Liban : l’autre homme malade de l’Orient

 

Alors que nos regards se portent vers la Tunisie et l’Egypte depuis plus d’un mois, nous n’avons pas vu que d’autres pays de la région pouvaient, eux aussi, exploser. Le Liban, plus particulièrement, apparaissant, lui aussi, comme étant en grande difficulté. L’analyse de ses problèmes et possibles solutions pouvant nous aider à mieux comprendre pourquoi 2011 semble une année à haut risque pour l’ensemble de la région.

De nouveau la peur s’éveille au Liban. La démission, le 14 janvier, des 14 ministres liés au Hezbollah a fait exploser le consensus politique qui avait pu être trouvé ces 14 derniers mois. En effet suite à cette démission collective, le gouvernement Hariri, dit d’Union nationale, a du céder.

Et tous les experts s’accordent à dire que la crise pourrait encore durer plusieurs mois. Le refus, prononcé le jeudi 27 janvier, de Saad Hariri de participer au prochain gouvernement, ne venant qu’en accréditer les sombres présages.

Car pour le Liban l’équation politique reste la même depuis maintenant six ans, et l’assassinat de Rafic Hariri, tué par une bombe le 25 février 2005. Depuis la question qui se pose est de savoir si une enquête indépendante est possible et appelée à être réalisée pour savoir qui se cache derrière cet attentat. L’ONU, poussée par les Etats Unis, ainsi que la France l’appellent de leurs vœux. Mais tous savent que le prix à payer pour cette vérité pourrait être un Liban de nouveau embarqué dans une nouvelle guerre.

Ainsi vit la politique libanaise : dans l’attente des résultats de cette interminable enquête. On parle de conclusions rendues publiques dans possiblement un ou deux mois.  Avec les années et le temps celle-ci est bel et bien en train de se transformer en véritable bombe politique. Le Hezbollah, par la voix de son leader, Hassan Nasrallah, ayant prévenu qu’il ne laisserait pas faire. Pour passer de la parole aux actes, des miliciens du groupe islamique se sont, il y a moins d’une semaine, postés quelques heures durant aux points stratégiques du grand Beyrouth.

Or depuis la chute du gouvernement Hariri il apparait clair que le Hezbollah semble de plus en plus  le parti faiseur de roi dans le pays. Sans lui toutes sorties de l’impasse politique qui bloque aujourd’hui le pays parait difficile. Le monde semble donc condamné à devoir écouter ses revendications, à défaut, objectivement ; de pouvoir toutes les satisfaire. En effet cauchemar des cauchemars pour le Liban, le Hezbollah pose comme première condition à sa plus grande coopération politique un principe objectivement irrecevable pour les autres partis : la suppression pure et simple du tribunal spécial.

L’impasse semble donc complète, d’autant que le spectre de l’isolement du sud du pays est de plus en plus avéré avec cette remontée en puissance du parti de Dieu. Le Hezbollah contrôlant une bonne partie du sud du pays et ayant eu le temps depuis la Guerre de Juillet (nom libanais pour le conflit israélo-libanais de 2006) de se réarmer.

On le voit donc ne manque plus que l’allumette pour faire sauter cet attelage libanais sous très haute surveillance de ses voisins. Israël plus particulièrement s’inquiète qu’à coté de la crise égyptienne puisse exister à ses frontières une telle poudrière. Preuve de la préoccupation que ses problèmes suscitent, le Liban a vu, dans la crise que le frappe, émerger un nouvel acteur géopolitique. Et là est l’une des véritables innovations de la crise qui aujourd’hui frappe le Liban. La Turquie, en effet, est montée en premières lignes sur ce dossier, et ce à coté des acteurs traditionnels du dossier: France, Israël, Syrie, Etats-Unis. A cela une explication possible : l’affaiblissement de deux alliés traditionnellement forts des Hariri : les Etats-Unis, toujours discrédités par la guerre d’Irak, et l’Arabie Saoudite, en pleine crise de succession. C’est ce qui peut augurer de quelques explications pour expliquer l’effervescence politique dans laquelle se trouve le Proche Orient. Si il bouge autant depuis plusieurs mois c’est peut être qu’en sous main se joue toute une redéfinition implicite des rapports de force dont nous commençons à entrevoir les effets.

Même si les différentes parties semblent décidées à éviter toutes nouvelles guerres au Liban, il y a incontestablement de plus en plus de risques en cours de réalisation dans cette partie du Machrek.

Davantage qu’à une simple redéfinition de ses contours internes, l’Orient pourrait bien connaitre, en 2011, une succession d’évènements dont la Tunisie, puis l’Egypte n’auraient été que les prémisses.

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