L’homéopathie, science ou magie (deuxième partie)

La plupart des textes homéopathiques modernes reconnaissent les limites de cette discipline, en particulier dans le cas d’affections chroniques ou lourdes, mais beaucoup  répètent leurs vérités fondatrices : le semblable guérit le semblable ou son contraire, l’énergie vitale est accessible par diverses voies qu’on ne peut toutes démontrer, et le simple contact induit des transferts de propriétés ou d’énergies survivant à la disparition de la molécule active.

Pourtant des passerelles existent avec la science "officielle", établissant des parallèles avec les découvertes les plus récentes en matière de défenses naturelles de l’organisme et moyens de les stimuler. Ainsi qu’avec les réactions du corps aux multiples stress physiques et émotionnels, dont les neurotransmetteurs à la fois causes et effets réversibles figurent parmi les éléments les mieux étudiés. Peut-être vaudrait-il mieux s’en tenir là que chercher à démontrer des effets mécaniques.

 

Des défenseurs maladroits

Un zeste de mépris pour les sceptiques qui remettent en question les postulats de l’homéopathie n’est-il pas contreproductif ?
Ainsi Dan Ullman, enseignant cette discipline à l’université de San Francisco affirme que "l’homéopathie est trop scientifique pour être comprise du commun des mortels".
Après une critique virulente des médecins qu’il accuse de maltraitance par incompétence (il est seulement maître ès sciences) il prétend que les préparations à très haute dilution, c’est-à-dire celles ne contenant plus rien de la substance originale, sont encore plus efficaces, car selon lui :
"l’eau devient imprégnée de l’information et de la mémoire de la substance dans sa pureté originelle."

Au mépris, il ajoute la légèreté en prétendant valider les notions de "résonance" et de "force vitale" au nom de leur immémoriale ancienneté, comme si les millénaires pendant lesquels on a cru que la terre était plate accréditaient le concept !
Pire, il esquive toute explication rationnelle en affirmant qu’il ne reste plus aux scientifiques qu’à démontrer pourquoi cela fonctionne aussi bien !

Et quand lui demande quelle expérience de laboratoire conduite de façon indépendante pourrait valider la légitimité de l’homéopathie, Ullman répond que les travaux de Madeleine Ennis l’ont déjà démontrée. Son étude prouverait que des solutions ultra-diluées d’histamine pourraient combattre les allergies. Mais une équipe de chercheurs universitaires, appliquant les protocoles établis par la James Randi Educational Foundation s’est avérée incapable de reproduire les résultats d’Ennis.
Quant à la cohorte des polyallergiques soulagés par ses soins qui la tiendraient pour une sainte, on les cherche encore !

Pourtant, cela fonctionne dans certains cas

Aujourd’hui, parmi les explications les plus scientifiques des succès obtenus par des traitements homéopathiques, on trouve le fameux : "primum non nocere" (d’abord ne pas nuire)
En supposant que la maladie originale était authentique, on peut dire que ces remèdes étant complètement inertes, ils permettent à la nature de reprendre le dessus et faire disparaître des affections plutôt bénignes surévaluées.
Par exemple un simple rhume appelé grippe, des crampes qualifiées de paralysie ou encore des palpitations émotionnelles confondues avec la tachycardie. Et ne parlons pas des hypocondriaques qui ont surtout besoin d’être rassurés.

Ne rien faire, vous finirez pas guérir tout seuls… Mais faire quelque chose, même si cela ne sert à rien, peut accélérer la guérison ! Mystères de l’autosuggestion et de l’autoguérison…
A mettre en parallèle avec ces études (après expérimentations en double aveugle) publiées dans le "British Medical Journal" en 1996 confirmant que les Européens et les Américains réagissaient aux couleurs des remèdes : rouge, jaunes ou orange étant supposés posséder une plus grande efficacité, les patients guérissent plus vite !
Bleu et vert dédiés aux analgésiques, sédatifs et autres psychotropes, calment mieux.
Blanc étant neutre et considéré comme peu efficace produit des effets limités, à molécules égales,
sauf s’il interagit avec un emballage ou un flacon rouge ou orange.

On ne peut négliger non plus l’effet placebo, qui fonctionne particulièrement bien dans le traitement des maladies psychosomatiques dont la qualité d’écoute du soignant serait la meilleure thérapie.
Or de nombreux médecins affirment que plus de la moitié des affections qu’ils soignent sont des "maux de civilisation" de cet ordre : rébellion du corps et de l’esprit contre un environnement de plus en plus inhumain, des conditions de vie et de travail peu gratifiantes, l’explosion des familles et souvent un bannissement social et culturel de fait pour raisons économiques.

Quand les ethno-anthropologues étudient parmi les superstitions primitives les attentes culturelles tenues pour responsables des guérisons magiques, ou à l’inverse coupables des effets mortifères des sortilèges ou des tabous, ils évoquent aussi l’effet placebo ou nocebo.
En d’autres termes, plus on y croit et mieux cela fonctionne, ou pour le moins produit un effet direct ou indirect.
Un grand classique en la matière figure dans une étude Suédoise des années 1990, sur ce que nous appellons des alicaments. Les gens qui appréciaient l’apparence et le goût de ce qu’ils mangeaient, et leur attribuaient une charge symbolique positive, justifiée ou non, en tiraient plus d’éléments nutritifs et en assimilaient mieux les protides, les glucides, les vitamines et les oligo-éléments.
Cela peut s’expliquer par la "phase céphalique" du processus de digestion, liée à la culture et au rapport aux aliments, qui influencent le taux des enzymes salivaires, le flux des sécrétions gastriques, et l’efficacité des fluides pancréatiques et intestinaux. L’observation fut renouvelée avec des Thaïlandais et des Français appréciant leur cuisine nationale, considérée dans ces deux pays comme un élément culturel majeur, et l’on obtint des résultats similaires.
Par un processus comparable, l’homéopathie stimulerait nos défenses immunitaires, favorisant un retour à l’équilibre… Et trouverait ainsi sa légitimité dans le fait qu’elle démontre la supériorité de l’esprit sur la matière !

 

3 réflexions sur « L’homéopathie, science ou magie (deuxième partie) »

  1. [b]Le mot clé: conditionnel, c’est cela seul qui compte. Merci Christian pour ce second degré qui l’air de rien voue l’homéopathie aux gémonies dont elle n’aurait jamais du sortir.[/b]

  2. Mon propos n’était pas d’accabler l’homéopathie mais d’expliquer que les effets qu’on lui prête relèvent d’un conditionnement psychologique, qu’on l’appelle effet placebo, autohypnose ou action de l’esprit sur les troubles psychosomatiques.
    Dès lors, tout en reconnaissant son utilité pour certaines affections légères, il conviendrait de la ranger sur la même étagère que les différentes psychothérapies, les prières et les pratiques magiques, parce qu’elle relève de phénomènes de croyance, i.e indémontrables selon des protocoles scientifiques.

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