Vous prenez un banal pays tropical d'une douzaine de millions d'habitants et vous y trouverez plus de 150 partis politiques (c'est le cas au Sénégal). Sur les 150 partis, il y en a un bon paquet qui sont morts avant d'avoir même été déclaré au ministère de l'intérieur, mais ce n'est pas grave, ils ont quand même un chef qui s'en revendique. Une bonne parti de ceux qui restent n'ont pas de statuts ni d'assemblée générale, ce n'est pas la peine, le président fait les réunions de bureau pendant les repas de famille puisque les seuls militants du parti sont sa (ses) femme (s), ses beaux parents et quelquefois ses beaux frères… Ces échantillons de partis forment des coalitions, ce qui leur permet, à une vingtaine, de pouvoir prétendre représenter 0,5 % des électeurs, ce qui s'avère d'ailleurs difficile à vérifier puisque ces partis ne se sont jamais présentés à aucune élection. Mais cela les autorise, s'ils soutiennent le président en exercice, à recevoir 3 ou 400 000 cfa mensuels plus 1 ou 2 sacs de riz. Il reste ensuite 4 ou 5 partis qui ont quelques militants, un leader inamovible, c'est lui qui a créé le parti il y a 25 ans. Tous anciens socialistes ou communistes sauce tropicale et qui aujourd'hui défendent l'économie de marché tout en demandant les prières de leur marabout…
La dialectique aidant, ils se débrouillent très bien avec leurs menus contradictions. L'actuel président de la république, convaincu des bienfaits du capitalisme dérégulé et quelque peu sauvage, a d'ailleurs été élu grâce à l'aide d'anciens staliniens et maoïstes qui n'y ont pas vu malice.
Reste… Le parti au pouvoir. Comme c'est lui qui détient les cordons de la bourse, qui distribue les passeports diplomatiques, qui octroi les marchés publics, il peut aligner, dans ses manifestations, des milliers de "militants" déplacés de l'autre bout du pays. Manifestants qui n'ont qu'une très vague idée du but de la manœuvre à laquelle ils participent, cela n'a pas beaucoup d'importance puisqu'ils ne sont là que pour la télé. Les femmes chantent et dansent et les hommes sont béats d'admiration devant le grand boss. Bon nombre de ces "militants" militaient dans l'ancien parti au pouvoir, c'est normal les billets de banque sont les même ! Et si, ces militants sont fidèles à quelque chose c'est bien aux prébendes et autres menus avantages. Rien ne ressemble plus à une grande manifestation patriotique du parti au pouvoir qu'une manifestation de l'ancien ou du futur parti au pouvoir. C'est encore normal, ce sont les même militants, souvent les même cadres du parti qui ont retournés leur veste contre un 4X4, un poste de député ou de président de conseil d'administration. On dit que l'herbe est toujours plus verte dans le champ du pouvoir, c'est pourquoi, dans le vocabulaire bananier on appelle ces "militants" des transhumants.