C’est en essayant de casser une pince de crabe lors du réveillon que je me suis faite la reflexion suivante. LA VIE EST UN PANIER DE CRABES, et pour reprendre les termes d’un héros bien connu, la vie c’est aussi une boîte de chocolats, on ne sait jamais sur quoi on va tomber…
En bref, on peut se retrouver un jour au travail à rire de tout avec ses collègues et se retrouver le lendemain sur un lit d’hôpital à attendre juste l’heure des repas, et de la distribution des médicaments. Sans effets personnels, avec cette blouse affreuse qui vous humilie, ce bracelet infâme qui fait à la fois penser aux boîtes de nuit et à la fois aux institutions spécialisées qui estampillent leurs patients afin de les retrouver facilement s’ils s’échappaient. Personnellement, avec mes électrodes et tous ces machins qu’on m’avait planté dans les veines je n’aurais pas pris d’avion pour Vegas…Mais bon, plus d’affaires, et surtout, plus de repères, à la veille de Noël…Voilà pour quelles raisons en gros, j’ai tardé à regarder mes messages, et je puis vous assurer que la récompense qui m’a été décernée était sans conteste l’une des plus belles surprises de Noël, ce qui confirme ce que je disais dans un article précédent, on se sent chez soi ici, et ça m’a manqué de ne pouvoir écrire.
Donc, nécessairement, en ce bon matin du 27 décembre, je vais deviser d’un sujet qui m’a émue ,non seulement parce que ce n’est pas le premier séjour que je fais dans un hopital, certes, mais qu’à chacune de mes "visites", les mêmes choses m’ont heurtées .
Nous sommes certes en période de fêtes, période importante pour certains, triste pour d’autres qui ont perdu la foi parce qu’un de leur proche a disparu à cette époque et qu’ils n’arrivent pas à essayer de rendre ces moments bien plus beaux que ce qu’ils sont devenus. On me disait quand j’étais toute gamine, on n’a rien sans rien, et c’est exact. Seulement voilà, les hostos, personne n’aime. Il y a une odeur nauséabonde qui titille les narines, cette odeur de mort, de maladie, ces portes ouvertes sur des gens déments, qui crient la nuit, ou des personnes sous respirateurs artificiels, il y a toujours un homme ou une femme qui se donne un mal fou juste pour trimbaler cettte perfusion qui leur empoisonne la vie, parce qu’il roule mal, qu’il se coince, et pour les femmes, est humiliant si l’on n’a pas pigé comment retirer son soutif pour aller prendre sa douche et que l’on est obligées d’appeler une aide soignante pour nous aider.
La première voisine qui a partagé ma chambre m’a touchée. Maria…Une femme d’un certain âge, qui n’avait que peu de famille, pas d’enfant et que la vie avait gâchée par divers maux qui la contraignaient à venir se faire transfuser deux fois dans le mois. Première fois que j’assistais à une telle opération, des culots et des culots de sang injectés dans ce petit corps dicté par un cerveau devenu maniaque tant elle connaissait toutes les chambres. Sa seule famille, c’était les autres patients et l’équipe de soins. Elle avait besoin de parler, surtout une fois sa poche rouge greffée à son bras.
