Le Volcan Taupo en Nouvelle Zélande

 

Un supervolcan est un volcan capable de produire les éruptions les plus considérables et les plus volumineuses et d’expulser un volume d’éjectas(1) et de matériaux pyroclastiques supérieur, d’après les normes édictées par l’United States Geological Survey, – USGS -, à 1.000 kilomètres cubes de pierre ponce et de cendres en une seule explosion, – cinquante fois le volume de l’éruption du Krakatoa, 27 août 1883, en Indonésie, qui tua plus de 36.000 personnes – : « Les volcans forment des montagnes, les supervolcans les détruisent. Les volcans tuent plantes et animaux à des kilomètres à la ronde, les supervolcans menacent d’extinction des espèces entières en provoquant des changements climatiques à l’échelle planétaire. ».

 

En simple comparaison, les éruptions explosives les plus importantes, au cours des temps historiques ont rarement dépassé 10 kilomètres cubes, exceptées :

– Celle du Pinatubo, dans le nord des Philippines et dans l’ouest de l’île de Luçon, le 15 juin 1991, les éjectas s’élevant à une altitude de 34 kilomètres et les nuées ardentes déferlant sur une distance de plus de seize kilomètres durant le paroxysme qui a duré trois heures. Cette éruption plinienne a éjecté 10 kilomètres cubes de matière, soit dix fois la quantité de matière rejetée par le mont Saint Helens en 1980. L’indice d’explosivité volcanique de cette éruption colossale est estimé à 6 sur une échelle de 8 soit aussi puissante que l’éruption du Krakatoa en 1883. Le sommet du volcan décapité est remplacé par une caldeira de 2,5 kilomètres de diamètre. Le point le plus élevé du bord de la caldeira culmine à présent à 1.485 mètres d’altitude soit 260 mètres de moins que le sommet primitif. Cette éruption volcanique, provoquant un refroidissement général de 0,6° C, a généré un bouleversement climatique à l’échelle planétaire pendant trois ans.

– Celle du Novarupta, aux États-Unis, dans le Sud-Ouest de l’Alaska, du 06 au 08 Juin 1912, une éruption d’indice d’explosivité volcanique de 6, au cours de laquelle une surge volcanique(2) s’est formée, expulsant un volume de lave estimé entre 13 et 15 kilomètres cubes, – 30 fois le volume de magma que l’ éruption de 1980 du Mont St. Helens -, et 28 kilomètres cubes de téphras. L’expulsion d’un tel volume de magma a creusé un évent en forme d’entonnoir de 2 kilomètres de diamètre et elle a déclenché l’effondrement du mont Katmai, un volcan éloigné de 10 kilomètres, formant une caldeira sommitale de 600 mètres de profondeur et d’environ 3 kilomètres de diamètre. En outre, elle a produit des coulées pyroclastiques qui ont tout balayé, sur environ 21 kilomètres, en aval de la vallée supérieure du fleuve Ukak, la vallée « des Dix Mille Fumées. » L’épaisseur des dépôts d’ignimbrite, de pierre ponce et de cendres a été évalué à 200 mètres d’épaisseur.

– Celle du Tambora, un stratovolcan formant la péninsule de Sanggar de l’île de Sumbawa, en Indonésie, des 5 avril lors d’une première éruption donnant une colonne éruptive de 33 kilomètres de hauteur pendant 33 heures, et 10 avril 1815 ponctué par une explosion paroxysmale, indice d’explosivité volcanique 7 équivalent à une explosion 800 mégatonnes, – environ quatre fois l’énergie libérée par l’éruption du Krakatoa, d’indice d’explosivité volcanique 6, en 1883 -, déclenchant, sur une durée de 3 heures, une colonne éruptive s’élevant à 44 kilomètres d’altitude suivie d’une pluie de ponce sur le village de Sanggar, situé 30 kilomètres à l’Est de l’édifice volcanique. Trois colonnes de flamme se sont dressées et ont fusionné. Toute la montagne a été transformée en une masse fluide de « feu liquide. » Environ 160 kilomètres cubes de trachyandésite, laissant une caldeira de 6 à 7 kilomètres de diamètre et de 600 à 700 mètres de profondeur, ont été éjectés. Avant l’explosion, le Mont Tambora culminait à près de 4.300 mètres, – l‘un des plus hauts sommets dans l’archipel indonésien -, mais après l’explosion, entendue à plus de 2.600 kilomètres à la ronde, il ne mesurait plus que 2.851 mètres. En 1816, les moyennes des températures dans l’hémisphère nord ont chuté de 0,5° C à plus de 1° C et l’été, « The year without a summer », – une année sans été -, a été froid et pluvieux aux États-Unis et en Europe, avec pour conséquences des récoltes désastreuses à l’origine de famines. Des cendres sont tombées jusqu’à 1.300 kilomètres de distance et, dans un rayon de 600 kilomètres autour du bâtit volcanique, l’obscurité s’est installée durant deux jours.

