Le dimanche est un jour propice à la détente, au repos, au "laisser aller". On se lève un peu plus tard, et on accomplit ses corvées ménagères à son rythme.le dimanche midi, on mange en famille, ou alors sur le pouce, dévorant un poulet rôti, accompagné de petites pommes de terres aux lardons, achetés chez le commerçant qui nous a vu grandir.
Les marchés, je connais bien, pour y avoir travaillé pendant une douzaine d’années…charcuterie, fruits et légumes, fruits exotiques et plantes aromatiques, boulangerie, olives et épices, autant de souvenirs olfactifs et visuels qui ne me quittent plus. Avoir la fierté de vendre les produits que l’on aidait à fabriquer en labo, ou que l’on avait installés avec un certain savoir faire délégué par des "vieux de la vieille" , était pour la toute jeune fille de quinze ans que j’étais quand je suis rentrée dans ce milieu, tout aussi important que ma vie d’ado et mes études.
Ce fut pour ma part l’école de la vie. Je compris à l’instant même où le gras du jambon laissait ses premières marques sur ma blouse, que ce boulot m’apprendrait à désapprendre en quelque sorte, tout ce que la sociètè de consommation avait réussi à semer dans mes manières et mes attitudes. A l’âge où mes amies faisaient la fête le samedi soir, et se payaient des pantalons hors de prix sans avoir eu à se lever tôt pour le mériter, moi, je gagnais plus qu’elles en indépendance et en maturité.
J’apprenais à vivre…A me lever à l’aube, à découvrir les couleurs fantastiques des cieux de glace en hiver alors que je me réchauffais les mains dans de l’eau bouillante (chose à éviter si l’on ne veut pas d’engelures), jusqu’à ce que mes doigts soient aussi rouges et prêts à exploser que des saucisses de Strasbourg.J’apprenais un langage particulier, une philosophie, une entraide, une vie de famille singulière . Lorsque l’on grandit dans cet environnement, on tête du lait qui nous rend accro…Au début on a du mal, puis très rapidement on aime ce mal parce que tant de petits bonheurs, de rires et de solidarité accompagnent les pires moments que ces derniers s’en trouvent estompés.
Je ne travaille plus aujourd’hui derrière un étal, mais derrière une caisse et le combat est différent, bien que je retrouve de nombreux clients que j’eus à servir il y a quelques années chez mes divers patrons. Cette atmosphère me manque. Dans la grande distribution, en tous les cas là où je travaille, les employés ne sont que des maillons. La rentabilité compte beaucoup plus que le reste. Certes en ces temps de fraicheur et de premières gelées, je me complais à me dire que s’il fait -10°, je ne rentrerais pas chez moi en ayant les orteils violacés.Mais tout de même. Je me souviens de cette marchande de produits libanais sur le marché d’Eaubonne, qui distribuait son thé à tous les commerçants pour se réchauffer à la fois le coeur et le corps. Autre souvenir intarrissable…La soupe de la mère de mon patron charcutier dégustée dès 8H du matin pour se donner de l’énergie.
Je repense aux cafés offerts par mon Riton, vendeur de citrons, que vous retrouverez en semaine sur les marchés de Saint Leu la forêt ou Eaubonne, les senteurs de ses mangues et le goût de ses litchis, la saveur unique de ses oranges maltaises mangées au couteau à 11H du matin. Je me souviens de feu "le jardin d’Alice" de Franconville et de mon patron et ami avec lequel j’avais une complicité indicible.Patron qui me lègua un savoir qui me permit d’intégrer l’entreprise pour laquelle je bosse aujourd’hui et qui nous a rejoints en tant que responsable poussé par les vagues des aléas de la vie.
Dimanche dernier, je suis allée sur le marché de sannois… J’en avais besoin, besoin de faire le tour du peu de commerçants qui exposaient dehors. A traverser, de l’autre côté, les stands pour lesquels j’avais travaillé ou monnayé dur pour un prix, je ne me suis pas, à ma grande surprise, sentie exclue, ou simple cliente. Non, je revivais à nouveau ces instants pénibles des premiers froids, ou la "piquette" montre les premiers signes du froid hivernal qui se profile sous les mauvais auspices. Des courges, oranges, clémentines, raisins, légumes oubliées, l’odeur de la choucroute réchauffée dans l’étuve, les promos sur les fromages à fondue ou à raclette, les beaux morceaux de boeuf bourguignon, les couleurs éclatantes des fleurs des morts,les vendeurs de sapes à l’extérieur, qui emmitoufflés dans des vestes "camionneurs" usent de cet humour à la fois chaste et graveleux tout en expirant cette condensation qui annonce les grands froids. Je me dis que partout ailleurs, il doit y avoir une pareille ambiance, mais je vous suggère si un jour vous en avez l’occasion, d’aller faire un tour sur le marché d’EAUBONNE, et d’aller acheter votre poulet rôti chez les Rousseau, car indéniablement , vous serez servis avec les plus grands des honneurs et peut être par le plus beau des jeunes hommes…Que j’ai vu grandir!!
En bref (et je suis navrée de dire ceci moi qui travaille en grande surface!), la balade dominicale pour acheter du frais est bénéfique. Mes "adresses" au marché d’Eaubonne:
La Cochonnaille. Si vous aimez la charcuterie faite maison, le vendeur ou la vendeuse de citrons qui s’y attèle, le fromager, Pascal de son prénom pour les produits laitiers et surtout les volailles Rousseau!!!!
Le marché m’a servi de marche à suivre. Essayez!
une bien belle promenade dans le temps… oui les marchés sont quelque chose de particulier, oui il faut respecter ceux qui travaille dans le froid l’hiver et en pleine chaleur l’été.
Et tous ces BONS produits que l’on trouve, ils ne sont nulle part ailleurs.
MERCI
Une belle école de la vie et de la découverte. Dire que maintenant dès que le thermomètre approche de zéro toute la france s’affole est reste quasiment bloquée avec 10 cm de neige… avec plus nous faisions encore du vélo pour rejoindre l’école et chaque jour l’entreprise fonctionnait pour tous. A moins 18° j’ai connu des chantiers de construction moi aussi à 20 ans…
Espérons que les petits marchés locaux aient encore les vrais produits du coin néanmoins pour un moment…
Article appétissant je précise…:-))
PH