Voici quelques années quatre sujets étaient proposés (l'histoire n'a pas retenu dans quelle série) : la Religion, la Noblesse, la Maternité, le Doute.
Moins de cinq minutes après leur distribution, une candidate remettait sa copie. A l'examinateur qui lui recommandait de rester jusqu'au bout et de ne pas risquer le zéro éliminatoire, elle répondit : "Ce n'est pas du tout une copie blanche : j'ai même traité les quatre sujets". Puis elle quitta la salle.
Interloqué, l'examinateur lut la copie (ce qu'il n'aurait pas dû faire, bien entendu !). Et il dut se rendre à l'évidence : les quatre sujets étaient bel et bien traités, en une seule phrase qui plus est :
"Mon Dieu ! s'exclama la comtesse. Me voici enceinte et je ne sais pas de qui …"
Tentons de renouveler l’exploit (si non e vero e ben trovato !).
Pour les Terminales S :
- Est-il absurde de désirer l'impossible?
- Y a-t-il des questions auxquelles aucune science ne répond?
- Commentaire de texte: un passage de "La Démocratie en Amérique", d'Alexis de Tocqueville, sur la façon d'intéresser les citoyens à la démocratie. Extrait :"C'est donc en chargeant les citoyens de l'administration des petites affaires, bien plus qu'en leur livrant le gouvernement des grandes, qu'on les intéresse au bien public."
Peut-être était-il possible de traiter ces trois sujets en pastichant Pierre Desproges (au fait, cet auteur est-il au programme ? Si non, pourquoi ? Ne serait-ce pas un premier exemple de question à laquelle la science ne répond pas ?…) :
« Si l'on ne devait parler que de ce que l'on connaît, le pape parlerait-il du stérilet de ma belle-sœur ? Sarkozy parlerait-il des pauvres ? Les intégristes parleraient-ils de liberté ? Est-ce que je parlerais des intégristes ? »
Je sèche pour la Maternité … Mission sans doute impossible (et donc absurde) pour un homme ! Bien sûr, il y eut le fameux « Soyez réalistes : demandez l'impossible ! », mais c'est une tellement petite affaire que l'on peut s'étonner que le gouvernement des grandes lui accorde une si large place, au détriment, parfois, du bien public. Marcel Pagnol (non scientifique) hasarde une variante : « Tout le monde savait que c'était impossible. Il est venu un imbécile qui ne le savait pas et qui l'a fait ».
Pour les Terminales ES :
- Que gagne-t-on à échanger?
- Le développement technique transforme-t-il les hommes?
- Commentaire de texte: un passage de l'"Essai sur l'entendement humain" de John Locke, qui soutient que les valeurs morales ne sont pas innées chez l'homme, mais le résultat d'un besoin pratique. Extrait: "Je reconnais que les hors-la-loi eux-mêmes les respectent (l'équité et la justice) entre eux; mais ces règles ne sont pas respectées comme des lois de nature innées: elles sont appliquées comme des règles utiles dans leur communauté."
Voilà qui n'est pas sans évoquer la crise économique et sociale ; c'est donc du côté des hommes politiques qu'il faudrait chercher l'inspiration.
Charles Pasqua, peut-être (au fait, cet auteur est-il au programme ? Si non, pourquoi ? Second exemple de question à laquelle la science ne répond pas ?…) ? Essayons :
« Les promesses n'engagent que ceux qui les écoutent ».
Tous les banquiers vous le diront : le développement des techniques financières les a transformés et, en appliquant des règles utiles à leur communauté, ils ont gagné à l'échange. Il est vrai que les valeurs (autres que boursières) ne leur semblent pas innées, puisqu'il en faut sérieusement envisager la moralisation.
Pour les Terminales L :
- Le langage trahit-il la pensée?
- L'objectivité de l'histoire suppose-t-elle l'impartialité de l'historien?
- Commentaire de texte: un passage de "Le monde comme volonté et comme représentation" d'Arthur Schopenhauer, sur les rapports entre le désir comme privation, et la satisfaction de ce désir. Extrait: "Le désir, en effet, la privation, est la condition préliminaire de toute jouissance. (…) Donc la satisfaction, le contentement ne sauraient être qu'une délivrance à l'égard d'une douleur, d'un besoin."
Oh ! mânes de Coluche (au fait, cet auteur est-il au programme ? etc. …, etc. …), accourrez à notre secours :
« Le capitalisme, c'est l'exploitation de l'homme par l'homme ; le communisme, c'est l'inverse ».
Si l'inverse d'une proposition définit une chose et que l'inverse de cette chose est défini par la même proposition, alors le langage trahit la pensée.
Sauf si l'impartialité de l'auteur n'est que feinte, tournant ainsi l'objectivité en dérision.
