L’alimentation nomade de rue : nouveau mode de consommation chez les adolescents

À la suite de multiples constats, nous pouvons dire que les adolescents développent depuis quelques années un nouveau mode de production de lieu de consommation. En effet, ils s’approprient de nouveaux espaces de consommation: la rue à la pause de midi, au lycée entre deux cours ou encore en sortant du cinéma…

L’alimentation nomade ou encore mobile consommée dans les lieux publics nécessite un apprentissage de techniques corporelles adaptées à ces espaces. Cela produit un ensemble de codes communs au groupe auquel on participe. En effet, il n’est pas facile de savoir manger un gros sandwich sans que la sauce dégouline ou encore boire une canette à plusieurs, sans poser ses lèvres sur le pourtour de l’ouverture (les taches sont une forme d’inconvenance). Ainsi, nous constatons qu’il y existe des codes de civilité entre adolescents au sein de ces espaces. Ce qui apprend, indirectement, à se conduire comme des adultes.

Parallèlement, la question de l’emballage du produit est centrale, car l’objet de consommation doit être emporté, nouveau (à la mode) et doit se partager facilement (ce qui nécessite un packaging élaboré). Dans cette pratique, la volonté première de l’adolescent nous semble t-il, est de rompre temporairement avec les codes de la table, avec les repas classiques, la cuisine ou encore la salle à manger. Tant de mots pour définir un « rite » quotidien ressenti par certains adolescents comme un acte exagérément sacralisé et ennuyeux. Avec l’alimentation de rue, l’adolescent peut très bien sauter ou courir en mangeant. Ce qui est impossible lors de repas au sein de la famille. Ainsi, la rupture se retrouve à l’extérieur de la famille, à l’école par exemple. Il y a une opposition très significative et c’est une des raisons pour lesquelles les marches, les entrées des immeubles, le long des berges des rivières soient investies. Il y a la volonté de choisir le non conventionnel par les jeunes. C’est aussi une manière de suspendre provisoirement les règles de l’alimentation classique.

En général, les adolescents sont proches les uns des autres lorsqu’ils consomment. Ils ont la volonté de créer un groupe présentant une inscription corporelle particulière. À travers cette configuration, il y a comme le désir de se créer un espace privé dans un endroit pourtant public. La circulation des canettes de soda par exemple, crée des liens, des échanges. Le partage, et le fait de marcher en mangeant par exemple, développent de nouvelles techniques corporelles. On se rapproche énormément de la nourriture, sans occulter la notion de contact physique (avec les mains). Il y a comme un réel changement de rapport à la nourriture chez les adolescents impliquant de manière inhérente, une réelle affirmation d’autonomie.

Enfin, durant les repas de rue, les adolescents confient qu’ils aiment regarder les passants comme au cinéma ou au théâtre. L’adulte est alors considéré  comme un objet d’observation. Ainsi, par cette pratique, ces ados s’affirment en tant qu’individus et affirment leur différence avec les adultes. En somme, et c’est avec prudence, que nous pouvons parler de culture adolescente possédant des gestes, des normes et même un langage propres.

2 réflexions sur « L’alimentation nomade de rue : nouveau mode de consommation chez les adolescents »

  1. Certes…Mais pas grand chose de nouveau en fait!!!
    [quote]les adolescents confient qu’ils aiment regarder les passants comme au cinéma ou au théâtre. L’adulte est alors considéré comme un objet d’observation. Ainsi, par cette pratique, ces ados s’affirment en tant qu’individus et affirment leur différence avec les adultes. [/quote]
    J’ai dépassé les 55 ans et j’en fais toujours autant…C’est normal, Docteur?

    Une chose enfin m’a toujours dérangée, c’est cette manière de dire « les adolescents » à tout bout de champ comme s’il s’agissait d’un reportage animalier….

  2. Merci pour cet article plein de respect pour nos adolescents, notre chère progéniture ordinateur-télé-console qui prouve encore une fois (merci Freud !) que dans cette période de sa vie, elle trouve toujours des codes identitaires qui lui permettront de se construire, tant que nous, parents et adultes, observerons de cet oeil bienveillant l’affirmation de leur différence !

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