En voilà un qui « balance » comme on dit vulgairement. Il peut se le permettre, le premier procureur de France : il sera en retraite au mois de juin. Plus de langue de bois, plus d’obligation de réserve, il vient de clamer bien fort, lors du discours  de rentrée de la Cour de cassation, à quel point le monde judiciaire est en colère contre Sarkozy et Hortefeux.

Le ministre de la justice présent a dû avaler de travers les petits fours en entendant parler du président et du ministre de l’intérieur à qui le magistrat reproche d’« inspirer à l’opinion des sentiments bas en instillant de manière extravagante, la confusion entre la responsabilité du criminel et celle du juge dont on dénigre la décision, tout cela avilit l’institution et, en définitive, blesse la République. »  Hélas, ceux à qui s’adressait cette violente diatribe n’étaient pas là. Certains trouveront qu’il n’a aucun mérite puisqu’il ne risque rien. Sans doute, mais il est important que les choses soient dites. On ne peut pas voir piétiner les institutions sans réagir. Est-ce le rôle du ministre de l’intérieur, le nouveau ou l’ancien, d’envenimer les rapports déjà difficiles entre la police et la justice ? Est-ce normal d’ « en appeler à l’opinion contre ces mêmes magistrats quand ils prennent une décision qui leur déplaît » ? Il en a aussi profité pour égratigner le juge Courroye, qui ne s’est pas montré impartial, loin s’en faut, dans l’affaire Woerth-Bettencourt. “Quand l’un d’entre nous ne voit pas ce qui dans ses actes fait naître, même à tort, le terrible soupçon d’atteinte à l’impartialité, quand il oppose en guise de pauvre réponse, qu’il est le seul juge de sa conscience, c’est tout le respect dû à la justice qui est compromis.” Pour Jean-Louis Nadal, une seule solution s’impose : « Couper tout lien entre l’échelon politique et le parquet pour ce qui concerne les nominations. » Là, je pense que ça relève du vœu pieux. Jamais, un gouvernement quel qu’il soit ne fera cette démarche. Une justice plus indépendante, oui, mais je ne suis pas trop enclin à donner trop de pouvoir aux juges. Ce sont des hommes et ils sont faillibles. Vous trouverez le texte intégral du discours ICI