au XXème siècle,

 

Suite de l'entre deux guerres.

 

 

Cette photographie a été prise après la signature de l'armistice à la sortie du «wagon de l'Armistice» du train d'État-major du maréchal Ferdinand Foch (deuxième à partir de la droite).

Nous sommes à la fin de la première guerre mondiale, les Allemands ont signés le 11 novembre 1918 à 5 heures 15 l'armistice mettant fin à la première guerre mondiale 1914-1918 et à la capitulation de l'Allemagne, les Armées alliées ont été victorieuses. Le cessé le feu eu lieu à 11 heures et ce fut une immense fête, des sonneries de cloches et de clairons ont retenti dans toute la France. Cette guerre à fait plus de 18 millions de morts et des millions d'invalides et de blessés.

Les généraux Allemands et Alliés se réunirent dans un wagon-restaurant du maréchal Foch aménagé  dans la clairière de Rethondes, en forêt de Compiègne. Plus tard en 1919, à Versailles, ils signeront le traité de Versailles.

Ce wagon sert actuellement de musée, et je dois clamer ma honte que le sentier maréchal Foch qui mène en forêt au Wagon soit fermé à l'entrée du musée et non entretenu, il est à l'abandon.

 

Après les pertes dues à la guerre, la Franc-maçonnerie Française reprend sa progression, le Grand Orient de France passe de 23000 membres en 1919 à 33000 dans les années 1930, tandis que la Grande Loge de France passe de 6300 membres à 16000 sur la même période.

 

Après cette première guerre mondiale le Grand Orient de France, en abaissant les droits d'initiation favorisa un recrutement étendu à la classe ouvrière et en particulier aux dirigeants syndicalistes. Cela eu pour effet une ouverture bien marquée à gauche commencée d'ailleurs bien avant la guerre. On constate en effet qu'après la guerre de 14-18 le vote de l'impôt sur le revenu en 1917, (voir le dossier précédent René Viviani) les questions économiques et financières remplacent de plus en plus la question laïque dans les obédiences. Dans ce domaine les Frères se heurtèrent à la politique Française de 1919 à 1939 entre les intentions et les programmes des gouvernements de gauche inspirés plus ou moins par les résolutions des obédiences et les réalités d'influence.

D'une façon certaine la période de 1919 à 1939 fut une hostilité quasi générale au système capitaliste libéral.

Ce fut aussi l'adhésion au collectivisme de type social démocrate Allemand et au travaillisme Britannique.

Cette situation va aviver les divisions entre les frères. Certains sont attirés par la SFIO, ils sont majoritaires et d'autres optent pour le communisme. En 1922 le congrès de l'Internationale communiste [1], à la demande de Zinoviev [2], interdit la double appartenance au parti communiste et à la Franc-maçonnerie. La plupart des francs-maçons socialistes qui avaient choisi le parti communiste après la scission du congrès de Tours [3] le quittent alors. Des loges de réfugiés russes, fermées par les bolchéviques, se reconstituent en France, «Astrée» à la Grande Loge, «l'étoile du Nord» et «la Russie libre» au Grand Orient.

Les ouvriers qui étaient déjà peu nombreux dans les loges malgré l'abaissement des droits d'initiation ont eu peu de chance de grossir les rangs des loges. Néanmoins le Grand-Orient continue son engagement dans la cité et publie un manifeste intitulé «Aux forces de gauche». Ce texte diffusé à cinq cent mille exemplaires contribue partiellement à la victoire du Cartel des gauches.

Le cartel des gauches victorieux aux élections législatives Françaises de mai 1924 puis de 1932, est une coalition qui regroupe les radicaux (qui dominent la gauche jusqu'en 1936) et les socialistes. Les premiers députés communistes qui sont élus en 1924 siègent dans l'opposition. Les socialistes ne participent pas au gouvernement de peur de se faire taxer de trahison sociale par les communistes qui verraient en cette alliance une collaboration avec un régime bourgeois. Ils posent même en 1932 des conditions à leur participation, qui sont rejetées par les radicaux, les «conditions Huygens».

