Un gouvernement devrait être formé dimanche prochain en Libye. On verra. Une transition vers un régime moins dictatorial, sans intervention extérieure, était-elle possible. Douteux si l’on se réfère à la Syrie. Mais le chaos libyen, fomenté de l’extérieur, appuyé de l’extérieur, et incontrôlable de l’extérieur, n’augure rien de bon pour les populations. Certains souhaitent à présent une réelle révolution.

Que représente Abdullah Naker, qui menace, via Reuters, de mettre en actions les armes de ses brigades de Zintan déployées à Tripoli si elles ne sont pas représentées à son gré dans le futur gouvernement libyen ?
Allez savoir… Naker a pris position dans les locaux d’une ancienne compagnie du bâtiment, à Tripoli, et se targue de pouvoir s’appuyer sur des milliers de combattants. Ses hommes se sont emparés de chars, et savent les utiliser.

Naker, comme d’autres, à Benghazi, Misrata et ailleurs, a reçu des aides directes, en armes et subsides, du Qatar. Comme Belhadj, l’ancien chef de guerre islamiste. Mais il est moins docile. Il ne veut pas d’une charia à la sauce qatarie, ni de se voir évincer par Belhadj.

Et puis, il y a les non-combattants, et surtout les non-combattantes, mais qui ont appuyé les « révolutionnaires », et qui voit à présent des islamistes profaner des tombes, pour redonner aux dépouilles des sépultures plus conformes à leur interprétation de l’islam.

Les imams sont divisés. Faut-il imposer le voile aux femmes, oui, sans doute, mais lequel ? Faut-il les laisser conduire des voitures ? Faut-il couper la main des voleurs ?

Pour Omar Mukhtar, le cheikh de Bani Walid, la charia du Qatar ou des Émirats doit régner. Ce n’est pas la plus rigoureuse. Mais les Berbères sont plus libéraux encore.

Khalifa Belgacem Haftar pourrait devenir le commandant en chef d’une future armée libyenne, mais le CNT a sans doute un autre candidat. Abdelhakim Belhaj ne se prononce pas. Pas davantage que les militaires turcs ou égyptiens, qui tentent d’influer sur les choix du CNT. Sur le terrain, des milices diverses protègent les installations pétrolières, ne recevant leurs ordres que d’elles-mêmes, d’autres traitent directement avec les autorités du Mali et du Tchad.

Faute de trouver des boucs émissaires disponibles chez les anciens loyalistes qui ont fui, il faudra bien en créer d’autres. Les femmes « dissipées » sont tout indiquées. D’autres groupes aussi, d’autres minorités. Il faut « laver l’honneur de Tripoli » et d’autres localités, et instaurer une charia ad hoc. Et bien sûr, en dépit de BHV, les traitres infiltrés par les services secrets israéliens seront tout indiqués. « Nous ne sous-estimons pas la présence d’une cinquième colonne, pourquoi pas d’ailleurs des espions israéliens à la solde des anciens partisans de Kadhafi ?», a rapporté cheiky al- Farnjani, à Jean-Louis Le Touezet, de Libération. C’est commode. Avant, sous Kadhafi, les Berbères étaient désignés en tant que cinquième colonne d’Israël. Ils peuvent de nouveau endosser le rôle dont on les afflubera…

Bloomberg rapporte les propos d’une jeune femme : « auparavant, nous pouvions porter des shorts dans la rue. Voyez autour de vous à présent. ». Merci Sarkozy, merci Bernard-Henri Lévy… Aussi, certaines en appellent à l’urgence d’avoir « une nouvelle révolution. ». Merci Sarkozy, merci BHL, qui vont tout faire pour la favoriser, sans le Qatar, cette fois. Comme en Afghanistan ou la province de la Kapisa, sous « contrôle » des forces françaises, a développé sa production d’opium ?

Majda al-Fallah, représentante de la branche féminine des Frères musulmans libyens, appelle à la libération de la femme, mais sans importer le modèle occidental, en créant un nouveau modèle islamique. On a entendu le même refrain en Égypte où les candidates des Frères musulmans aux élections sont fortement minoritaires.

Il n’y avait pas que BHV (BHL) sur le front : « J’ai entendu des combattants de la rébellion, avec qui j’étais sur le front, qui se demandaient pourquoi on leur ordonnait de partir à la conquête des territoires des autres clans. Mais ils ont suivi le mouvement, sans toujours bien comprendre ce qui se passait, par manque d’instruction et de conscience politique… ». C’est de Pierre Piccinin pour De Wereld Morgen. Piccinin n’était pas un partisan de Kadhafi. Ni des islamistes : « J’ai longtemps été un partisan de l’idée que la menace de l’islamisme radical était un mythe, qui ne servait qu’à légitimer les régimes autoritaires de la région, présentés comme des remparts contre cette menace. ». Mais il se ravise : « J’ai d’excellents contacts en Tunisie : dans le sud de la Tunisie, Ennahda agit déjà de concert avec les salafistes. Je peux vous l’assurer : ils s’en prennent aux femmes non voilées dans les rues, saccagent les magasins qui vendent de l’alcool… Leurs véritables intentions commencent à se faire jour. Même son de cloche en Egypte. Et, en Libye, c’est bien pire. ». Merci Sarkozy, merci BHL.

Encore merci, surtout pour elles. Qui étaient aussi victimes de rapts, de viols sous Kadhafi. Mais vous n’en aviez cure. Merci aussi, Carla Bruni.