De toutes parts, ou presque, les critiques pleuvent sur la Syrie ; accusée de commettre la pire des répressions contre son propre peuple. Mais à molester ainsi le régime Alaouite on prend le risque de sa radicalisation, avec  in fine, le danger de sa fuite en avant. Ultime démarche possible à cette logique : le risque de voir le régime rallumer le différent frontalier l’opposant à Israël.

 

Acculé, le régime syrien se cherche une importance nouvelle; à défaut d’être, pour le moment, suffisamment fort pour faire définitivement taire les contestations internes.

 

En effet malgré les injonctions européennes et les « avertissements » de Barack Obama, le régime syrien poursuit sa radicalisation face à la multiplication des manifestations émanant de sa propre société civile.

 

Rassurés par l’attitude des russes, des chinois et dans une moindre mesure des israéliens, effrayés, à l’idée d’une nouvelle secousse en terre arabe ; les dirigeants syriens tiennent bon. Pour le moment.

 

Nouvelle idée pour le régime dans cette logique du sauve-qui-peut : recourir à sa capacité de nuisance géopolitique dans la région. Un peu sur le monde du régime libyen d’autant plus prompte à laisser passer le flot de l’immigration clandestine vers l’Europe qu’il se sent attaquer par cette même Europe ; Bachar Al-Assad se sent l’envie de raviver le différent frontalier avec Israël.

 

Avec à la clé, pour le régime syrien, le même chantage implicite que celui que pratique la Lybie : La liberté de faire ce qu’on veut chez soi contre une certaine tranquillité des frontières.

 

Solution certes extrême ; et pour le moment purement spéculative, mais situation allant en se précisant à mesure que le régime Alaouite continue à se radicaliser.

 

La tentation de rallumer le front israélien

 

Et de fait ce « rallumage » du front israélien n’est, encore, qu’une possibilité pour la Syrie. Les jours qui viennent diront si on passe réellement de l’hypothèse à l’accomplissement.

 

Concrètement comment cela pourrait-il se faire ?

 

Simple tout autant qu’irresponsable dirions nous.

 

Car Bachar Al-Assad doit donner son autorisation pour que le contingent de l’ONU en poste sur le plateau du Golan puisse rester. En effet le mandat de ces 1400 casques bleus en poste depuis 1967 à la frontière syro-israélienne est soumis à un renouvellement régulier de la part des autorités souveraines des deux pays sur lesquels les troupes sont stationnées.

 

C’est pourquoi le président syrien doit, d’ici à la fin du mois de mai, donner, ou pas, son autorisation pour que le mandat soit renouveler.

 

Sur la question les pires rumeurs ont couru. Des journalistes israéliens, relayés, récemment, par le journal Marianne, parlaient d’une vraie hésitation de la part de Bachar Al-Assad. A la clé, pour lui, la possibilité de rouvrir  un front qui détournerait l’attention de ceux critiquant la violence de sa répression interne.

 

Une logique du pire pouvant servir de monnaie d’échange

 

Simple hypothèse, oui certes. Spéculation à  la rationalité très étroite ? Oui assurément !

 

 Car penser détourner l’attention de ce qui se passe en Syrie en ramenant le Golan sous le feu des médias est un risque bien inutile. Mieux vaut compter sur l’indifférence des chancelleries ou des médias, ainsi que sur l’actualité d’autres points chauds du globe.

 

C’est en réponse à cet ensemble de désagréments que le rallumage du front israélien pourrait avoir d’autres vertus que celle de son simple effet de distraction. Car cette solution du pire semble plus utile comme monnaie d’échange dans l’optique d’une répression faite avec l’aval implicite de la communauté internationale. Emploi un tant soit peu plus rationnel de la chose,  dont se garderait, inéluctablement, un régime poussé à l’affolement dans l’hypothèse où la communauté internationale poursuivait les reproches à son encontre.

 

Là est donc le danger de cette hypothèse : elle en appel à la rationalité d’un régime acculé à l’irrationalité par les reproches que lui adressent les autres.

 

Verdict, donc, d’ici à la fin du mois de mai. Mais il y a tout lieu d’être, néanmoins, optimiste. Le régime syrien saura se préserver de l’erreur que constituerait le retour d’une guerre avec Israël.

 

A l’éviter il monterait qu’il garde son sang froid, malgré la violence de sa répression. S’il venait à la commettre il se priverait d’encore plus de soutiens, accélérant ainsi sa chute finale.

 

Là est le dilemme : pour sauver la paix, certes précaire, régnant dans la région il faut surement sacrifier le peuple syrien. De tous les angles s’offrant à nous lorsque nous regardons la question syrienne, voire les révoltes arabes, nous arrivons, malheureusement, à un tel diagnostique.

Grégory VUIBOUT

 

http://www.lexpress.fr/actualite/monde/syrie-44-morts-dans-les-manifestations-de-vendredi_995137.html

http://www.liberation.fr/monde/01012332125-reperes

http://tempsreel.nouvelobs.com/actualite/monde/20110523.REU0514/l-union-europeenne-sanctionne-le-president-syrien.html

http://www.slate.fr/story/37433/syrie-libye

http://www.slate.fr/story/37117/syrie-bachar-el-assad-pression-etats-unis