Depuis trois ans je me bats pour que mon ancien pupille retrouve une situation de citoyen libre, à part entière. J’ai sollicité le Président de la République à plusieurs reprises sans aucun résultat. Et pourtant Nicolas Sarkozy a dit et redit qu’il se battrait contre toutes les formes d’injustice. De guerre lasse, j’ai écrit cette lettre ouverte de façon à communiquer publiquement les éléments de discorde qui nous opposent mon protégé et moi-même au service des tutelles de notre région.

 Monsieur le Président,

Mainte fois je vous ai sollicité à propos de la situation injuste que vit mon protégé Monsieur Laurent Mouriesse. Aujourd’hui je saisis l’opportunité qui m’est offerte en tant que reporter citoyen pour attirer à nouveau votre attention ainsi que celle des lecteurs sur les problèmes liés au Service des Tutelles et de protection des biens de Pierrefeu du Var et, à travers ce service, sur ce système en général.
Voilà presque trois ans que cet homme, mon protégé, qui présente une psychose contraignante, reste à ma charge pleine et entière tant sur le plan de la nourriture, des soins, de l’entretien que sur celui de la culture et des loisirs. C’est moi qui l’alimente, l’habille, le loge, le soigne à mes frais en le conduisant chez les médecins et les spécialistes dont il a besoin. Les praticiens refusent d’avoir affaire à ce service parce que ledit service ne les paie pas, voire aux calendes. Les remboursements tombent sur le compte de mon protégé soi-disant géré par le service de Pierrefeu qui n’assume même pas ces dettes envers ma personne. J’en suis donc de ma poche et j’ai décidé de conserver par devers moi toutes les feuilles de maladie en attendant une intervention du Juge des Tutelles qui daigne mettre de l’ordre dans ces dérives, ce qu’il ne fait point. Il en est de même du loyer impayé en partie depuis deux ans et  totalement impayé depuis le premier janvier 2009. Mme la gérante demande un bail alors que le montant de ce loyer a été déclaré depuis le mois de novembre 1997 à la Caisse d’allocations familiales.
Je l’ai déjà signalé, mais je ne le répéterai jamais assez : comment peut-on dissocier la situation socio-économique d’un citoyen en la plaçant à des kilomètres de son lieu de vie ? M. Mouriesse est domicilié à La Celle et le service est à Pierrefeu à 35 km de son lieu de vie. Comment peut-on priver un citoyen handicapé de ses ressources ? Comment peut-on après cette saisie légalisée de ses biens faire des opérations financières sans l’en avertir ? Comment peut-on dissocier la situation d’un être humain dont le psychisme est déjà dissocié par une souffrance psychotique sans altérer davantage son état ? Le service des tutelles devient alors une véritable entreprise de démolition psychologique.
Les droits fondamentaux de mon protégé sont bafoués en particulier l’article 25 de la Déclaration des Droits de l’Homme : « Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires, etc.»
Mme la gérante a demandé par écrit à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie que tous les courriers lui soient communiqués en personne. Ceci contrevient à l’article 12 des Droits de l’Homme : « Nul ne sera l’objet d’immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile, sa correspondance, ni d’atteintes à son honneur et à sa réputation. Toute personne a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes ».
Comment un fonctionnaire de l’état peut-il s’autoriser à une telle ingérence dans la vie privée et le rapport à la santé de M. Mouriesse ? Ceci représente un abus de pouvoir, une atteinte à la liberté individuelle et une substitution intolérable à la personne de mon protégé. Mme la gérante agit en lieu et place de M. Mouriesse, ce qui est le propre d’une situation psychotique. Ainsi une situation psychotique est doublée et aggravée par le service des tutelles.
Mon protégé et moi-même nous sommes rendus à sa Caisse d’Assurance Maladie car sa carte vitale ne fonctionnait plus. Nous en avons profité pour préciser qu’il était sous curatelle et qu’à ce titre il n’avait pas à passer par le service des tutelles, que sa demande de carte vitale devait lui être envoyée à son adresse personnelle. Peine perdue, Mme la gérante est intervenue en modifiant l’adresse de mon protégé et en déclarant M. Mouriesse sous tutelle. Comment une administration en rapport avec la santé admet-elle une telle discrimination ? Pourquoi se soumet-elle à une sorte de diktat, une opinion mensongère, réfutant à mon protégé le droit à l’information, comme la liberté de décision dont tout citoyen doit bénéficier ? Ce déni de la liberté, de la personne et des droits de M. Mouriesse représente une discrimination. 
