a de lames de lames moins il coupe bien et plus il s’use vite (jetable avec sa cage plastique + super emballage non (bio)dégradables.

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