la montée en puissance.

 

La distance prise par la Chine communiste à l’égard de l’URSS, peut être appréciée dès 1953 aux funérailles de Staline, ou ce n’est pas Mao Zedong mais Zhou Enlai qui représentera la république de Chine populaire. Puis à la conférence de Bandung en 1955 qui souligne l’entente sino-indienne scellée auparavant en 1954 par Zhou Enlai et Nehru marquant le début d’une reconnaissance internationale de la Chine, et son éloignement du bloc communiste. Le Premier ministre indien Jawaharlal Nehru et son homologue chinois Zhou Enlai formalisaient le «Panchsheel», cinq principes de coexistence pacifique destinés à sceller une entente durable entre leurs deux pays, respect mutuel envers l’intégrité du territoire et la souveraineté de chacun, non-agression mutuelle, non-interférence mutuelle, égalité et bénéfice mutuels et coexistence pacifique. Que le Panchsheel fût dérivé de la doctrine bouddhique, socle culturel lointain, néanmoins commun aux deux voisins, ne pouvait être que de bon augure pour une relation qui se concevait déjà comme déterminante pour l’avenir du continent Asiatique dans son ensemble

Avant 1955, l’Afrique ne représentait pas une grande importance à la Chine. Mais à dater de l’année 1955 la Chine cherchait à obtenir une reconnaissance internationale et à se former des alliés politiques, dans l’espoir de renforcer ses alliances pour faire face à l’Occident capitaliste et à l’Union soviétique communiste et révolutionnaire.

La conférence de Bandung qui s’est tenue du 18 avril au 24 avril 1955 en présence de 29 États Africains et Asiatiques avait pour but de resserrer les relations économiques et culturelles entre les deux continents. C’était une conférence des Nations Afro-Asiatiques convoquée par les gouvernements de Ceylan, de Birmanie, de l’Inde, de l’Indonésie, et du Pakistan. L’agenda de la conférence incluait des sujets tels les essais nucléaires, la politique des blocs et le colonialisme ,l’impérialisme et l’hégémonie des forces occidentales et les cinq se sont prononcés pour l’admission de la république populaire de Chine aux Nations-Unies.

Pendant la conférence la Chine et les États Africains ont adopté les cinq principes de la coexistence pacifique qu’avaient déterminés la Chine et l’Inde en 1954 :
1-Le respect mutuel de la souveraineté et la complémentarité régionale .
2-La non attaque d’un parti contre l’autre.
3-La non ingérence dans les affaires intérieures des autres parties.
4-L’égalité et les intérêts communs.
5-La coexistence pacifique.
A la fin de la conférence, la Chine a présenté aux États Africains un soutien économique , technique et militaire, dans une tentative de réduire l’impact des forces occidentales prédominantes et de créer un nouvel ordre international et politique.

L’armistice de Panmunjoem le 27 juillet 1953 entre la Corée du nord et du sud met fin à la guerre. La Chine de Mao était intervenue de manière non officielle, et le 31 octobre 1950, plusieurs divisions Chinoises franchirent le Yalu ou elles entrèrent en contact avec les unités Américaines. Cette guerre fit que Nord Coréens, Soviétiques et Chinois marchèrent ensemble contre l’ONU et les Américains.

A la suite de cet armistice Zhou Enlai propose aux États-Unis cinq principes de coexistence pacifique qui sont l’égalité, des avantages réciproques et du respect mutuel de la souveraineté et de l’intégrité du territoire. On peut ainsi dire que l’origine des cinq principes de la coexistence pacifique résident dans cette déclaration. Lorsqu’on jète un regard rétrospectif sur le 20ème siècle, si l’on résume en un mot la signification de la théorie sur la coexistence pacifique, c’est que cette théorie a inaugué une nouvelle et grande époque de paix et de développement. La visite de Nixon en Chine qui a réalisé une percée dans les relations sino-américaines est la plus représentative. Le fait que Chou Enlai et Nixon se sont serrés la main en 1972 revêt une signification historique et symbolise l’avènement d’une nouvelle époque.

 

La politique d’ouverture fut marquée par le rapprochement Américano-chinois lors de la visite de Richard Nixon reçu par Zhou Enlai en 1972.

 

A l’époque, Zhou Enlai a secondé Mao Zedong pour mettre au point les principes et mesures fondamentales de la politique diplomatique de la Chine nouvelle. Dans le «Programme commun de la Conférence consultative de la politique du peuple chinois» rédigé par Zhou Enlai, il est dit notamment, «Le gouvernement populaire central de la République populaire de Chine est disposé à négocier l’établissement des relations diplomatiques sur un pied d’égalité, sur le principe d’avantages réciproques, sur le respect mutuel de la souveraineté territoriale avec tout gouvernement étranger qui a rompu ses relations avec les réactionnaires du Guomintang, ou Kuomintang parti nationaliste Chinois, et adopte une attitude amicale à l’égard de la République populaire de Chine».

