Cela fait déjà plusieurs mois que je vous parle du phénomène climatique de la Niña particulièrement fort cette année qui a entraîné sur tout le continent sud-américain des températures particulièrement basses et une pluviosité extrêmement abondante (voir articles : Une vague de froid meurtrière, Le terrible bilan de l’hiver austral).

Ce phénomène a également frappé la Colombie où d’importantes inondations ont été enregistrées depuis le mois de juillet. Mais les météorologues colombiens avaient prévus un renforcement de la Niña pour la fin de l’année, et les événements leurs donnent hélas raison puisqu’actuellement les 4/5 du territoire sont considérés comme sinistrés ! Le nombre de morts atteint déjà les 150 et le nombre de personnes ayant perdu tous leurs biens a dépassé le million deux cent mille… venant ainsi augmenter le flot de déplacés — pour rappel on compte en Colombie près de trois millions de réfugiés fuyant les atrocités des combats —.

Ce lundi, le gouvernement a déclaré l’état de catastrophe nationale, ouvrant ainsi les portes à l’aide internationale. Les premiers pays à avoir répondu à cet appel sont la Corée du Sud qui offre plus de 250 millions de dollars et le Chili dont le président à accompagner un avion chargé de 28 tonnes de matériel et de denrées non périssables ainsi que 200 kits de survie comprenant chacun une lampe de poche avec ses piles, une tente pour 4 personnes, 3 matelas, 2 serviettes, 3 couvertures thermiques et 3 isolants thermiques. Le Chili a aussi mis à la disposition de la Colombie un Boeing 707 pour distribuer cette aide humanitaire dans les différentes régions du pays étant donné que la plupart des routes sont devenues impraticables.

Malgré cela, il est évident que cette aide sera insuffisante pour les nombreuses régions déjà affectées par les conditions climatiques, et c’est pour cela que le gouvernement colombien a demandé un crédit d’urgence de 150 millions de dollars auprès de la Banque mondiale. Il a aussi demandé au Congrès de voter une loi pour l’autoriser à utiliser les sommes saisies par la police aux narcotrafiquants.

C’est ainsi que le gouvernement a reçu l’autorisation d’utiliser 18 millions d’euros provenant du trafic de la drogue pour venir en aide aux victimes des intempéries.

Évidemment, cette somme peut paraître dérisoire, surtout lorsque l’on voit l’ampleur des dégâts, d’autant que le gouvernement devra débloquer également des sommes considérables pour la reconstruction des routes et des ponts emportés par les glissements de terrain ou par les crues incontrôlables.

Ainsi, alors que les rues se transforment en rivières, que les masures des plus pauvres s’en vont à la dérive, que la majorité de la population doit écoper l’eau de leur maison comme d’autant de bateaux sur le point de sombrer et que les piscines des haciendas des plus riches se répandent dans les jardins malgré les pompes qui fonctionnent à plein rendement ; ni les cierges des catholiques, ni les sacrifices des indigènes n’arrivent à endiguer ce déluge du XXIe siècle.

Le plus inquiétant, c’est de savoir qu’une fois la décrue entamée, on ne découvrira sous les boues que des cultures pourries, des milliers de têtes de bétail impropres à la consommation, et de nombreux virus ou bactéries prêts à se jeter sur les survivants. Ainsi, la catastrophe climatique sera immanquablement suivie par une catastrophe sanitaire qui précédera l’économique. Les premiers affectés seront encore une fois les plus pauvres qui ayant déjà perdu le peu qu’ils possédaient devront en plus payer à prix d’or les biens de première nécessité devant être importés et distribués dans le pays par voie aérienne.

La seule bonne nouvelle, risible en comparaison de l’ampleur de la catastrophe, c’est que pour une fois l’argent de la drogue servira à autre chose qu’à la corruption, à l’achat d’armes ou à enrichir des narcotrafiquants baignant déjà dans l’opulence.