Puis il y a eu Flore, une petite dame de l’âge de l’une de mes grands mères, 6 enfants, 9 petits enfants, qui lorgnait mes peluches (ben ouais ya pas d’âge ). Une partie de sa famille en province, de grandes difficultés à respirer…Elle a eu de la visite, certes, mais ce qu’elle m’a montré d’elle surpassait tout ce qu’elle a pu donner à ses visiteurs.C’était un moineau, un pigeonneau parisien, qui aux dernières nouvelles n’a pu passer son Noël avec ses petits. Je gage qu’elle a du avoir du monde ce jour là, mais l’odeur du sapin, les jolies couleurs de Noël, alors qu’elle peinait déjà à s’alimenter seule, ça m’a tué le coeur…De savoir qu’elle ne serait pas là ce jour là, qu’elle serait recroquevillée dans son mauvais lit avec ses fumigations, j’y ai pensé, vraiment…
Et surtout, j’ai pensé à ce monsieur alcolo dépendant qui rentrait dans n’importe quelle chambre pour se coucher dans ce qu’il pensait être dans son lit, cet homme ivre, certes (mais qui devait avoir ses raisons de l’être), tombé trois fois de son lit , ces autres personnes croisées chaque fois que je descendais me griller une cibiche, perf au bout de la laisse, (il faut bien finir par l’apprivoiser si on veut guérir), ces personnes sans visite, sans vêtements, sans brosse à dents et surtout sans personne pour leur en apporter. Les histoires de famille je ne souhaite pas m’en mêler, le message que je voudrais transmettre aujourd’hui, de si bon matin, c’est que si vous avez dans vos proches (terme qui a trouvé son sens lorsque je me suis retrouvée là bas), ne les oublions pas. Nous avons les mêmes reflexes qu’un caniche ou un chat. L’odeur du véto nous rend agressif, l’odeur du chenil nous fait baver, et couiner. Nous sommes des animaux soit disant plus évolués (tout dépend desquels mais cette affirmation ne regarde que moi).
Il existe des asso qui vont livrer des cadeaux aux bambins leucémiques le soir de Noël, pour faire la lecture à celles qui peuvent encore rêver, mais qui ont l’angoisse de l’opération de la cataracte.Moi, le soir de Noël, alors que je devais me reposer, je l’ai passé chez ma mère, et tout ce qui habitait mon esprit fragilisé par tant de misère, c’était les cris du monsieur qui appelait dans son déliririum tremuns (désolée pour l’orthographe), tous les membres de sa famille , ou les courses poursuites entre aides soignantes de nuit qui renvoyaient aux urgences un homme visiblement décédé.
Ne les laissons pas, qu’ils soient jeunes, vieux, que leur maladie soit de leur propre fait (addiction), ou que ce soit pour une toute autre raison, le psychique est une grande partie de la guérison.Il faut aller les voire même si ce n’est pas une synécure, ils ont besoin de tendresse.Quand je suis partie Flore a pleuré en me demandant qui allait s’occuper d’elle a présent…
On ne va pas au commissariat par pur bonheur, on ne va pas travailler non plus parce qu’on ADOOOOOOOOOOORRRRRRRRRRREEEEEEEEEEE son taf…. Mais ça, il faut le faire, une personne hospitalisée a besoin de voir des visages familiers.
Reste à penser de me renseigner sur celles qui interviennent dans mon secteur.D’ici là, j’aurais repris les 8 kg que j’ai perdus!!
Dernière chose…je suis allée travailler aujourd’hui, et ça m’a fait un bien énorme, alors occupez vous la tête, le reste suivra!
BONNES FETES et ne les oubliez pas
bonjour Aube, votre récit est tout bonnement bouleversant… j’ai connue la tristesse des nuits sans sommeil dans ces fichus hôpitaux, on n’en ressort pas indemne, on garde en mémoire les soutiens et surtout les oublis… En cette fin d’année, mes pensées accompagneront les vôtres pour ces personnes, ces grands oubliés…
Bien à vous et bon rétablissement !
Guylaine.
Bonsoir Aube,
Un article très touchant.
J’espère que tout cela n’est plus qu’un mauvais souvenir pour vous.
Vous m’avez fait repenser à ma maman qui a été hospitalisée l’année dernière, le jour de Noël. Elle qui est très croyante et qui s’est battue toute sa vie, pour la dignité humaine, s’est retrouvée dans les situations humiliantes que vous décrivez très justement. Certes, elle était très bien entourée par sa famille et ses amis. Certaines personnes du corps médical, se sont comportées de manière très humaine et très professionnelle. Malheureusement, il y avait aussi quelque-unes qui étaient très méprisantes. Alors un grand coup de chapeau à ce personnel dévoué et aux visiteurs de malades.
Je vous souhaite également un bon rétablissement!