En 1953 a lieu la mise en place du premier plan quinquennal. L’économie est basée sur l’industrie lourde sur le modèle de l’Union Soviétique qui fournit des capitaux. Durant cette période, 10 800 Soviétiques et 1 500 Européens de l’Est furent employés en Chine dans le cadre de projets liés aux transports, aux communications, à l’éducation ou à la santé. Dans le même temps, des milliers de scientifiques, ingénieurs et étudiants Chinois furent envoyés étudier en Union soviétique.

En 1955 Mao Zedong décide de lancer un vaste mouvement de collectivisation, qui sera désigné comme le «premier bond en avant». Il présente toutes les caractéristiques d’une répétition générale à petite échelle du «Grand Bond en avant» qui se déroulera de 1958 à 1960. En s’appuyant sur les cadres supérieurs provinciaux du Parti contre le Comité central qui n’y était guère favorable, Mao appuie une accélération considérable du mouvement des coopératives à partir de l’été 1955. Selon lui, cette accélération serait réclamée par les masses et permettrait à l’agriculture de contribuer efficacement à l’industrialisation du pays par la hausse très importante des rendements. Dès la fin de l’année 1955, quasiment tous les foyers paysans ont été intégrés à des coopératives. La méthode choisie pour inciter les paysans à s’intégrer à ces coopératives est un mélange de mobilisation (propagande, slogans, réunions) et de coercition. Parallèlement, le régime réalise l’achèvement de la socialisation de l’économie urbaine. Les artisans sont regroupés en coopératives et l’État place sous sa tutelle les entreprises industrielles qu’il ne contrôlait pas encore, signant la disparition définitive de la bourgeoisie industrielle des villes. Cependant, loin des hausses de production extraordinaires prévues par le projet de plan agricole de douze ans adopté en 1956 et malgré la mobilisation menée par le Parti auprès des cadres et des paysans, les ambitions irréalistes et les méthodes incohérentes du mouvement entraînent une récolte très médiocre. Les calamités naturelles qui s’abattent durant l’été 1956 sur certaines régions (inondations, sècheresses…) ne font qu’aggraver la situation qui ne tarde pas à aboutir à une disette dans une grande partie du pays.

La crédibilité du régime est durement atteinte et va justifier un renversement politique. Les conséquences politiques du «premier bond en avant» vont être très importantes. Le pouvoir des cadres du Parti sur la société, notamment sur la société rurale, va se trouver considérablement étendu et renforcé par le mouvement de «coopérativisation». Ils exercent dorénavant un contrôle direct sur la vie quotidienne des paysans. Ajouté au contrôle étroit qu’il exerce depuis 1949 sur les villes et qui a été renforcé lors de l’achèvement de la socialisation économique des villes en 1955, le Parti dispose dorénavant d’un formidable pouvoir sur l’ensemble de la société chinoise.

Toutefois à l’intérieur, la résistance des campagnes à la collectivisation des terres se manifeste avec rigueur, alors que les objectifs du premier plan quinquennal ne sont pas atteints. Pour temporiser Mao Zedong lance la campagne des «Cent Fleurs» menée de janvier à juin 1957. Son but est de rétablir son autorité sur le parti affaiblie par sa défaite depuis le VIIème Congrès du PCC grand-messe du régime se réunit du 15 au 27 septembre 1956 qui marque un revers pour Mao et ses idées politiques. Les principaux leaders du régime, comme Deng Xiaoping, Zhou Enlai et Liu Shaoqi sont favorables à une prudente orthodoxie. Bien qu’il lui ait été donné son aval, à la mise en œuvre d’un socialisme plus graduel, «pas à pas», cela constitue un véritable désaveu à Mao et à ses méthodes. Le Congrès insiste aussi sur le rôle dirigeant du Parti, dont les statuts omettent désormais toute référence à la pensée de Mao. Les nominations effectuées confirment le déclin de son influence, à l’exception de Lin Biao, un de ses fervents partisans, qui accède à la sixième place dans la hiérarchie.

Il lui convient d’améliorer les relations entre la formation communiste et la population dans un contexte international périlleux. L’événement international marquant de cette année 1956 est le début de la déstalinisation en URSS et les troubles qui s’ensuivent en Pologne et en Hongrie. En février 1956, au cours du XXe congrès du Parti communiste d’URSS, Nikita Khrouchtchev dévoile son fameux rapport «secret». Il y fait une critique sévère de Staline et condamne en particulier les crimes commis au nom du communisme. Cette déclaration qui sera publiée par la presse américaine, après que la CIA s’en sera procuré une retranscription, provoque la stupeur du monde communiste, y compris naturellement des communistes Chinois.

