Après plusieurs années dans l’enseignement, aussi bien pour l’Education Nationale que pour des centres de soutien scolaire, on ne peut que constater les ravages des méthodes modernes sur l’apprentissage des fondamentaux.

Parmi eux, les connaissances de base en géométrie sont abandonnées. Alors qu’il y a une vingtaine d’année, on apprenait dès le CE les noms des différents triangles et leurs propriétés, maintenant un élève de première S sait à peine ce qu’est un triangle équilatéral !

En primaire, la géométrie se limite le plus souvent à tracer des droites parallèles et perpendiculaires et à reconnaître quelques figures géométriques simples. Certain(e)s instituteurs/trices essaient d’apprendre aux élèves les formules pour calculer l’aire et le périmètre des figures simples, mais les élèves étant devenus incapables d’apprendre puis d’appliquer, le résultat est assez catastrophique.

La tendance actuelle est que les élèves doivent comprendre plutôt qu’apprendre. L’apprentissage se fait par la découverte car l’élève doit être "actif". Des mots, des belles théories qui font que dès leur plus jeune âge, on met dans la tête des élèves qu’apprendre ne sert à rien, que c’est idiot et stupide. Donc les élèves ne font plus aucun effort pour apprendre.

En effet, il ne faut pas apprendre bêtement et répéter des phrases sans mettre de sens derrière. Mais de là à dire qu’il ne faut plus apprendre, il y a un fossé énorme qu’on franchit pourtant d’un bond. Or, en géométrie, il y a énormément de choses à apprendre avant de pouvoir comprendre et faire les exercices. Au collège, les élèves qui ont ainsi perdu l’habitude d’apprendre sont donc totalement noyés dès qu’il s’agit de faire un peu de géométrie.

C’est très regrettable car l’intérêt de la géométrie est de développer les capacités de raisonnement. Cela permet aussi de vérifier les capacités à voir dans l’espace. La géométrie permet de faire des démonstrations, d’apprendre la rigueur et de pouvoir reproduire ces méthodes dans d’autres matières aussi bien littéraires que scientifiques.

Mais on fait de moins en moins de démonstrations au collège. Quand certaines classes s’y essaient, c’est de manière confuse et peu rigoureuse en perdant de vue la marche à suivre. On n’expliqueplus aux élèves qu’ils doivent faire le tri dans leurs connaissances pour trouver les éléments utiles qui conduiront à la solution par un enchaînement logique. On préfère tenter de leur faire découvrir des propriétés que leurs jeunes esprits ne peuvent aucunement concevoir, ce qui conduit régulièrement à leur mettre des fausses règles dans la tête car un collégien auquel on doit faire deviner un théorème va s’imaginer plein de choses parfois très loin de ce qu’il faudrait. Mais c’est surtout ça qu’il risque de garder en tête !

Certains professeurs optent pour une solution de facilité et minimaliste qui consiste à ne faire que des bouts de démonstration, sans aucune rigueur, qui tombent un peu comme un cheveu sur la soupe. Les élèves n’y comprennent pas grand chose et appiquent bêtement des méthodes toutes faites qui ne fonctionnent que dans les exercices qu’on leur propose, mais comme ils ne font rien d’autres cela passe.

Ces élèves arrivent ensuite au lycée. La réforme ayant épuré les programmes de la géométrie, ils en font encore moins qu’avant. N’ayant jamais pu trop s’exercer aux démonstrations, même l’algèbre leur paraît compliqué. Surtout qu’on leur donne l’habitude d’utiliser leur calculatrice dès qu’un calcul devient un peu compliqué. Là encore, il ne faut SURTOUT PAS les inciter à réfléchir. Ce n’est pas bon pour leur développement, d’après les têtes bien pensantes qui se penchent sur les programmes et les méthodes d’apprentissage.

Cependant le monde devient de plus en plus complexe et la géométrie y tient encore une place importante. Comment former des architectes compétents ou des ingénieurs quand on ne va leur faire faire réellement de la géométrie qu’après le bac ?  Que vont donner ces générations d’enfants qui n’ont plus l’habitude de réfléchir, donc qui ne développent aucun esprit critique ni même une once de curiosité intellectuelle ? Même les établissements réputés pour leur niveau d’exigence élevé voient la qualité de leur enseignement se dégrader à cause de la baisse flagrante des capacités des élèves.

Ce n’est pas en formant des professeurs avec les méthodes modernes qui consistent à leur bourrer la cervelle de termes et de théories inutiles sur le récepteur actif, l’apprenant, l’enseigné, tout un charabia qui impressionne les foules mais qui risque fort de conduire à former des générations de travailleurs incompétents qui vont s’enfoncer dans la misère.

Qu’on redonne à la géométrie ses lettres de noblesses et qu’on en fasse plus dès le primaire, ce qui permettra de stimuler un peu la jeunesse !