Aussi, la victoire de 1924 est une simple entente électorale et non une collaboration, dictée essentiellement par la volonté commune de battre le Bloc national (coalition de droite majoritaire à l'Assemblée nationale de 1919 à 1924). Des radicaux, comme Aristide Briand ayant participé aux gouvernements du Bloc national, les socialistes font savoir qu'ils refusent de gouverner, ne faisant que soutenir les orientations politiques prises en cas de succès. Le Cartel des gauches se constitue à la fin de l'année 1923 contre le Bloc national. Le Cartel des gauches associe 4 groupes :
* les Radicaux indépendants (frange de droite des radicaux),
* les radicaux-socialistes, unifiés désormais,
* les républicains-socialistes, des socialistes indépendants (Paul Painlevé),
* la SFIO.

La scission intervenue à l'issue du Congrès de Tours permet à la SFIO de se tourner vers une nouvelle alliance avec les radicaux, dans la plus pure tradition républicaine des alliances électorales. Ce sont les premiers pas vers la formation du cartel, encouragée par les relations qu'entretiennent entre eux socialistes et radicaux au sein de la Ligue des droits de l'Homme et des loges maçonniques. Comme au temps du Bloc des gauches, le Cartel des gauches repose essentiellement sur la formation de comités locaux et sur le soutien de sociétés de pensée et de loges maçonniques. Les fonctionnaires officieusement organisés au sein de la Fédération des fonctionnaires de Charles Laurent, proche de la CGT, et tout particulièrement les instituteurs soutiennent activement la constitution de la nouvelle coalition.

Les socialistes qui voudraient remédier à la dette par l'adoption d'un impôt sur le capital et notamment sur les profits réalisés pendant la guerre ce qui effraie les détenteurs de capitaux va provoquer la chute du Cartel, tandis que les radicaux ne veulent pas prendre de mesures sévères. Herriot a recours à de nombreuses avances auprès de la Banque de France, qui est encore entre les mains d'intérêts privés les «200 familles». La paralysie financière provoque dès lors la chute de son gouvernement en avril 1925. Se succèdent alors les gouvernements de Painlevé puis de Briand.

En juillet 1926, Herriot tente de reformer un gouvernement, mais une véritable crise dans le milieu financier provoque la chute finale du cartel, la spéculation provoque la chute du franc, chute à laquelle seul le retour de Poincaré remédiera, fort de son «Verdun financier», c'est la fin du bloc national. Ainsi le Cartel des gauches est mort en 1926 de ne pas avoir su affronter le mur de l'argent qui indique le poids des élites économiques dans la politique de l'entre deux guerres.

Le progrès social et l'humanisme de gauche des loges sont malheureusement entachés après l'échec du Cartel des gauches en matière de politique financière par l'arrivisme et l'affairisme d'une minorité de «faux frères».

 

C'est le cas lors de l'affaire Stavisky [4] qui éclate en 1934 sous la présidence du frère Chautemps et qui permet à la droite de réunir les conditions d'un complot. Stavisky était un escroc qui avait su utiliser le milieu maçonnique, les journalistes, quelques avocats véreux et des policiers douteux en y mettant le prix.

Il avait réussi à rafler huit cents millions à l'épargne Française et les avaient dépensés avec prodigalité. Stavisky était un aventurier qui avait distribué cent millions pour acheter le silence public. Il subventionnait les campagnes électorales des partis politiques et les fonds occultes des personnages influents. Parmi ces personnes se trouvaient des francs-maçons.

La Maçonnerie comme la République s'étaient compromises. Les anti-maçons s'en réjouirent, il en résulta une manifestation qui failli faire renverser la IIIè République. Le 6 février 1934, de nombreux fascistes réclament la fin du parlementarisme et l'interdiction de la franc-maçonnerie. Dès cette époque, le mythe de l'emprise judéo-maçonnique sur la vie politique reprend du service.