Dès lors, la principale crainte des communistes Chinois est de voir les secousses, qui agitent la sphère soviétique se répercuter sur le régime de Pékin, et plus particulièrement qu’un parallèle soit fait entre Staline et Mao. Le Parti opte donc pour une ligne intermédiaire. Le Quotidien du peuple publie plusieurs articles où Staline est présenté comme un grand combattant du marxisme-léninisme mais également comme un homme qui a commis des erreurs dans ses politiques.

Mao reprend rapidement l’initiative, et va alors proposer une médication qui était jusqu’alors réservée aux problèmes internes du Parti, une campagne de rectification. Il veut inciter la population à critiquer le Parti afin que celui-ci corrige ses défauts. Mao parvient à imposer cette idée au sein du Parti à la fin de l’année 1956, bien que les résistances demeurent nombreuses. Son discours sur les cent fleurs date du 2 mai 1956, mais c’est seulement le 27 février 1957 qu’il décide de forcer le cours des choses en prononçant son célèbre discours sur «La juste solution des contradictions au sein du peuple». Le mot d’ordre des cent fleurs, qui jusque là n’avait constitué qu’une campagne classique de libéralisation, devient un appel à critiquer le Parti. On devine la stupeur de la plupart des membres de celui-ci qui aperçoivent immédiatement le danger de cet appel, instruits qu’ils sont de l’ampleur du mécontentement dans le pays. C’est le printemps de Pékin par analogie avec le printemps de Prague. Si l’objectif officiel est que celui-ci s’améliore, Mao compte bien en profiter pour affaiblir ses adversaires et retrouver un certain ascendant sur ses camarades.

La critique se généralise, si les contestataires s’en prennent d’abord au travail du Parti, très vite les critiques s’orientent à l’encontre de sa nature même et de son rôle au sein de la société chinoise. Elles dénoncent en particulier sa structure jugée monolithique, le monopole de l’information détenu par ses membres du Parti et demandent une réforme des institutions pour qu’une plus grande place soit faite aux partis démocratiques. La réaction du Parti est que les faits ont donc donné raison aux réalistes. Menacé dans son existence même, par un mouvement qui risque d’échapper à tout contrôle, le Parti se doit de réagir.

Les dirigeants du Parti qui assistent à la montée de plus en plus incontrôlée de la contestation, ne manquent pas de faire le parallèle avec les événements de Pologne et de Hongrie, mais aussi avec le mouvement du 4 mai. Le 4 mai 1919, peu après la naissance de la république Chinoise 3.000 étudiants manifestent sur la place Tien An Men. Ce mouvement traduit l’émergence d’une conscience patriotique apposée aux occidentaux comme aux Japonnais et l’abolition de l’Empire Mandchou.

Mao lui-même avertit les manifestants lorsqu’il déclare le 25 mai devant le IIIe Congrès de la Ligue des jeunes communistes, que ceux-ci doivent être conscients que «tous les mots ou actions qui s’écartent du socialisme sont mal venus». Le lieu où cette phrase est prononcée n’est pas anodin. C’est principalement la jeunesse qui inquiète le plus les dirigeants Les étudiants sont particulièrement visés par la campagne anti-droitière.

Les diplômés feront l’objet d’enquêtes politiques, devront désormais obéir au plan de répartition fixé par le parti et accepter sans rechigner leur affectation. Mais c’est surtout à Wuhan que la répression est la plus dure. Les représentants de l’université sont fusillés et cinquante hauts responsables expulsés pour droitisme. De façon générale, le milieu universitaire est décimé. À l’université de Pékin, 10 % des étudiants sont classés comme droitiers et expulsés ou incarcérés. Les diplômés feront l’objet d’enquêtes politiques, devront désormais obéir au plan de répartition fixé par le Parti et accepter sans rechigner leur affectation. Le bilan de la répression, au total ce sont plusieurs centaines de milliers de personnes qui seront victimes de la campagne antidroitière, et en particulier les enseignants. Chaque unité doit sélectionner un quota de «droitiers». On exige d’eux de sévères autocritiques. Puis ils sont suivant les cas dégradés, exilés ou incarcérés. Plus de 400 000 «droitiers» seront envoyés dans des camps de travail.

La version officielle présenta plus tard la campagne des cent fleurs comme un piège tendu par Mao afin d’amener tous les ennemis du Parti à se dévoiler. La campagne des Cent Fleurs marque le divorce entre le pouvoir et la nouvelle société, la fin du consensus social qui avait régné jusqu’alors. Pour la première fois, la confrontation entre gouvernants et gouvernés, entre le Parti et le peuple, est envisageable.

La suite le Grand Bon en avant.