– Celle du Krakatoa, dans le détroit de la Sonde entre les îles de Sumatra et de Java, en Indonésie, des 26 Août se concrétisant par une explosion accompagnée de projections d’éjectas, propulsés à plus de vingt-sept kilomètres d’altitude, dont une autre partie retombant dans un rayon de 160 kilomètres autour du volcan, et plongeant la région dans une nuit totale, et 27 août 1883, une des plus violentes de mémoire d’homme, avec la survenance d’une explosion effroyable, audible dans toutes les Indes mais aussi en Australie et sur l’île de Rodrigues, à 3.500 et à 4.800 kilomètres du Krakatoa, détruisant presque entièrement l’île. Le panache de cendres volcaniques est monté à quatre-vingts kilomètres dans l’atmosphère. L’éruption plinienne, développant une énergie correspondant à 13.000 Bombe A, atteint l’indice d’explosivité volcanique 6, expulse 21 kilomètres cubes de matériaux pyroclastiques, de roches, de tephras et de pierre ponce, et forme une caldeira sous-marine de 7 kilomètres de diamètre. Une pluie de cendres chaudes, due à une déflagration latérale ou à une nuée ardente au raz de l’eau similaire à celles de la Montagne Pelée en 1902 et du Mont Saint Helens en 1980, s’est abattue autour de Ketimbang, sur l’île de Sumatra. Le panache de cendres volcaniques a répandu suffisamment de particules pour abaisser la température mondiale moyenne de 0,25° C l’année suivante, avec une amplitude allant d’approximativement 0,18 à 1,3° C. Les modèles climatiques ont continué à être chaotiques durant quelques années, et les températures ne sont revenues à la normale qu’après 1888.

– Celle du Krakatoa, en 338 de l’ère Saka, – 416 du calendrier grégorien -, ou en 535, relatée par le Pararaton ou « Livre des Rois », une chronique javanaise écrite au XVIe siècle : « Un son tonitruant était entendu depuis la montagne Batuwara … un bruit similaire depuis Kapi … la terre entière était puissamment secouée et de violents éclairs, accompagnés d’une lourde pluie et d’orages, se déroulaient, mais non seulement cette lourde pluie n’éteignait pas le feu sur la montagne Kapi, mais au contraire l’augmentait ; le bruit était effrayant, au final la montagne Kapi dans un formidable rugissement explosa en morceaux et coula dans les profondeurs de la terre. L’eau de la mer remonta et inonda la côte, la région à l’est de la montagne Batuwara, jusqu’à la montagne Raja Basa ; les habitants de la partie nord du pays de la Sonde vers la montagne Raja Basa ont été noyés et emportés avec tous leurs biens. L’eau s’apaisa mais la région où se situait Kapi fut remplacée par la mer, et Java et Sumatra furent séparées en deux parties. » La puissance de cette éruption a été estimée à environ 400 mégatonnes de TNT, – 20.000 fois la puissance de la bombe d’Hiroshima -. A cette époque, le Proto-Krakatau occupait l’actuel détroit de la Sonde. L’immense éruption, correspondant à l’éjection de 200 kilomètres cubes d’éjectas, aurait laissé une caldeira de 50 kilomètres de diamètre, l’actuel détroit séparant les deux îles de Java et Sumatra. Les retombées de l’éruption auraient obscurci la totalité de la Terre durant au moins deux ans à partir de cette date. Cette éruption aurait rejeté une telle quantité de poussière, d’eau, de soufre et un hiver volcanique, détruisant les récoltes et conduisant à la famine, aurait perduré durant plusieurs années

– Celle du lac-volcan Taupo, au centre de l ‘Île du Nord, en Nouvelle-Zélande, en 230 avant Jésus-Christ(3), qui aurait vidé le lac. Une nuée ardente aurait répandu des cendres volcaniques sur environ 20.000 kilomètres carrés. Plus de 120 kilomètres cubes de matériaux aurait été éjecté et auraient entrainé des phénomènes météorologiques particuliers, en Europe et en Chine, documentés dans le « Livre des Han postérieurs. »

– Et celle du Santorin, île de Grèce située en Mer Égée, en 1610 avant Jésus-Christ. L’éruption a projeté des pierres ponces et des cendres, sur environ 60 mètres d’épaisseur, tout autour du volcan et jusqu’à 900 kilomètres au Sud et aurait créé un panache de cendres qui se serait élevé à près de 30 kilomètres d’altitude. Le volume de ponces éjecté lors de cette explosion est estimé à 30 kilomètres cubes. La physionomie de l’île a été profondément modifiée suite à l’effondrement d’une grande partie du cône volcanique donnant naissance à une caldeira de 15 kilomètres de diamètre.