Comment un agent de l’état que vous dirigez, une gérante de tutelles, un service dit de protection des biens, comment ce système peut-il agir en toute illégalité et trouver avec le ciel de la justice des accommodements ? Comment Madame le Juge des Tutelles, alors en fonction à l’époque, a-t-elle pu nommer un service situé à 35 km du lieu de vie de mon protégé ? Pourquoi les demandes de mon protégé restent-elles lettre morte ? M. Mouriesse n’existe ni au regard du Juge, ni au regard du service des tutelles puisque personne ne répond à ses demandes, il n’existe ni en tant que personne, ni en tant que citoyen. Moi-même j’ai tenté de faire parvenir des factures de mon protégé à ce service, je n’ai eu aucun retour.
Plus grave encore ! Mon protégé n’a plus aucune information sur ses comptes. Est-il légal de gérer les comptes d’un sujet sous curatelle sans le mettre au courant des mouvements de ses comptes ? M. Mouriesse est spolié de ses biens et de ses revenus, qui plus est, Mme la gérante décide en ses lieu et place sans lui donner la moindre information. En fait elle agit comme si mon protégé était sous tutelle, elle déplace insidieusement les droits de mon protégé à être informé pour les mettre sous le boisseau. On plonge dans un univers qui est celui du délire et de la folie.
 Autre fait, Mme la gérante avait envoyé une déclaration de revenus de mon protégé en le faisant passer sous tutelle. C’est en le conduisant à l’hôtel des impôts où il avait retiré son avis d’imposition que M. Mouriesse a pu constater qu’il était sous tutelle de Nathalie Monge, ce qui était un abus. Depuis l’erreur a été réparée mais elle reste de pure forme et cette erreur —entretenue— demeure au niveau de la mutuelle et de la Caisse d’Assurance Maladie. La somme déclarée sur l’avis d’imposition 2007 par Mme la gérante, à savoir 23000 euros, somme dont mon protégé n’a pas vu la couleur, elle peut la reconduire chaque année et geler ainsi sa situation si aucune décision n’intervient pour dégager M. Mouriesse de cette mainmise abusive.
En mettant mon protégé dans cette situation, en fait, c’est moi que l’on veut atteindre. On dirait que Mme la gérante est animée d’une sorte d’esprit de rétorsion dont elle voudrait m’accabler. Elle a développé une suspicion et une animosité grandissantes vis à vis de ma personne parce que la curatelle que j’ai exercée pendant 15 ans n’était pas dans le droit fil corseté qu’elle projette, comme si tout curateur privé ne pouvait être à ses yeux qu’une personne malhonnête versée dans l’illégalité la plus délétère, en particulier parce que je remets en cause son attitude de gérante guidée par une logique presque totalitaire, parce que j’ai fait une confusion de patrimoines, ce qui ne signifie pas que j’ai spolié mon protégé, au contraire, je pense que pendant 24 ans, presque 25, j’ai donné plus que je n’ai reçu d’aides, ne serait-ce que le fait de n’avoir jamais bénéficié de l’allocation spécifique que l’on verse aux personnes qui prennent en charge un handicapé.
Si je ne parviens pas à obtenir gain de cause, je continuerai, Monsieur le Président, à soutenir mon protégé dans cette épreuve, à payer de ma personne afin qu’il ait une vie digne, qu’il soit nourri, hébergé, soigné grâce à moi, et qu’il ait un rapport à la culture qui l’arrache à son angoisse quotidienne. Cependant je considère cette situation comme particulièrement révoltante par rapport au fait que mon protégé a droit à utiliser ses biens, qu’il a besoin d’argent au quotidien ; il est d’autant plus gêné de n’avoir aucune ressource qu’il se voit entièrement dépendant de ma personne et qu’il me voit travailler davantage pour subvenir à ses besoins comme aux miens.
Quant on voit ces pupilles errants à Brignoles, désemparés, haves, mal habillés, sales, on se demande comment les services de tutelles peuvent gérer leurs biens depuis leur bureau, c’est-à-dire coupés de cette réalité humaine. L’unique préoccupation de ces services est la constitution d’un patrimoine au détriment d’une vie plus décente de ces pupilles, patrimoine d’autant plus important que les gérants y puisent leur pourcentage. Combien de pupilles ont disparu en laissant des patrimoines inutilisés reversés à l’état, Monsieur le Président, alors que ces pauvres hères, les plus démunis des citoyens, auraient eu besoin qu’on leur donne un peu plus de possibilités de jouir de la vie.
 Tous ces services font montre d’un désintéressement total des personnes protégées, on devrait dire contrôlées et à la fois délaissées. Le phénomène de discrimination ne sévit pas seulement sur les ethnies étrangères, les juifs ou les musulmans, mais pèse lourdement sur les handicapés et se manifeste par une indifférence, un laisser-aller, une méconnaissance, voire un déni insupportable.
Recevez, Monsieur le Président, mes respectueuses salutations.

JEAN-PIERRE BARBIER