Ayant commis des écrits futiles sur les Ardennes et Arthur Rimbaud (et sur place, ce qui manque de vergogne, de surcroît), j'avais naïvement pensé que j'allais rédiger quelque chose d'intelligent, de bien senti, sur cette Lettre ouverte à Rimbaud de Noël Tuot (éds Anabet). Même par copinage, je n'y arriverai(s) point. Donc, constat d'hébétude.

Je pensais me rattraper, et commenter savamment la préface d'André Dhôtel , Rimbaldien né quelque part du côté de Charleville ou de Mézières ou de Sedan, tout comme Noël Tuot, qui est de Vouziers.
Or, hormis cette phrase de la préface, qui m'avait tant alléchée, je n'ai pas trouver vraiment de quoi m'extasier. Peut-être ai-je vite, trop vite lu (et regardé ces dessins pleine page qui ferment le récit et sont des crobards un tantinet contournés). La phrase ?
« Une courte phrase à chaque page, pour en venir à dénoncer en l’image du poète une sorte de portrait d’Hitler qui s’arroge une autorité sans discussion. Bien évidemment, il ne s’agit pas pour Tuot de nier la merveille éclatante d’une poésie, mais de refuser son adhésion à l’idée-force d’une littérature promue comme un modèle dont on impose la vertu spirituelle. »
Bien évidemment, ce n'est pas faut (sic, ajoutai-je à la suite d'un commentaire).
Bien assurément, il s'agit aussi d'autre chose.
Il y a trois autre paragraphes de Dhôtel aussi courts que celui qui précède, au point que je me demande si citer le quart de la partie qui m'a le plus intéressé de l'ouvrage n'est pas trop outrepasser le droit de citation. Piraterai-je sans le vouloir ?
Puis on passe directement à ce récit onirique, qui fait penser à un condensé de Lewis Caroll, où Mallarmé réveille le narrateur. Ils vont un moment converser puis ce sera une petite pérégrination au cours de laquelle, en étripant divers personnages plus ou moins burlesque, on accouche d'un ver-s-olitaire, qui serait l'incarnation tæniesque de la poésie. Le narrateur Ubu lui coupe le cou et son coup. Ah, non, celui-là, il l'épargne.
Il faut prendre Dhôtel au mot lorsqu'il dit de cette Lettre qu'elle est constituée de courtes phrases, une pour chaque page. Comme ensuite, nous avons 28 ou 30 crobards dont chaque fait une page quand ce n'est pas, rarement, une double page.
Cela ferait un commode livre-objet où on aurait largement de la place de consigner des vers, des notes ou remarques, voire des listes de choses à faire, des listes de courses. Il y a quand même cette page 94 avec une dizaine de phrases à elle seule sur laquelle Rimbaud est invectivé : facho ! Rimbaud s'en fout et de ses tripes son meurtrier finira par tirer un ver solitaire. Et voilà.
Il est très facile d'étriper, d'étrangler, d'éreinter un poête, une auteure, un écrivain, &c. La louange demande beaucoup plus d'efforts. Là, en bon fainéant, je ne ferai rien. J'ai dû louper quelque chose, mais, bah, je ne m'y atterderai pas. Simplement, de prime abord, l'objet est assez intrigant pour qu'on veuille s'y intéresser. Je n'ose conseiller de feuilleter avant d'acheter : mais il paraît qu'il y a des lectrices et lecteurs de BD qui lisent sur place et achètent quand même. Donc, à vous de voir…