Les Supervolcans prennent naissance lors de la remontée du magma vers la surface, dans un hotspot, – point chaud -, et, incapable de percer la croûte terrestre, reste stocké dans des réservoirs  Lors, une importante et croissante pression s’accumule dans la chambre magmatique jusqu’à ce que la croûte, dans l’impossibilité de persister à la contenir, ne se rompe brutalement. Ils peuvent également se former aux limites des plaques convergentes, – le Campi Flegrei et le Toba -, et dans le cadre de hotspots continentaux, – Yellowstone -. L’intensité des explosions qu’ils produisent, varie mais elle est suffisante pour créer des dommages considérables à l’échelle d’un continent et avoir des effets sévères ou cataclysmiques pour le climat et la vie sur Terre. Les plus récentes explosions répertoriées de « supervolcans » datent :

– pour celle de l’Oruanui Taupo, en Nouvelle Zélande, d’environ 26.500 ans, éjectant plus de 1.000 kilomètres cubes de téphras, 320 kilomètres cubes d’ignimbrite, 530 kilomètres cubes de magma, et atteignant l’indice d’explosivité volcanique 8,

– et pour celle du Campi Flegrei, – le Paléo-Archiflegreo -, en Italie, d’environ 42 à 39.000 ans, Indice d’Explosivité Volcanique 8, un cataclysme vulcanien éjectant environ 350 à 500 kilomètres cubes de magma trachytique, 900 à 1.000 kilomètres cubes de téphras et de pyroclastes et 500 kilomètres cubes d’ignimbrite Campanien couvrant une vaste zone, – 30.000 kilomètres carrés -, de la Méditerranée centrale.

Huit supervolcans ayant explosé au cours des systèmes néogène, – 23,03 à 2,588 millions d’années -, et Quaternaire, – 2,588 millions d’années à nos jours -, sont connus et répertoriés : le Yellowstone, le Long Valley, et la Caldera Valles aux États-Unis ; Le Toba, dans le Nord de Sumatra en Indonésie ; le Taupo, sur Île du Nord, en Nouvelle-Zélande ; Caldera Aira, sur l’île Kyushu, au Japon ; le Campi Fleigrei-Summa, en Italie ; et le Laker See, dans l’Eifel actuellement en surrection, 1 à 2 centimètres par an, en Allemagne. Généralement, le Plomb du Cantal, en Auvergne, en France, avec ses 90 kilomètres de diamètre, le plus grand volcan d’Europe, est associé à la présence d’un super édifice vulcanien. Leurs éruptions ont couvert de vastes espaces de lave et de cendres volcaniques et ont provoqué des changements durables des conditions météorologiques de type « petit âge glaciaire » suffisants pour menacer les espèces en voie de disparition ou entraîner des extinctions d’espèces.

 

Notes.

 

(1) Les éjectas, téphras ou pyroclastes sont les fragments de roche solide expulsés lors de d’une éruption volcanique. Les pyroclastes sont des fragments de roche magmatique solidifiés au moment de l’éruption ou, plus fréquemment, durant son parcours aérien, ou arrachés à l’état solide par érosion des structures géologiques existant le long des conduites éruptives. Le terme téphra, généralement utilisé seulement pour les cendres, est utilisé comme synonyme.

(2) Une surge volcanique se produit au cours d’une éruption volcanique explosive de type plinienne ou vulcanienne. Au cours de ce type d’éruptions, un panache volcanique composé de cendres, de lave et de roches fragmentées ainsi que de gaz volcanique s’élève au-dessus du volcan. Lorsque la densité de ce panache volcanique est trop importante pour qu’il puisse s’élever complètement dans les airs, il retombe alors sur les flancs du volcan. Bien qu’elles aient sensiblement la même composition, une surge volcanique est plus destructrice qu’une nuée ardente en raison de sa taille. La quantité de matériaux formant une surge volcanique est telle qu’elle peut recouvrir entièrement un volcan et progresser sur de plus grandes distances.

(3) Après avoir été placée dans les années 130, la date de cette explosion a longtemps été rapportée à des témoignages antiques de phénomènes météorologiques particuliers au-dessus de Rome et de la Chine vers 185. Ces phénomènes étaient expliqués par le fait que les cendres ont été assez abondantes pour affecter la couleur du ciel. Les années 170 et 180 sont aussi souvent mentionnée en raison d’une partie des datations au carbone quatorze et l’année 181 correspond à un pic acide dans les carottes glaciaires. Toutefois les études dendrochronologiques menées en Nouvelle-Zélande imposent une datation différente et placent l’éruption dans les années 230.

 

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