Comment définir les élites ?

Cela est très subjectif. Les diplômes ? Mais notre société regorge d’idiots instruits !
Le fric ? Alors vive les traders, banksters et autres escrocs de haut vol !
Le pouvoir ? Local ? Régional ? National ? Au delà des frontières ? Jusqu’à la confrérie des dictateurs ?
Les média ? Plus personne ne fait confiance à cette corporation qui songe moins à informer qu’à déformer selon ses intérêts.
Le savoir ? Mais le propre de la science est d’être perpétuellement remise en question. Les références d’hier seront ringardes demain. Et puis… Il suffit d’une révolution, populaire ou épistémologique qu’importe, voire d’une simple crise contingente pour qu’on retrouve le bas en haut et vice versa. Et les élites cul par dessus tête.
Reste la créativité dans l’art. Mais où s’arrêtent les simples effets de mode et les délires prémédités afin d’impressionner les gogos ?

Etre autiste et mégalo ?

Comment être élitiste sans toiser les autres du haut d’une prétendue supériorité dont les fleurs vénéneuses plongent leurs racines dans des sables mouvants ? Et de ce fait sans se couper du monde réel ?
L’élitisme est un cocktail instable comportant à diverses doses un peu de mégalomanie, un zeste de morgue, une goutte de suffisance et un soupçon d’égotisme hypertrophié.
Cela fait le fonds de commerce d’une oligarchie qui se partage les prébendes, justifie les castes les plus rigides, l’autisme des classes sociales les plus fermées, des clubs privés voire des sectes ou des gangs (tout dépend de l’environnement de référence). Autant d’illusions partagées par un groupe qui se croit meilleur que les autres, sinon supérieur au monde entier.
Ici s’entr’ouvre l’antichambre du racisme et de l’impérialisme.

Surtout, à l’aune de quels critères pourrait-on vérifier la légitimité des élites, mesurer leur nocivité ou leur apport positif à la société, sur quelles valeurs va-t-on déterminer ce qui est bien pour la collectivité, et utile pour tirer le plus grand nombre vers le haut ?
Est-on sûr qu’au delà des avantages matériels, les "heureux promus" apprécieront de devoir faire des efforts et s’impliquer pour se hisser à ce que d’aucuns qualifieront de "bon niveau" ? Quand vous entendez "Auguste" ne pensez-vous pas plus clown qu’empereur ?

Est-il souhaitable de faire partie des élites ?
Est-ce un sort enviable de jouer toujours au premier de la classe limite autiste asperger, avant de devenir le porte-manteau d’une vêture aussi dérisoire qu’artificielle, qui vous coupera de la vraie vie ? Qui vous obligera à faire semblant d’adhérer aux paradigmes de vieilles lunes décomposées afin de préserver votre statut ? Au détriment de vos goûts et aspirations, au risque de perdre votre âme en vous transformant en sournois renégat ou en frustré honteux !
Il y a dans nos société des élites peu enviables, subissant un stress permanent sachant que le moindre faux pas peut les renvoyer dans l’ombre, et donc contraintes de renouveler quotidiennement leur allégeance à l’ordre établi et à la bien-pensance du moment, pour rester dans une lumière qui les aveugle. Piètres marionnettes éblouies par leurs cerbères.

Dès lors, on peut se poser cette question inquiétante : l’auto-proclamation élitiste par un groupe dominant (ou par tout groupe révolutionnaire aspirant à dominer à son tour) n’est-elle, comme le droit, la religion, le beau, la complaisance médiatique, les bonnes moeurs et le politiquement correct, liste non exhaustive, une manoeuvre simple et efficace pour légitimer et pérenniser son pouvoir ?
Et dont le corollaire serait une aliénation des dominés, au sens sartrien du terme, en faisant adhérer volens nolens les soumis aux principes des soumettants, les exploités aux valeurs des exploiteurs et les victimes au pouvoir de leurs bourreaux ?
Accepter l’élitisme sans révolte, c’est quelque part donner sans le savoir dans le syndrome de Stockholm.