répondent-elles à ce que nous en attendions ?
Nous avons tous approuvé la révolution Tunisienne par ce qu’elle s’est déroulée sans effusion de sang enfin presque, quelques morts tout au plus, eu égard à celles d’Égypte et plus encore en Libye. On la dénomme «la révolution de jasmin» par ce qu’elle fut non violente à la suite de sit-in pendant quatre semaines pour exiger le départ du président Ben Ali. Pour la Libye nous savons qu’il en est autrement , de nombreux morts, un pays dévasté et un président Mouammar Kadhafi assassiné, voir l’article Kadhafi la mort d’un tyran qui s’en est allé vers son destin. Pour l’Égypte nous attendons la suite pour juger, c’est à dire de connaître le régime qui sortira des urnes, mais nous ne devons pas nous faire d’illusions, il sera islamiste. Nous avons tous été pour soutenir ces «révolutions», et nous avons participé efficacement à celle de la Libye alors qu’elle n’était que formatée à Benghazy qui fut ensuite le berceau de la guerre civile Libyenne. Nous pensions tous à l’élimination de ces dictateurs qui restaient au pouvoir sans partage depuis des décennies, et le cri de leur peuple nous émut. L’aspiration de la liberté manifestée par ces jeunes femmes et hommes porteurs d’un espoir et qui portables en mains s’envoyaient des messages sur les réseaux sociaux tel facebook que l’on ne remerciera jamais assez, pour se regrouper en sit-in provoquant le gouvernement en place.
Le 14 janvier un drapeau à la main Ben Debba en train d’interpeller la foule devant le tout-puissant ministère de l’Intérieur, cette avocate Tunisienne, originaire de Sfax, est devenue une des icônes de la révolution. Son engagement pour la défense des libertés est chez elle une seconde nature. Cette révolution fut celle des femmes.
Beaucoup de femmes d’ailleurs, jeunes, instruites, diplômées, exaspérées de ne pas avoir de travail avec leur diplôme ont été aux avant postes pour clamer l’espoir d’une vie meilleure. L’expression «Ben Ali dégage» portée par les révolutionnaires Tunisiens fut reprise par les révolutionnaires des autres pays. Ce mot fut pour nous tout un symbole.
Nous ne pouvions ne pas soutenir ces révolutions, et espérions en l’établissement d’une démocratie laïque. Ce n’est pas le cas, si démocratie il y eu en Tunisie avec une forte majorité de votants c’est un régime islamiste qui rafla la mise avec le parti Ennahda lors de ces premières élections constituantes du 23 octobre 2011. Avec 41,47% des voix il obtint 90 sièges à l’Assemblée sur 217 sièges. Il n’a donc pas la majorité absolue et des alliances devront être faites pour gouverner. Le parti Ennahda signifiant Mouvement de la renaissance, Nadha en arabe, est présenté comme un parti modéré, s’engageant dans la démocratie pour tout le monde, et soulignant que 42 des 49 femmes élues au sein de l’Assemblée constituante étaient membre du parti. Ce parti a pour chef politique Rached Ghannouchi, une formation Coranique avec un diplôme de théologie et une licence de philosophie en 1968.
Document tiré de Wikipédia.
Longtemps dans la clandestinité, vivant à Londres depuis le début des années 1990, il y acquière le statut de réfugié politique. Il fit son retour en Tunisie en 2010-2011 pendant la révolution. Rached Gannouchi accueilli par une marée humaine le 30 janvier 2011.
Document Jeune Afrique, © Nicolas Fauqué/imagesdetunisie.com
Ennahda longtemps interdit sous le régime de Ben Ali, ses chefs furent arrêtés et condamnés à de lourdes peines de prison jusqu’à 20 ans et même à vie en 1991 et 1992. Les leaders qui le purent s’évadèrent en exil, la répression était forte, et le parti disparut de la vie politique Tunisienne. C’est dans la clandestinité que se forge habituellement les partis qui deviennent majoritaires lors d’élections par ce qu’ils n’ont finalement participés à aucune compromission avec le régime déchu.