Néanmoins les forces réactionnaires se font battre aux élections de 1936. Le Front Populaire composé de radicaux socialistes avec le soutien communiste arrive au pouvoir et transforme la société Française par ses lois généreuses, les congés payés et la semaine des quarante heures. Au défilé du 14 juillet 36, le Grand-Orient se fait représenter. Ainsi, il soutient implicitement la politique du Front Populaire mené par les frères Ramadier, Salengro, Viollette, Chautemps et Zay. Ce fut une véritable revanche pour les organisations démocratiques et maçonniques peu de temps avant la grande guerre de 1940

Après le 6 février, la droite parlementaire commence à durcir son discours et à se rapprocher de l'extrême droite. Plusieurs de ses leaders perdent confiance dans les institutions parlementaires. Cette droitisation s'accélère après 1936, avec le Front populaire et la guerre d'Espagne.

Pour l'extrême droite, le 6 février représente une occasion manquée de renverser le régime, occasion qui ne se retrouvera qu’en 1940. La déception qu’ont suscitée les ligues conduit à la radicalisation de certains qui se tournent alors vers le fascisme ou le national-socialisme.

 

[1] L'Internationale communiste.

ou Komintern d'après son nom russe Коммунистический Интернационал, Kommunistitcheskiy Internatsional, ou Troisième Internationale est née d'une scission de l'Internationale ouvrière [1.1], scission réalisée le 2 mars 1919 à Moscou sous l'impulsion de Lénine et des bolcheviks,  l'Internationale communiste regroupa les partis communistes qui avaient rompu avec les partis socialistes de la IIe Internationale.

250px-stalin-lenin-kalinin-1919.1243783124.jpgStaline, Lénine et Kalinine au VIIIe congrès du Parti communiste russe, mars 1919.

La Troisième Internationale était dirigée par le Parti communiste de l'Union soviétique, bien que ce dernier entretînt toujours la fiction qu'il n'en était qu'une section parmi d'autres. Elle était théoriquement sans rapports avec l'État soviétique, bien qu'elle fut de plus en plus mise par Staline au service des intérêts de ce dernier. Si les directives étaient élaborées à Moscou, la plaque tournante du Komintern était Berlin jusqu'à l'avènement de Hitler en 1933, puis Paris.

 

[1.1] L'Internationale ouvrière.

Elle fut fondée, à l'initiative notamment de Friedrich Engels[1.1.1], par les partis socialistes d'Europe lors du Congrès de Paris en juillet 1889, elle est aussi connue sous le nom de Deuxième Internationale, ou Internationale Socialiste. Certains anarchistes furent présents à ce congrès, réclamant le groupement des travailleurs en lutte essentiellement sur le terrain économique, et rejetant la division politique, mais ils en furent exclus pour les raisons de divergence tactique claires.

Se fondant, comme la Première Internationale, sur le constat de la lutte des classes, la Deuxième Internationale milite jusqu'au début du XXe siècle sur les bases du marxisme. Mais certains courants se développent à la droite de l'Internationale, prêchant l'abandon du principe selon lequel «l'émancipation des travailleurs doit être l'œuvre des travailleurs eux-mêmes» (principe révolutionnaire qui était celui de la Première Internationale) et recommandant de privilégier le parlementarisme (réformisme). En 1904, le congrès donne cependant raison au révolutionnaire Jules Guesde contre le réformiste Jean Jaurès, choix inverse de celui des élections qui donnent 31 députés à Jaurès et 12 à Guesde.

Après le déclenchement de la Première Guerre mondiale, les leaders socialistes (à l'exception des Russes et des Serbes), votèrent les crédits militaires demandés par les gouvernements. Les militants fidèles à l'internationalisme et au pacifisme dénoncent ce reniement de la majorité, et militent contre la guerre, ce qui leur vaut souvent d'être exclus de la Deuxième Internationale (c'est le cas par exemple de Rosa Luxemburg et de Karl Liebknecht en Allemagne).

