L’ennemi de la classe, le film de Rok Bicek

 

Ce drame psychologique inspiré d’une expérience vécue par le réalisateur Rok Bicek débute avec le remplacement d’un professeur  principal femme du genre décontracté par un homme d’une toute autre trempe. Robert Zupan, (Igor Samobor), est un nostalgique des méthodes d’antan où la discipline faisait partie intégrante de l’arsenal éducatif, où l’on ne badinait pas avec certains principes, où les élèves se levaient à l’entrée du professeur… La confrontation ne sera pas de tout repos entre ce professeur rigide et ces élèves moqueurs qui n’ont de respect ni pour l’autorité, ni pour tout ce qui de loin ou de près se rapporte à tous ces codes moraux, vestimentaires ou autres, tombés en désuétude. 

Le courant peinera à passer et ne fera que s’envenimer avec  le suicide d’une élève, Sabina. Une fronde explosera conduite par ces "tyrans" de lycéens endeuillés pour lesquels reprise des cours rime avec oubli de Sabina. A partir de rumeurs, le prof, bouc émissaire de service, se verra trainé dans la boue avec à son encontre des supputations allant de nazi à pédophile.  Contre cette logique émotionnelle, Robert Zupan au flegme incomparable n’opposera que sa logique cartésienne puisée sans doute dans la lecture de son auteur fétiche, Thomas Mann. 

Une véritable plongée au coeur des coulisses d’un lycée, au cours de laquelle le réalisateur tentera, d’explorer ces mécanismes complexes qui sous tendent  les dynamiques de groupe, de décrypter les rouages des failles dans ce haut lieu d’apprentissage, ce laboratoire phare en perpétuelle ébullition où les innovations se font parfois au détriment de cobayes. Des dénonciations des travers du système mais aussi un regard bienveillant porté sur ces éducateurs dévoués comme sur ce prof d’allemand à la fois exigeant et brillant mais doté d’une approche pédagogique déphasée par rapport à l’air du temps. 

La mise en scène de ce film d’une grande sobriété fait la part belle à l’expressivité de ces visages captés toujours en gros plan. Surtout à celle du taciturne Robert Zupan le principal interprète au visage de marbre que de fugaces expressions viennent trahir, malgré un maintien à toutes épreuves. Bien joué, bien monté, ce film slovène au propos universel et d’une actualité brûlante mérite le déplacement … 

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