KÖRPERWELTEN : une exposition à corps ouvert.

Peut-être est-il étrange mais normal que de constater que la mort est une grande source d’inspiration pour la plupart des artistes qui font ce monde depuis des décennies. Que ce soit dans le domaine de la chanson, du cinéma, des peintures, des gravures et des expositions, la mort  est souvent présente, sûrement à cause de toutes les questions sans réponse qui l’entourent.

Mais si l’art devait être morbide, Damien Hirst aurait peut-être été le premier à faire sensation lorsqu’il a montré au monde entier des animaux morts, conservés dans  différents matériaux. D’ailleurs, l’une de ses œuvres les plus connus est sans doute cette vache coupée en deux, avec un veau dans son ventre, conservé dans un bloc de résine translucide, pour être exposée aux yeux de spectateurs curieux. Barbare ? Horrifiant ?

Comme quoi la nature humaine étonnera toujours, la photographe Diana Michener, prit tout d’abord en photo des vaches dans des abattoirs londoniens, puis des corps humains dans les morgues et réalisa des clichés de nouveau-nés morts conservés dans du formol.

Toujours plus loin dans l’horreur et peut-être à l’ascension de ce registre, le Professeur Gunther Von Hagens s’empara de l’anatomie de tout être humain pour créer cette méthode de conservation quelque peu étrange qu’on appelle la plastination, et exposa ainsi environ 200 spécimens humains authentiques où organes individuels et tranches de corps transparents s’emparent des salles d’exposition du monde entier.

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Qu’est-ce que la plastination ?

C’est le Professeur et anatomiste allemand Gunther von Hagens lui-même qui inventa cette méthode de conservation étrange en 1977, qui se réalise en quatre étapes :

  – En premier lieu, les corps ou parties du corps que l’on veut conserver sont imprégnés intégralement de formol, de sorte à ce qu’il soit fixé sur tous les tissus jusqu’à la moindre cellule, pour permettre l’arrêt définitif de la dessiccation et la putréfaction des tissus.

–Les corps sont ensuite placés dans de grands bains d’acétone (sorte de solvant très utilisé en laboratoire et en industrie) froid pour éliminer les fluides. Le processus dure environ quinze jours, avant que les corps, ou parties du corps soient plongés dans un bain d’acétone chaud pour, cette fois ci, dissoudre les graisses.

–Ce qui a pu être dissout par cette acétone est alors remplacé par du silicone de caoutchouc ou de la résine époxy, afin d’également combler tous les tissus. Ce qui permet alors un durcissement après une fixation aidée par un gaz durcisseur ou par la chaleur.

-Il n’y a alors plus qu’à faire la « mise en forme » qui rassemble un corps complet à l’aide de câbles, pinces, bloc de mousses…

  Il est vrai que le résultat est étonnant de réalité et que l’on peut ainsi découvrir que le corps humain a encore beaucoup de chose à nous montrer. Cependant, l’Exposition Körperwelten ne cesse de me partager en deux comme, je crois, tous ceux qui auront vu cette exposition.

Les formes et la physiologie précises et parfaites du corps humain sont admirablement représentées à travers 200 nouveaux spécimens humains authentiques, d’autant que l’on peut remarquer les véritables progrès de la science. Il est impressionnant de pouvoir réellement comparer un corps sain d’un corps malade ; par exemple des poumons d’un non-fumeur à un poumon de fumeurs, comme un foie en parfaite santé et un exemple de cirrhotique (atteint d’une cirrhose), des cœurs dysfonctionnels et robustes, ou encore des corps d’un poids optimal et excessif. De plus, les mises en scènes, parfois peut-être un peu grotesques, se révèlent également intéressantes dans le sens où on peut réellement voir comment agit le muscle. Le côté médical est vraiment passionnant. Certains témoignages de médecins confirment que cette mise en situation réelle de ces corps leur a permis de voir le fonctionnement de certaines parties du corps humain, comme il n’est pas souvent le cas.  

Et pourtant, il y a ce côté voyeurisme et quelque peu malsain qui me dérange. Il ne faut pas oublier que cette « œuvre » de Gunther von Hagens reste une polémique qui pose de nombreuses questions d’éthique et de légalité. Sur la liste de donation, 9 000 personnes seraient déjà inscrites afin de léguer leur corps au Professeur, alors que certains pays voient là une profanation. Mais est-il humain et acceptable d’exhiber des cadavres, de se servir de véritables corps humains pour créer des œuvres d’art et d’exposer cela au monde entier ? Personnellement, certains corps plastinés m’ont choquée et ont réussi à me donner ce pincement au cœur qui parfois me fait dire que c’est inhumain de faire une chose pareille. Car voir l’évolution d’un fœtus a vraiment été pénible, autant que voir ces femmes enceintes, ces nourrissons, ces enfants…   Oui, peut-être que « Gunther von Hagens se présente comme un artiste/anatomiste, repoussant les frontières entre art et anatomie comme l’ont fait des artistes et médecins de la Renaissance », mais à quel prix ?   Quoiqu’il en soit, vous pourrez toujours vous faire votre propre avis : Köperwelten 4 voyage encore à travers le monde entier.