Ces militants hostiles à la guerre sont alors appelés «communistes», par opposition à leurs ex-camarades socialistes. Durant le conflit, deux conférences, celle de Zimmerwald et surtout celle de Kienthal, ont réuni les militants de la gauche de l'Internationale «communistes», parfois exclus, pour s'opposer à la guerre et aux «socialistes» la soutenant. Suite à la Révolution russe, de nombreux socialistes quittent la Deuxième Internationale pour rallier la Troisième Internationale fondée par les communistes russes en 1919, et comportant déjà diverses organisations communistes (notamment les spartakistes Allemands exclus pendant la guerre du SPD).

D'autres vont former Union des partis socialistes pour l'action internationale, connu sous le nom d'Union de Vienne ou Internationale Deux et demie. En 1923, les derniers partis membre de l'Internationale ouvrière se rassembleront avec ceux de l'Union de Vienne pour former l'Internationale ouvrière socialiste.

Il faut comprendre que cette période est une période de changements politiques importants, l'avènement de la gauche avec ses différentes facettes, que l'on retrouve aujourd'hui sous une autre forme mais toujours aussi divisée, ne facilite pas bien compréhension des mouvements politiques, elle se cherchait elle même. La guerre avait bouleversé la stabilité des pensées et la droite nationale était en perte de vitesse, les hommes ressentaient un besoin de liberté sociale et de justice dont la droite les avaient privés.

 

[1.1.1] Friedrich Engels.

Friedrich Engels, né à Barmen (aujourd'hui une partie de Wuppertal), 28 novembre 1820 – décédé à Londres, 5 août 1895, fut un philosophe et théoricien socialiste allemand, grand ami de Karl Marx.

220px-friedrich_engels.1243789374.jpgEn 1884 à la première rencontre avec Karl Marx à Paris, ils découvrent qu'ils partagent les mêmes idées et décident de collaborer étroitement. Après que Marx ait été expulsé de France, ils s'installent en Belgique, où la liberté d'expression est plus grande que dans d'autres pays d'Europe.

A Bruxelles en janvier 1846, où ils fondent le Comité de Correspondance Communiste. Le but est d'unifier les socialistes des différentes parties de l'Europe. Influencé par les conceptions de Marx, la Ligue des justes, organisation socialiste, se transforme en Ligue des communistes. Sur demande de la Ligue des communistes, Marx commence en 1847 à rédiger un pamphlet basé entre autres sur les Principes du Communisme d'Engels. Cet ouvrage, est écrit de manière à rendre les principes communistes accessibles à tous. Il est intitulé Manifeste du Parti communiste, et publié anonymement en février 1848.

 

[2] Zinoviev, grande figure du bolchévisme.

Grigoriy Evseïevitch Zinoviev de son vrai nom Ovsel Gershon Aronov Radomyslsky aussi connu sous le nom d’Hirsch Apfelbaum, est un révolutionnaire bolchevique.

Il est né le 23 septembre 1883 de parents juifs, journaliers agricoles. Il est mort le 25 août 1936.

150px-grigory_zinoviev.1243789034.jpgAutodidacte, Zinoviev milite, d'abord, dans le sud de la Russie. Émigré en 1902, il rencontre en Suisse Lénine ce dernier le pousse à entrer au parti bolchevique, ce qu'il fait l'année suivante. Il joue un rôle important dans l'organisation du PCUS, (Parti Communiste de l'Union Soviétique), à Saint-Pétersbourg. Après l'échec de la révolution de 1905, son activité principale se concentre dans le journalisme et les publications du parti.

Poursuivi par la police, il quitte la Russie de 1908 à 1917. Il est élu au comité central en 1907 à Londres. Il rejoint Lénine à Genève l’année suivante pour devenir son bras droit jusqu'en 1912, Président du Soviet de Petrograd en décembre, il tient fermement les rênes de cette organisation, la plus importante du pays. Il dirige, aussi, depuis 1919, à sa création, le Comité exécutif de l'Internationale communiste (Komintern) où son influence sera importante dans l'évolution des partis communistes européens, notamment en France.