En 1999, 600 détenus d’Ennahda bénéficièrent d’une grâce présidentielle en même temps que d’autres détenus politiques. En 2005, Ennahda participa avec le Parti démocrate progressiste, centre gauche, et le Parti communiste des ouvriers de Tunisie, gauche révolutionnaire, au mouvement du 18-Octobre qui fut une grève de la faim à Tunis de 8 personnalités politiques qui visaient la restauration des libertés civiles, de justice et de démocratie. Dans le cadre de ce mouvement qui devint une plateforme de l’opposition, les représentants d’Ennahda adoptèrent des positions en faveur de la liberté de culte, de l’égalité homme-femme et de la séparation de l’État et de la religion ainsi que le rejet des châtiments corporels. Une laïcité Tunisienne en quelque sorte. Le 5 novembre 2008, les 21 derniers prisonniers d’Ennahda bénéficièrent d’une libération conditionnelle. En 2009, Ennahda toujours interdit appela au boycott des élections présidentielles et législatives.
Après la révolution Ennahda fut légalisé le premier mars, et son secrétaire général Hamadi Jebali multiplia les déclarations. Frida Dahmani journaliste Tunisienne qui prit une part importante dans la révolution estima qu’Hamada Jebali esquivait les questions de la place de la charia dans le programme du parti tout en se montrant rassurée quant à la préservation des acquis des femmes, voir faut-il avoir peur des islamistes. Ennahda qui inquiète les partisans d’une démocratie libre et laïque. Ghannouchi déclare ainsi, «nous avons toujours dit que nous acceptions le Code du statut personnel, ainsi que toutes les dispositions sur l’égalité homme-femme».
Mais des slogans sur l’instauration de la charia contredisent les propos de Ghannouchi. Les dirigeants d’Ennahda, poussé par la crainte des Tunisiens et de l’Occident par références aux divisions en Palestine entre le Hamas et le Fatah, d’autant qu’un sondage en mars le place comme le parti le plus populaire avec 29 % des suffrages, devant le congrès pour la république CPR 13,82 %, fait que le porte parole du parti Samir Dilou déclare dans une interview,
«nous ne voulons pas une théocratie. Nous voulons un État démocratique qui se caractérise par l’idée de la liberté. Le peuple doit décider par lui-même comment il vit . Nous ne sommes pas un parti islamiste, nous sommes un parti islamique, qui obtient aussi sa direction par les principes du Coran».
Comme exemples, il cite la Turquie par idéologie de justice et de développement, la démocratie chrétienne en Italie, et en Allemagne. Il se dit finalement proche du parti Turc de Recep Tayyip Erdogan, centriste sur le plan social, modéré en faveur du libéralisme économique. Le parti rejette l’islamisme radical comme forme de gouvernance adaptée à la Tunisie. Rached Ghannouchi déclare ainsi lors d’un débat avec un adversaire laïc,
«pourquoi sommes-nous rapprochés d’un modèle qui est loin de notre pensée, comme les Talibans ou le modèle saoudien, alors qu’il existe d’autres modèles islamiques à succès qui sont proches de nous, comme les modèles Turc, Malaisien et Indonésien, des modèles qui combinent islam et modernité ?»
Ghannouchi soutien le droit des travailleurs et l’éducation des femmes et note que les femmes ne détenaient pas de facto de positions dirigeantes dans les gouvernements du président Zine el-Abidine Ben Ali et que c’est une «réalité» que peu de femmes sont aptes à les occuper.
On peut s’interroger de la faillite des partis progressistes aussi bien de gauche comme de droite, c’est qu’en fait, ils ne sont pas de purs partis Tunisiens. La formation des dirigeants est occidentale acquise dans les universités de l’hexagone parlant aussi bien le Français que l’arabe.
