Cet été je suis parti à Nelja, une petite ville en bord de mer à 50 km de Malaga, où j’ai loué une villa avec mes potes (et ma copine, qui a cessé de s’épiler dès avril histoire de mieux se fondre dans le décor). Après le deuxième jour et trois bouteilles de vin, je plonge dans la piscine, gsm en poche. Paix à son âme. En rentrant chez moi, je fonce m’en acheter un autre. Peu importe le prix, peu importe la taille, ma seule condition est qu’il ne soit pas tactile. Autant chercher une aiguille dans une botte de foin.

Dépité, j’ai chopé dare-dare celui à 25 balles en noir et blanc, et ai fait ma valise pour le Portugal. Le lendemain, à l’aéroport de Zaventem, au moment de passer les portes de sécurité, je vide mes poches, ma ceinture et mon flingue pour tout mettre sur le tapis roulant. Quand j’ai déposé mon téléphone, tout le monde m’a regardé comme si je venais d’exhiber mon troisième téton. Même la voix du parlophone s’est tue. Il a fallu dix bonnes minutes pour qu’un homme d’une soixantaine d’années, muni de pinces et de gants, déclare qu’il s’agissait bien là d’un fossile de « téléphone sans fil ». Une fois là bas, même constat qu’en Belgique : tous les portables sont tactiles, avec 80% de smartphones. Je comprend pas.

                                           D’accord, il faut vivre avec son temps et je ne suis pas du tout réfractaire à l’avancée technologique. Mais c’est pas pour ça que je veux sonner à chaque pas, ou que j’ai envie d’occuper les toilettes 30 minutes parce qu’au lieu de poser une crotte et d’user huit carrés pour m’essuyer, je dois en plus répondre à jordan, lucie et patrick qui sont justement connectés sur « face » en même temps. Il n’y a pas non plus de limite d’âge, la propagande smartphonienne a bien géré son coup. Mon père en a eu un à prix ridicule, si il devenait dauphin II. Ma mère, kangourou IV, également (même si elle aurait dû attendre un peu pour profiter de la super promo dont a bénéficié mon frère, libellule I).

Je ne crache pas sur l’ingéniosité de la chose mais bien sur son omniprésence, et de surcroît la dépendance que cela engendre. Se passer du gsm classique n’est pas pratique (et si je crève un pneu ?). Se passer du smartphone est quasi impossible (et si sarah m’a répondu?). Sans compter sur toutes ces « applis » trop bien faites qui avertissent que la paire de pompe vient de se solder, qu’un ami boit un verre dans un bar à deux rues, qu’une fille de la ville veut se faire sauter dans une heure. Et tout ce qu’on sait « snapchatter » pendant un tête à tête au resto, ou « liker » durant l’enterrement de sa grand-mère. N’est ce pas merveilleux, la communication constante ?

 

                                           Je suis d’abord anti tactile, parce que je trouve que ça s’abîme trop vite. Je suis ensuite anti smartphone, à cause de la place dérangeante que ça a pris dans la société. Mais je suis surtout révolté qu’il n’y ai plus de place pour le choix. C’est une dictature technologique, et ceux qui ne suivent pas le mouvement se retrouvent complètement en décalage avec les autres. Tant pis pour nous. Ma copine, sonnant pour deux (mille), j’ai décidé d’investir dans l’industrie du serre-tête à coquille et du bouchon préformé. Avec des gens comme moi, la maison Quies n’est pas prête a faire faillite !