Le meurtre de Kirov le 1er décembre 1934 marque le début des Grandes Purges de Staline. Zinoviev, Kamenev et leurs associés les plus proches sont accusés du forfait. Ils sont expulsés du Parti communiste et arrêtés en décembre 1934. Ils passent en jugement en janvier de l'année suivante. On les contraint à admettre leur «complicité morale» dans l'assassinat de Kirov. Zinoviev est condamné à 10 ans de prison et ses partisans à différentes peines d'emprisonnement. En août 1936, après des mois de préparation minutieuse dans les prisons de la police secrète soviétique, Zinoviev, Kamenev et quatorze autres, essentiellement des Vieux Bolcheviques, se retrouvèrent à nouveau devant le tribunal. Cette fois on les accuse d'avoir formé une organisation terroriste dont on suppose qu'elle est responsable de l'assassinat de Kirov et de tentative d'assassinat contre Staline et contre d'autres chefs du gouvernement soviétique. Le procès conduisit à la condamnation à mort des accusés, dont Zinoviev et Kamenev, exécutés aussitôt après la sentence, le 25 août 1936.

 

[3] Le congrès de Tour.

Le congrès de Tours est le 18ème congrès national de la Section Française de l’Internationale ouvrière (SFIO) du 25 décembre 1920 au cours duquel fut créée la Section Française de l'Internationale communiste (SFIC, futur Parti communiste Français — PCF), c'est la scission.

Durant le congrès, la SFIO se divisa en trois camps.
* Le premier, majoritaire, rassemblait les partisans de l'adhésion à la IIIe Internationale communiste, révolutionnaires (qui ne partageaient cependant pas toutes les 21 conditions des bolchéviks fondateurs, qui de fait ne furent pas votées lors du congrès). Il s'agissait surtout des plus jeunes dirigeants du parti soutenus par un très grand nombre de membres.
* Le second camp, mené par Léon Blum et la majorité des élus, refusait totalement l'adhésion et souhaitait rester au sein de la IIe Internationale.
* Le troisième camp était mené par une minorité acceptant l'adhésion, mais seulement sous certaines conditions. Ceux-ci, ne pouvant mettre en avant leurs revendications, se regroupèrent avec le second camp.

La SFIO se sépara donc en deux, d'une part la «Section Française de l'Internationale communiste» (SFIC, futur PCF), majoritaire à Tours (3208 voix), et d'autre part la SFIO, minoritaire (1022 voix). Cette scission fut suivie par celle de la CGT en 1921, avec la formation de la Confédération générale du travail unitaire (CGTU), de tendance communiste.

 

[4] L'Affaire Staviski.

Le 9 janvier 1934, les Français apprennent la mort par balle du financier Alexandre Stavisky, juif d'origine Russe, dans un chalet de Chamonix «Le vieux logis». Suicide ou assassinat, la disparition brutale de Stavisky secoue la troisième République. Sa mort est selon toutes apparences consécutives à un suicide mais très rapidement, l'opinion publique soupçonne des hommes politiques de premier rang de l'avoir fait assassiner pour le faire taire.

L’affaire éclate le 29 septembre 1933 à Bayonne. Des irrégularités financières sont découvertes au Crédit Municipal. La France est à cette période touchée de plein fouet par la crise économique mondiale née suite au célèbre krach de 1929.

stavisky.1243798576.jpgAlexandre Staviski.

La méthode d’Alexandre Stavisky est simple. S’enrichir sur le dos du Crédit Municipal en faisant ouvrir par des maires complices qui émettent des bons gagés sur la valeur des dépôts, négociables par les banques. Le problème, c'est que les bons en question étaient souvent engagés sur de faux bijoux, ou pire, sur des dépôts inexistants. Grâce à ses habituelles complicités, Stavisky a fait émettre à Bayonne des bons de caisse pour une valeur de 235 millions de Francs. Mais ceux-ci ne sont couverts qu'à hauteur de 20 millions par des dépôts de bijoux et autres valeurs pour couvrir la garantie.