Le parti démocrate progressiste transfuge du Rassemblement de groupes socialistes marxistes à l’occasion de son congrès de juin 2001, étend ses bases idéologiques. En 2002, il conteste les modifications constitutionnelles soumises au référendum du 26 mai et qui autorisaient notamment le président Ben Ali à se présenter deux fois à l’élection présidentielle. Ahmed Néjib Chebbi fondateur du parti participe au mouvement du 18 octobre de la grève de la faim. En décembre 2006 la biologiste Maya Jribi devient secrétaire générale et ainsi la première femme à diriger un parti politique Tunisien. A l’élection présidentielle de 2009, Chebbi est le premier candidat à se déclarer dès le 12 février 2008, mais exigea une réforme du Code électoral pour supprimer notamment la clause sur le parrainage des candidats. Le parlement adopta un amendement constitutionnel exceptionnel qui supprima cette condition de parrainage, mais restreignit «la possibilité de dépôt de candidature à la présidence de la république au premier responsable de chaque parti», ce qui écarta donc Chebbi. Le comité central du PDP réuni les 8 et 9 novembre décida par 39 voix contre 16 que la candidature de Chebbi était maintenue. Sous le règne de Ben Ali, le PDP était le seul parti d’opposition reconnu, et ce parti n’arrive qu’en cinquième position a l’élection de l’Assemblée constituante avec 17 sièges. On pourrait dire que son idéologie trop pro-occidentale n’a pas pénétré les profondeurs du pays ou l’on est arabe, ou l’on y fait ses prières ou les femmes travaillent les champs pour les besoins de la famille ou l’homme, le seigneur, tue son temps avec d’autres.
A la suite de la chute de Ben Ali 104 partis non reconnus furent légalisés qui sont venus s’ajouter aux 8 partis autorisés sous Ben Ali. C’est donc 112 partis qui furent présents sur les listes électorales. Un tel choix conduisit bien entendu à une grande dispersion des voix. Le congrès pour la république CPR, légalisé de centre gauche le 8 mars 2011, arrive second et emporte 30 sièges avec 13,82 % des voix. Le parti Ettakatol FDTL, Forum Démocratique pour le Travail et les Libertés, social démocrate du docteur Mustapha Ben Jaafar légalisé le 25 octobre 2002 arrive troisième avec 21 sièges pour 9,68 % des voix. Le parti des conservateurs progressistes PCP islamiste réformiste de Hechmi Hamdi qui est une scission du mouvement Ennahda légalisé le 15 juillet 2011 prend la quatrième place avec 19 sièges.
La Tunisie vient de faire ses premiers pas dans la démocratie, il faut attendre, beaucoup de promesses ont été dites concernant les femmes et un islamisme modéré. Mais nous savons déjà que les femmes «ne» sont aptes à diriger. Il eut été étonnant du contraire d’un parti islamique. Il est certain que si la Tunisie veut se développer, il faudra qu’elle consente au maintien de son ouverture occidentale ne serait-ce que pour le tourisme source importante de revenus. Quant au travail des diplômés(ées) qui ont été le fer de lance de la révolution, il faudra réunir beaucoup de conditions pour que tous trouvent un travail en rapport a leur diplôme. Il est plus aisé d’apprendre que de travailler.
Le prochain article sera, François Hollande et le parti socialiste que l’on n’entend pas.
[i]La Tunisie vient de faire ses premiers pas dans la démocratie, il faut attendre…[/i]
Oui, attendons, n’avons pas le choix. Il faudra des années avec des hauts et des bas !
La démocratie est un chemin difficile et plein d’embûches.
[i]La Tunisie vient de faire ses premiers pas dans la démocratie,
il faut attendre…[/i]
Environ 8.000 salafistes ont défilé dimanche dans le centre
de la capitale tunisienne pour demander l’instauration d’un
Etat islamique dans le pays …