LES GARÇONS ET GUILLAUME, À TABLE !

Réalisateur : Guillaume GALLIENNE

Sortie : 2013

 

 

 

PREMIÈRE : Le film « a la grâce comique et la justesse des premiers Woody Allen ».

L’HUMANITÉ : « Une comédie décomplexée, vive et intelligente qui aborde de front le sujet de l’identité ».

LES INROCKS « Le film réussit le mariage du rire et de l’émotion, du progressisme et de l’universel, rapproche la marge du centre en abordant des questions lourdes de façon légère ».

  L’Ingénu est une œuvre de Voltaire, étiquetée généralement comme conte ou roman philosophique. Voltaire y raconte les aventures d’un Huron (« l’Ingénu ») qui regarde la vie française avec candeur et naïveté, il est engagé dans une histoire d’amour, se trouve confronté à de multiples difficultés. Nouveau Huron, Guillaume Gallienne nous offre la panoplie du petit bricoleur de sketches, des sketches plus ou moins agencés pour former un ensemble qui se voudrait cohérent et interprétatif de sa soi-disant identité féminine. Les ficelles les plus grosses suturent les différents moments —en voix off— à la gloire d’une mère qu’il interprète montrant par ce faire son aliénation totale à cette figure dans une identification primaire assumée.


Pourquoi la communauté homosexuelle a-t-elle encensé ce film dont la conclusion hétérosexuelle est d’une bêtise sans nom ? Comment peut-on comprendre que toute la représentation de la difficulté d’être vécue en tant que fille aboutisse à cette pseudo découverte d’une masculinité mise à mal et surtout d’un mariage qui viendrait prouver l’hétérosexualité du personnage. L’acteur, outre qu’il joue les benêts, nous prend pour des benêts.


Alors que l’obtention des droits égaux a été une affaire conflictuelle montrant la régression stupide d’une France attardée, le film survient tel un miracle de restauration sexuelle à faire se pâmer les partisans de la manifestation pour tous ou ceux de la thérapie par aversion. Le film pianote dans les bons sentiments et pour faire plaisir à maman, on avale toute cette sottise cuillérée après cuillerée.


Ce refus d’aller dans le sens d’une orientation homosexuelle alors que tout y conduit, conforte la norme hétérosexuelle, induit une réassurance de façade qui survient comme un cheveu sur la soupe à propos de la maîtrise du cheval sur l’aire du manège. La plus noble conquête de l’homme lui apporte une virilité de pacotille, tente de leurrer le spectateur, de le bourrer comme un chou d’une crème normative et de masquer le sens véritablement stéréotypé de cette orientation de traverse.


Le psychologisme le plus éculé et le plus tendance surgit dans le film lorsque le psychanalyste —qui n’en est pas un— lui demande pourquoi il ne s’aime pas. Curieuse idéologie qui part du principe que pour aimer, il faut s’aimer. Mais que fait Guillaume Gallienne tout au long du film sinon un exercice de narcissisme débridé ?


La représentation des homosexuels dans ce film est à l’image des idées reçues et des fantasmes pétrifiés d’une majorité de pingouins analphabètes : trois arabes de banlieue qui le rabaissent en tant que pute, un bellâtre magnifique qui le terrorise par sa musculature d’étalon. D’où l’on apprend, ex abrupto qu’il a la phobie des chevaux. Serait-ce une réminiscence du petit Hans ? La seule fois où il sera sodomisé, ce sera par une canule, une pompe aspirante et refoulante, manipulée par une femme, bel ersatz du phallus et de la mère phallique !


Le travelling sur le parterre de la Comédie Française rappelle évidemment qu’il fait partie de la maison, ce référent le dote d’une valeur apparemment sure. Le portrait de la véritable mère dans les premiers rangs renvoie son rôle à un  simulacre. Quant à l’interprétation de la fin, elle intervient comme une imposture, maman l’aurait investi en tant que fille pour ne pas être seule et l’aurait empêché de se séparer d’elle. Le tour de passe-passe apparaît grotesque.


Xavier Dolan avait réalisé un film autrement plus dynamique et roboratif avec J’ai tué ma mère. Le spectateur y assiste à la naissance d’un poète, d’un amour homosexuel et à l’affirmation d’une vérité de l’être qui est d’une autre étoffe que le papier crépon de Guillaume Galienne, fût-il paré du rose de l’innocence falsifiée.