À la fin de 1933, la France est en crise, crise économique venue d’Outre-Atlantique, qui ronge le tissu social du pays, mais aussi crise politique, conséquence d’un système parlementaire facteur d’instabilité ministérielle, crise morale révélée par les multiples scandales qui éclaboussent régulièrement la classe politique de la IIIe République, crise de civilisation, enfin, à l’heure où les démocraties et les totalitarismes se font concurrence pour le contrôle des masses, et où technique et consommation assoient de plus en plus le règne de l’argent au détriment des cultures et des personnes.

D’une banale affaire d’escroquerie, «l’Affaire Stavisky» devient un scandale politico-financier qui touche tous les milieux de la république établie, en particulier le parti radical et la franc-maçonnerie, à cette époque très présente dans la vie politique du régime et souvent considérée comme son soutien et son inspiratrice. Léon Daudet, dans son article quotidien de L’Action Française, «exécute» les «voleurs», au fil d’une plume plongée dans le vitriol. Le polémiste, jadis lui-même député de Paris, dénonce les mauvaises mœurs parlementaires de la IIIe République et les pratiques policières de celle-ci. Pour définir les politiciens et magistrats touchés par le scandale, il évoque une «bande de traîtres, de voleurs, d’assassins» qu’il s’agit de poursuivre jusque dans «la caverne des brigands», c’est-à-dire le Palais-Bourbon.

Le gouvernement a essayé de noyer l'affaire mais il comptait sans l'AF, l'Action Française royaliste, et les Camelots, les ligues populistes de droite et les communistes dénonçant la décadence de la troisième République.

18135269_p-les-emeutes-de-laffaire-staviski.1243798743.jpgDès le 9 janvier, la Chambre est assiégée par le peuple de Paris mené par les Camelots. Tous les jours, les manifestants sont plus nombreux que la veille et la police de plus en plus nerveuse n'arrive pas à avoir le dessus. Le 27 janvier, le ministère Chautemps s'effondre dans la boue et le sang. L'indignation populaire entraine la chute du gouvernement radical-socialiste. Daladier lui succède, Chiappe est chassé de la Préfecture de Police et remplacé par Bonnefoy Sibour. Le 6 février, le ministère Daladier se présente devant la Chambre. Les patriotes se massent place de la Concorde, aux Champs-Elysées, aux Invalides, au quartier Latin, à l'Hôtel de Ville. Les Camelots du Roi sont partout, il y a aussi les J.P, (Les jeunesses patriotes), les Croix de Feu, la Solidarité Française, les associations d'anciens combattants. Au total 30.000 manifestants criant «A bas les voleurs !». La foule, dont certains manifestants sont armés, menace le pont de la Concorde. Les cavaliers de la Garde chargent mais doivent faire demi-tour, la police à pied prend leur place, les manifestants qu'elle peut entraîner et arrêter sont frappés à coups de matraque, blessés et couverts de sang. La foule arrête un bus et le brûle, les pompiers arrivent et dirigent leurs jets contre la foule qui s'empare des lances et les retourne alors contre eux. Le barrage du pont va être emporté, alors sans aucune sommation, les fusils-mitrailleurs se mettent à crépiter, des hommes tombent, la foule continue à avancer. Une charge de cavalerie l'arrête, aucun coup de feu n'est parti des manifestants. Jusqu'à une heure avancée de la nuit, les charges se succèdent, comme les coups de feu.

Seize manifestants et un policier sont tués. On compte un millier de blessés.

La gauche parlementaire dénonce dans la manifestation du 6 février une tentative de coup d'État fasciste. Elle appelle au rassemblement des forces progressistes. Trois jours plus tard, une contre-manifestation à laquelle participent les socialistes et les communistes dégénère à son tour et fait 15 morts et 1500 blessés.

 

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