La dépêche AFP qui relate l'ouverture de la cité nationale de l'histoire de l'immigration, parle d'ouverture dans la "discrétion", lors même qu'elle fait les gros titres des journaux, concernant surtout l'absence du chef de l'Etat, ou tout au moins d'un ministre, et rappelant le climat politique tendu autour des nouvelles lois, statuant notamment sur l'utilisation de tests ADN, dans le cadre du regroupement familial, avec les contestations de l'opposition, à laquelle s'associent quelques membres du gouvernement.
L'exposition permanente a pour but de rappeler "l'apport de l'immigration" au cours des deux derniers siècles, et est issue d'un projet imaginé par plusieurs historiens depuis 1990, envisagé sérieusement par le premier ministre Lionel Jospin, puis inscrit dans le programme de Jacques Chirac, qui avait porté le projet lorsqu'il se trouvait à l'Elysée. Mais si Jacques Chirac s'y rendra, aucune inauguration officielle n'est prévue pour le moment. Les historiens à l'origine du projet ne cachent pas leur rancoeur pour cette première journée sans responsable politique, l'un d'eux s'exprimait mardi: "s'il n'y a pas d'inauguration officielle, c'est parce que ça coince.

Notre discours, qui est de montrer les apports de l'immigration n'est pas celui de la suspicion généralisée de l'immigrant avec l'instauration de tests ADN". La présidence du CNHI est assurée par Jacques Toubon et Jean-François Reverato.De fait c'est bien sur fond de polémique que le musée ouvre ces portes, dans un climat plus que tendu, la LDH et le MRAP se sont déjà exprimés, déplorant l'absence des autorités, la LDH et d'autres associations appelant même à une inauguration "citoyenne".
Le palais de la Porte Dorée a d'abord été créé pour l'exposition coloniale de 1931, avec pour nom le "Musée des colonies et de la France extérieure", et qui avait pour but de représenter la culture coloniale, et l'action progressive de la colonisation. Après la deuxième guerre mondiale, l'anticolonialisme ayant fait son chemin, l'existence du musée est remise en question, et suite à l'indépendance des anciennes colonies, il s'est mué en musée des Arts africains et océaniens sous l'impulsion d'André Malraux, préfigurant ce qui allait devenir le musée du quai Branly. Et ce jour le CNHI le rejoint pour son exposition permanente.
Le bâtiment par lui-même possède un véritable intérêt architectural, ainsi qu'en témoigne son site internet: "Le bâtiment…est un exceptionnel témoin de la floraison Art déco qui suivit la grande exposition de Paris en 1925 et dont il reste aujourd'hui si peu de traces aussi imposantes et homogènes." Il faut aussi en se rendant devant le palais s'arrêter devant le bas relief: "Le sculpteur Alfred Janniot (1889-1962), à qui avait été confiée la réalisation de décors pour le paquebot Ile-de-France en 1927"… "Autour d'une figure de l'abondance et des grands ports maritimes et aériens de la France, l'Afrique, Madagascar et les Antilles à gauche, l'Asie et l'Océanie à droite produisent et apportent à la mère patrie les richesses de leur sol et de leur sous-sol." mais aussi s'arrêter devant les fresques dans l'entrée du musée, qui fut en outre pendant longtemps le seul a disposer d'un aquarium dans Paris.
Polémique ou pas, instrumentalisation de l'immigration dans un sens ou dans l'autre ou non, le site lui-même n'en reste pas moins tout fait attractif. Il sera agréable au visiteur de se rendre dans l'aquarium du musée, et pourquoi pas, d'y aller en famille. Le CNHI devrait être financé à 40% par le ministère de la culture jusqu'en 2009, et le ministre Catherine Albanel le présente comme un "élément majeur de la cohésion sociale et du pluralisme culturel".