La grotte de Gériols.

 

Passée l’entrée, en forme de goule, obstruée par un éboulement et fermée par une grille qui empêche toute intrusion intempestive d’indésirables et de voyeurs, dans la sanctuaire, – comme si une caste se réservait le droit de « profiter » tout son saoul des lieux -, une galerie étroite, en pente très prononcée, encombrée de pierres éboulées rendant la progression malaisée, s’enfonce dans les entrailles du plateau du Grézac. Elle permet d’accéder à une première salle frappée du sceau de l’originalité. La « Salle de la double voûte », ainsi s’en est-elle trouvée baptisée par les époux Vallot, ses deux « re-inventeurs » se décompose en deux séries de galeries superposées, sans attrait particulier, qui cheminent dessous et dessus la salle principale. Il est certain que son charme en serait tout autre et qu’elle en apparaîtrait, de fait, moins insignifiante si la cavité était aménagée et éclairée. Mais voilà, les subtilités de la roche, à la seule lumière blanche d’une lampe torche, ne peuvent ainsi ni se lire, ni se découvrir dans leurs points les plus remarquables.


Sans transition, après un bref et pénible goulet, s’ouvre une salle aménagée d’un escalier grossièrement taillé, de main d’homme, dans la paroi, permettant d’atteindre des boyaux et des corridors supérieurs, La bien nommée « Salle de l’escalier » était une pièce essentielle, à l’époque romaine ou pré-romaine, dans l’organisation et l’exploitation des filons de plomb argentifère. Outre celles supérieures, aux marques d’extractions indubitables, une ancienne galerie de mine s’enfonce profondément et les champs de taille, ne laissant aucun doute sur sa dévolution, y transparaissent,


Les miroirs d’eau de la grotte de Gériols.


Plus avant, « …une grande salle dont la voûte possède 45 mètres de portée… », ainsi la présente joseph Vallot dans la rédaction de l’acte en signifiant la découverte, « …elle est divisée en deux parties par un rocher occupant la partie basse, surmontée d’un pont naturel, montant à mi-hauteur de la voûte ; la première partie, ou « Salle du petit lac », parait assez étroite, mais sa largeur est doublée dans la partie supérieure par une sorte de tribune à pic se prolongeant jusqu’au grand lac. » Une étroite langue pétrée, aménagée par l’homme dans les temps anciens, d’une longueur de trente mètres, séparant les deux étendues d’eaux souterraines, permet, depuis le petit lac aux eaux vert-sinople, d’approcher et de pénétrer dans la « Salle Grand-Lac ».


D’une trentaine de mètres de longueur sur une douzaine de large, d’une profondeur de 6 à 9 mètres et d’une température constante de 14°5 identique à celle qui règne dans la cavité, le grand lac est un écrin bleu-vert essaimé d’étoiles qui scintillent depuis les 24 à 30 mètres de haut de la voûte. Du plafond pendent fistules et stalactites aux couleurs irisées et aux parois se tendent des draperies, les une et les autres se reflétant, à la lumière d’une lampe torche, sur la patine du miroir aquifère. Au-delà, fermant la grotte, gours, cascades pétrées et un bloc calcique aux formes étranges et cachectiques, « le squelette », en tirent la toile de fond.


Les autres salles et points remarquables de la grotte de Gériols.


Des galeries de mine de faible longueur, mais partiellement immergées, pour les unes, totalement immergées, pour les autres, en leur partie terminale se situent au Sud du grand lac et se concentrent tout particulièrement aux abords d’un puits d’extraction de minerai de plomb argentifère à demi comblé, « le puits romain ». Il devait mener vers un réseau inférieur et, apparemment, son fond semble, lui aussi, noyé. Ces structures, réalisées de main d’homme, laissent supposer qu’elles ont été creusées à un moment où les eaux étaient plus basses dans ce lac, mais, pouvant y porter démenti, un couloir extérieur à la grotte, ensablé, aurait servir à vider le lac et permettent, ainsi, aux mineurs de travailler.

La « Salle des gours », toute proche, adjacente par son Ouest au puits romain, est toute luminescence avec sa panoplie variée de concrétions polymorphiques qui règnent sur les dépôts endogènes, – éboulements des parois et des plafonds -, causés par les longues périodes de dégel qui ont succédé aux phases périglaciaires et glaciaires. Elles enregistrent, lenteur de la création, les caractéristiques de l’écoulement d’eau qui les a édifiées.


La visite de la grotte de Gériols ne se résume pas, seulement, à ces quatre salles et à ses lacs, d’autres points d’intérêt n’en doivent point être oubliés d’autant que le réseau est loin d’être découvert dans sa globalité. Et si tel est, les galeries et les voûtes basses, d’accès ardu ou impraticable, aboutissant à la « Salle de la double voûte », à la « Grande salle » et à la « Salle des gours », laissent à croire que de nombreuses ramifications restent inexplorées dans la couche karstique afférente aux galeries sèches. Tel est si réel qu’un accès aboutissant à la galerie supérieure de la « Salle de la double voûte » conduit à un petit lac, une sorte de puits, de profondeur insondée et aux bords tapissés de calcite.


Mystère hydrologique autour de la grotte de Gériols.


Par la présence des lacs et des mares et en absence de toute apparence de cours d’eau souterrain, le site est étrange d’autant plus qu’aucun exutoire connu, ni nul émissaire visible, ne se distinguent aux environs de l’entrée de la grotte et sur une longue distance. D’où peut donc provenir cette eau ? Par où peut-elle s’évacuer ? N’existe-t-il pas un système annexe dans la grotte de Gériols ?


Pour accéder au fond de la grotte, – gours, cascades pétrées et bloc calcique au nom prédestiné de « squelette » -, faute d’aménagements adéquats, la grotte de Gériols n’étant pas ouverte au public, il est nécessité de traverser le lac à la nage, – les époux Vallot, les « re-découvreurs » du site karstique, avaient, eux, utilisant avec un bateau de type Osgood, navigué sur le plan d’eau -, et, en son milieu, un courant se dirige vers le Sud.

En outre, par gros temps et lors des « fortes eaux », le niveau s’élève jusqu’à plus de 1,50 mètre au-dessus de son plan coutumier, autorisant à penser que le lac est en relation avec une rivière souterraine. Aux temps romains, des galeries artificielles avaient été creusées. Celles-ci devaient permettre, aux mineurs, de travailler à pied sec. Mais, encombrées par du sable, elles sont toutes obstruées et elles interdisent toute action de vidage et d’assainissement.

A la fin de la visite exploratoire, deux questions se posent : « Des recherches hydrologiques seront-elles, un jour engagées et autoriseront-elles un acquis des connaissances sur l’origine de ces eaux ? » et « La grotte-mine de Gériols, une quelconque cathédrale de pierre riche en histoire, sera-t-elle ouverte, dans un avenir plus ou moins lointain, à des hordes « gourmandisées » par le voyeurisme à défaut d’en autoriser l’accès à un public de connaisseur ? » Et réponses y seront-elles données ?

 

Raymond Matabosch