Ou sauf encore, si les deux choses ne sont en réalité que les deux facettes d'une même troisième : l'exploitation (Homo homini lupus).
Notion qui nous renvoie à d'autres interrogations : la satisfaction (des uns) nécessiterait-t-elle la douleur (des autres) ? D'où l'on peut enchaîner : Que gagnerait-t-on à cet échange ? Serait-on condamné à la souffrance pour désirer le possible ?
Questions auxquelles nulle science, hors la vie, ne répond.
Nicanor, je vous attends …
et si je vous propose cela en réponse du sujet :
Le langage trahit-il la pensée?
Le langage est l’une des composantes de la communication qui elle-même se définit comme se composant, d’un émetteur d’un récepteur d’un code de communication ainsi qu’un vecteur de communication. La communication suppose de fait que l’emetteur et recepteur doivent interagir de façon cohérente en rapport avec les échanges, ce qui signifie que les signifiants et signifiés, donc les mots et leurs interprétations, soient similaires.
De fait le langage est donc inclus dans ce système de compréhension du récepteur d’un message émis par un émetteur.
Le message ci avant évoqué, est constitué d’un contenu qui peut etre interprété par le recepteur en fonction de son assimilation du langage. Cette interprétation se traduit donc par la production de pensée qui est traitée par le psychisme du recepteur.
Si on reprend la seconde topique de Freud, la personnalité, donc le psychisme d’un individu se constitue de trois instances inconscientes, le Ca Moi Surmoi. Le Ca étant l’instance des pulsions primaires (donc des pensées primitives) qui poussent inconsciemment à la satisfaction. Cette pulsion se heurte au Surmoi qui est l’instance de la morale et des représentations de la loi, qui va la refouler afin de rayonner dans le Moi sous une forme tolérable à l’égard de la société et relativement satisfaisante vis-à-vis de la pulsion.
On peut donc dire que la pensée est régulée inconsciemment.
Il arrive cependant que le Surmoi n’arrive pas à refouler la pulsion et donc laisse échapper un signe de la pensée d’origine sous forme de lapsus ou bien d’acte manqué. Parfois même, l’individu peut ressentir la pulsion qu’il doit alors gérer de manière consciente et parfois réféchie et que donc pour que cette pulsion soit acceptable il doit adapter les signes dans son message pour ne pas laisser apparaitre sa pensée.
Le meilleur exemple serait de prendre ce sujet de baccalauréat auquel je pourrais dire spontanément à un ami.
« Le sujet était particulièrement passionnant bien même si c’était obligatoire de le traiter sans conviction, j’ai pu écrire quelques lignes qui me sont venues de façon naturelle en y réfléchissant pendant 3h. ».
Même s’il ne sera pas de mon avis car je le vois rien écrire depuis le début de l’épreuve, il comprendra cette phrase car le langage lui est adapté. Elle laisse entendre d’un premier abord que ce sujet m’a paru très enrichissant et incitant à la réflexion,. Je peux tourner ma phrase de manière à ne pas perdre la face et faire croire que j’ai rempli une copie entière, mais des mots parsemés laissent bien apparaître que ce sujet n’était pas franchement celui que j’aurai voulu voir apparaitre, et que le langage bien qu’adapté à mon ami ne cache pas entièrement mon amertume (donc ma pulsion de colère) envers le peu d’inspiration que le sujet a suscité chez moi.
Ces mots parsemés peuvent donc être dits de manière consciente, ce qui induit donc une forme d’humour donc ce n’est pas une trahison de la pensée ; mais dits de manière inconsciente ce sont des lapsus résultant d’une pensée qui s’ils sont entendus par mon professeur de philosophie me reprochera peut être à juste titre une incompréhension totale de la philosophie et que ma production ne suscitera chez mon correcteur soit une rigolade soit de la désespérassion soit encore une indulgence à évaluer cette copie comme telle.
La philo, que nul pays au monde ne nous envie, est le marronnier de fin juin qui consacre la prééminence de l’enseignement général. Une journée pour la railler grâce au babillage de quelque visages au sortir de lycées bien parisiens. Et puis la chape retombe pour un an. Longtemps, longtemps, après… je chante faux.. on comprend son erreur. L’âge était aux réponses d’une construction bancale. On croyait pouvoir y mettre la main dessus. Et puis, l’on apprit qu’il s’agissait des questions. Dédain, mépris pour cette matière trompeuse. Ou même un tourneboulé de l’esprit dont la vie, la vraie nous sauvait.
S’il pouvait n’en être resté que l’exercice permanent de la critique (E. K ou non) l’année n’aurait pas été perdue pour l’avenir qui lui se chargerait un jour ou l’autre de nous ramener vers elle. Nocanor