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Le 18 janvier 1945, deux ans et demi passés dans des conditions atroces, les SS s’activent et je vois en eux qu’il y a quelque chose d’inhabituel. Ils nous disent de sortir en rang, il faut partir ! L’armée rouge va bientôt arriver pour libérer Auschwitz, les malades sont abandonnés sur place, quelques personnes ont réussi à se cacher pour pouvoir être libérées, malheureusement, je n’ai pu le faire. Moi et ma mère commençons une marche interminable, la marche de la mort. Des heures et des heures de marches à un rythme effronté, ce qui ne peuvent pas suivre le rythme sont abattus, il ne faut pas perdre de temps. Certains SS donnent des coups de bâtons pour que nous nous hâtions.

Nous sommes en hiver, je souffre du froid, de la fatigue et de la faim. Mes pieds sont en sang mais le froid anesthésie la douleur, je ne sens plus mes membres. Ma mère tombe parfois, je me dépêche de la relever avant que les SS la voient et prennent l’idée de la tuer. Nous arrivons enfin à destination.

Bergen Belsen. Encore plus dur de vivre, il n’y avait presque pas de nourriture car nous étions encore plus nombreux, Rosette Widawski m’a aidée à trouver de la nourriture, derrière les barbelés, un camion de rutabagas était là, malgré les miradors et les assauts des mitraillettes, elle allait chercher ce trésor ; « la faim était plus forte que la peur ». Nous mangions les rutabagas crus…

 

L’appel était encore plus dur en hiver, le froid nous accablait. L’épidémie de typhus faisait des ravages, ma mère le contracta peu de temps après son arrivée à Bergen Belsen, sans soin, de plus en plus faible, elle mourra peu de temps après. Les poux me parcouraient tout le corps, les voir me marcher dessus était atroce. Plus de case minuscule où s’entasser pour dormir, à Bergen Belsen, notre couchette est le sol lui-même, en terre battue, un matelas de dureté et de froideur.

 

Le 15 avril 1945, je suis libérée, les Anglais sont arrivés et nous ont tous sauvé, des médecins ont soigné les malades et nous avons été rapatriés. Le calvaire est enfin fini. Une fois arrivée en France, un hôpital me prend en charge. Une des infirmière m’a prévenu que mon père était encore vivant et allait venir me rejoindre en fin de semaine. J’étais tellement heureuse et triste à la fois. Je songeais à ma mère et à sa mort, je devais annoncer cette terrible nouvelle à mon père qui l’ignorait encore.

Les séquelles sont inestimables et irréparables. Les blessures physiques se cicatrisent mais les souvenirs restent éternellement gravés.

Après ces recherches, je me sens profondemment touché, surtout quand je me rapelle Thérèse Menot, si petite, tant d’émotion quand je me suis penché vers elle pour lui faire la bise, une envie de pleurer attroce me déchirait le coeur, l’écouter raconter son calvaire était trop dur, le calvaire d’une toute petite femme par la taille mais si grande par le coeur, le calvaire de tout un monde, celui de notre histoire.

 

Hommage à Thérèse Menot, rescapée du camp de Ravensbruck, décédée dans ma ville, Limoges, le 13août 2009

 

Une pensée pour tous les autres, ceux qu’on oublis, moi je ne vous oublie pas…