Malgré les obligations légales et les actions de sensibilisation, les travailleurs handicapés restent victimes de difficultés d’insertion et de maintien dans l’entreprise. Pourtant, sous l’impulsion d’acteurs engagés, les situations évoluent… pour l’intérêt de tous.
Travailleur handicapé : statut et situation
Un travailleur handicapé est une « personne dont les possibilités d’obtenir ou de conserver un emploi sont effectivement réduites par suite de l’altération d’une ou de plusieurs fonctions physique, sensorielle, mentale ou psychique » (1). A ce titre, le travailleur handicapé, dont le statut est reconnu par les CDAPH (Commissions des droits et de l’autonomie des personnes handicapées), bénéficie d’un certain nombre de mesures destinées à faciliter son insertion professionnelle.
En premier lieu, la loi impose depuis 1987 aux entreprises de plus de 20 salariés d’embaucher 6% de travailleurs handicapés. D’autres actions peuvent modifier ce taux légal, comme l’accueil de stagiaires handicapés ou le recours en sous-traitance à des entreprises du secteur adapté, qui emploient au moins 80% de travailleurs handicapés. Les entreprises qui ne respectent pas ces obligations sont tenues de verser une contribution à l’Agefiph, organisme dont la mission est de favoriser l’insertion professionnelle et le maintien dans l’emploi des personnes handicapées. L’Agefiph propose tout un dispositif d’aides à destination des travailleurs handicapés (recherche d’emploi, accompagnement…), mais aussi des employeurs (aides financières à l’embauche).
Depuis quelques années, la situation évolue : les entreprises emploient 60% de travailleurs handicapés de plus qu’en 2000 (336 900 contre 210 000), et celles redevables de la contribution à l’Agefiph sont passées de 58 000 en 2007 à 46 413 en 2012. Pourtant, avec un taux de chômage s’élevant à 21%, les travailleurs handicapés restent deux fois plus touchés que la moyenne de la population. « Le manque de qualification des personnes en situation de handicap, et la représentation négative du handicap dans les entreprises […] font que plus que les autres, ils vont être fragilisés par une crise économique », explique Valérie Paparelle, de l’Adapt (2).
Renforcer la place du travailleur handicapé en entreprise
Mais beaucoup d’entreprises cherchent à lutter contre cette forme de discrimination et se sont dotées de programmes internes pour favoriser l’accès et le maintien à l’emploi des travailleurs handicapés. Renault, qui vient de conclure son 6ème accord en faveur des travailleurs handicapés, s’engage ainsi à « élargir le champ des bénéficiaires, augmenter le montant des aides financières, renforcer les dispositifs de formation des managers », détaille Jean Agulhon, le DRH France. Cofely Ineo, acteur majeur du secteur du génie électrique, des systèmes d’information et de la sécurité, mène depuis 2004, dans le cadre de sa « Mission P.H.A.R.E. » (Personnel Handicapé : Anticiper, Reclasser, Employer), une politique active en faveur des travailleurs handicapés. Elle a d’ailleurs été labellisée et primée à plusieurs reprises pour ses actions.
Pour améliorer la place du travailleurs handicapés dans l’entreprise, Cofely Ineo organise notamment depuis 2 ans des « Handy’trophées », qui récompensent les initiatives menées par ses salariés en faveur de l’emploi des personnes en situation de handicap. L’objectif est de faire connaître la politique de l’entreprise en matière de handicap, d’impliquer chacun dans la démarche, mais aussi de bousculer les préjugés. Pour le groupe Cegid, éditeur de logiciels de gestion, il y a bien là un enjeu essentiel : « par la sensibilisation et la communication, nous arriverons à amoindrir les représentations erronées », assure Ilhem Gouffi Radi, chargé de mission handicap. C’est dans cette optique que Cegid a diffusé à tous ses collaborateurs une BD pour sensibiliser au handicap en entreprise.
Le recours au secteur protégé est également un volet sur lesquelles les entreprises avancent pour faciliter l’accès à l’emploi des travailleurs handicapés. C’est l’un des champs d’action mis en avant par Solvay, groupe industriel actif en chimie, qui « souhaite augmenter les achats dans le secteur protégé en formant ses acheteurs pour les sensibiliser à ce sujet », indique Stephanie Mombrun, responsable mission handicap. Cofely Ineo vient pour sa part de recevoir un prix lors des derniers Trophées de la diversité pour son partenariat avec l’entreprise adaptée Altaria, qui permettra de créer et pérenniser des emplois pour des personnes en situation de handicap lourd.
Un atout aussi pour l’entreprise
Toutes ces initiatives contribuent à rendre au travailleur handicapé une place pleine et entière dans l’entreprise. Mais celle-ci s’en trouve aussi gagnante : elle accède à des profils diversifiés, et y gagne en image. Pour Laurent Rickelynk, du programme RITHa, la politique handicap « donne du sens aux actions menées par [les entreprises] ». Ce qui est bénéfique aussi pour l’ensemble des employés, et la culture d’entreprise en général. Richard Ozwald, directeur diversité et mission handicap de la Société Générale, le confirme : « en plus de s’assurer la fidélité de collaborateurs reconnaissants, l’impact est également bénéfique sur les équipes ». « Mais pour cela, il faut s’investir réellement », précise-t-il. Un effort dont les conséquences justifient pleinement la mise en œuvre.
(1) Code du travail, article L 323-10 : http://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006072050&idArticle=LEGIARTI000006648674&dateTexte=20130704
(2) Association pour l’insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées