Règne de Clovis, Roi des Francs (vers 466 – 27 novembre 511)

 

 

Sculpture de Clos à Notre Dame de Corbeil

Lettre ouverte à Clovis

Rois des Francs Saliens

Lutèce

Votre Majesté Royale,

Il y a bientôt 1500 ans (vers 466 – 27 novembre 511), vous mourûtes à Paris après avoir vous et votre épouse la bienheureuse et Sainte Radegonde marqué votre temps.

 

En l’honneur de cet anniversaire, bien des auditeurs dont je suis vont se rappeler vos faits et méfaits mais surtout ceux de votre femme, galanterie oblige.

 

1500 ans pourraient, à nous simples mortels, nous paraître une éternité (pardonnez-moi ce jeu de mot, vous qui y siégez depuis fort longtemps) et  nous faire croire que notre société a beaucoup changé.

 

Comme de votre temps, nous multiplions les divorces. Nous serons dès lundi 1er novembre 7 milliards d’êtres humains.

 

Nous ne partons plus en guerre pour annexer d’autres territoires mais pour préserver la guerre en d’autres pays.

 

Mais qu’est devenue le Royaume des Francs ? Votre Royaume s’est agrandi puisque le Royaume de Sigebert 1er (Arras, Vinchy etc..) ainsi qu’une partie du Royaume de Chilpéric 1er (Mets, Toul, Reims), le Royaume de Caribert (côté Ouest) et de Gontran ainsi que l’Alsace et la Lorraine (autrefois en Alémanie) ne forment plus qu’un tout.

 

 

Les Francs entre 400-440

 

 

Division de la Gaule en 481

 


Depuis votre mort, bien des guerres et des croisades ont eu lieu.

 

Moi qui suis née au 20ème siècle n’en ai pas connues mais mon siècle a vécu deux grandes guerres.

 

Charlemagne qui vous succéda en 768 inventa l’école pour tous. Ah, le coquin, le bougre n’a-t-il pas compliqué les choses. Nous étions si bien, nous n’étions pas plus bêtes pour autant. Tout se faisait par la transmission orale. Cela nous oblige maintenant à aller à l’école jusqu’à au moins 25 ans. Bigre, bigre, me dites-vous : vous avez raison. Cela fait tard, d’autant que de votre temps, on ne vivait pas longtemps. Pour étudier, nous avons besoin de livres, nous imprimons notre savoir sur du papier qui vient des arbres. Je vous vois grimacer, Majesté. Que votre grimace est laide mais tellement compréhensive. Et oui, nous abattons des arbres pour en faire du papier. Tous les beaux arbres sous lesquels vous preniez plaisir à vous reposer sont depuis belle lurette « décédés ».

 

Nous ne correspondons plus par messager mais en tapant sur un écran et on clique sur un bouton « Envoyer ». Ce serait trop long à vous expliquer et est-ce si nécessaire de vous importuner avec des explications dont vous n‘avez que faire ?

 

Vous qui avez tant aimé votre femme et qui avez affirmé la place importante de la femme dans la société, sachez que nous courons toujours après la reconnaissance de notre statut. Les femmes sont devenues polyvalentes. En effet, elles étudient, se marient, procréent et travaillent. Mais elles gagnent moins que les hommes. Car maintenant notre travail est payé avec des pièces qui s’appellent « euros », monnaie de l’Europe.

 

Ceci, c’est la faute de Charlemagne qui non content d’inventer l’école fut le Père de l’Europe pour avoir assuré le regroupement d’une partie notable de l’Europe occidentale, et posé des principes de gouvernement dont ont hérité les grands États européens.

 

Vous qui eûtes une femme si religieuse, si spirituelle et que vous avez admiré tout au long de votre vie, vous serez déçu en apprenant que maintenant La France n’est plus la fille aînée de l’Eglise. Nous n’allons plus aussi souvent à la Messe ni ne disons nos prières.

 

Vous eûtes vos saints (Ste Radegonde, St Médard) nous avons les nôtres… Certains sont même en cours de canonisation tel que : Mère Térésa, Le Pape Jean-Paul II.

 

Les prénoms ne sont plus Radegonde, Cunégonde, Clotaire etc… mais Mohamed, David, Zoé, Théo et bien d’autres plus ou moins courts.

 

Vous assassinâtes tous les chefs saliens et rhénans voisins, certains de vos anciens compagnons, et même certains membres de sa famille, même éloignés, afin de vous assurer que seuls vos fils héritent de votre royaume. En 490, vous entamez des offensives contre la Germanie rhénane et transrhénane. Vous rappelez-vous ? Malheureusement, cela se fait encore.

 

On tue aussi après avoir fait crac-crac boum-boum. Sont-ils stupides ces humains ….. ou pour un téléphone, vous savez ce truc qui a remplacé les messagers. Bref, parfois on tue pour rien du tout.

 

Nous ne prenons plus le cheval pour nous déplacer. Non, figurez-vous que je demeure près de Lutèce. Pour me déplacer, je dois rentrer dans une chenille qui roule vite : nous appelons cela le RER (en 3 lettres on a tout dit). D’autres prennent des voitures. Une voiture est une carrosserie qui tient debout sur 4 roues avec un moteur à essence (substance liquide qui fait rouler notre voiture). Il y a aussi de grandes et grosses chenilles qui nous mènent de Lutèce à Marseille.

 

Nous montons aussi dans le ciel pour aller loin, loin, loin mais parfois aussi près, près,  tout simplement en Gaule, devenue la France. A quoi cela ressemble-t-il ? Une saucisse avec un nez pointu. Cela s’appelle un avion. On monte là-dedans et hop quelques minutes après on vole à quelques 10 000 mètres d’altitude.

 

De ce fait, nous n’avons plus des chemins cabosseux mais de vraies routes cimentées (autre nouveauté de notre siècle). Pour cela, nous avons déforesté, déplacé des maisons, mais chut, tout cela est oublié… qui y pense encore ?

 

Au fait, il faut que je vous dise que Lutèce n’est plus Lutèce mais Paris avec 10 millions d’habitants.

 

Nous ne sommes plus un Royaume avec un roi tel que vous mais une République avec un Président que nous avons, nous français, élu. Il s’appelle Nicolas Sarkozy.

 

Qu’en pensez-vous, Majesté, Notre société est-elle meilleure que la vôtre, plus avancée, plus moderne ? ça oui probablement, mais plus humaine ….. J’aurais pu vous donner d’autres détails croustillants mais j’ai tellement peur de vous montrer combien nous sommes devenus fous que je m’arrêterais là.

 

J’espère, Majesté, ne pas vous avoir ennuyé par cette lettre qui vous vient d’une vivante et qui s’adresse à quelqu’un qui est dans l’Eternité depuis si longtemps mais en même temps qu’est-ce le temps lorsqu’on a l’Eternité.

 

Quand vous me verrez arriver le plus tard possible, malgré tout, bloquez-moi un rendez-vous dans votre agenda. J’aimerais tant discuter avec vous de deux ou trois bricoles.

 

Respectueusement vôtre.

 

PS : j’oubliais, si du haut de votre éternité, vous nous voyez commettre quelques graves erreurs, pourriez-vous nous arrêter discrètement ? Ou est-ce un vœux pieux ?

 

PS2 : Accordez-moi encore une minute, Majesté. Je voudrais de mon royaume des vivants, vous conseiller d’accueillir un grand artiste, Robert Lamoureux. Vous le trouverez sans nul doute, fin, cultivé et si drôle ; N’hésitez pas à le rencontrer. Il est parti hier vers votre royaume. [